Finalement ils sont partit en avant. Le ‘ils’ comprend Matt et Février. Ouais Ēkā et Reflet sont décidemment trop long à la détente. Donc il a décidé de partir en avant. En avant où ? Aucune idée tant qu’il va quelque part il n’a pas besoin de point précis et se fiche de planifier. Il ne se souvient pas de son passé, alors le futur, rien à battre. Il vit au présent lui. Se dirigeant dans une direction prise totalement au hasard mais avec la parfaite assurance du mec qui connait la ville comme sa poche, il continue de dribbler avec sa balle, bruit régulier rythmant chacun de ses pas. Il jette un regard en arrière pour s’apercevoir que Février le suit. Ou plutôt se traîne comme une véritable loque. Waaah quel changement d’énergie. Il lui lance alors d’une voix moqueuse :

-          Bah alors, déjà fatiguée ?

Sourire taquin et il continue sa route. Pourtant ça ne fait pas longtemps qu’ils marchent. Ou peut-être ne s’est-il pas rendu compte de la distance, trop occupé à observer ce qui l’entoure et à enregistrer le chemin qu’ils ont pris. Son regard acier finit par se poser sur un énorme édifice se dressant devant lui. Au premier coup d’œil ça a l’air d’être un centre commerciale. Au deuxième coup d’œil aussi d’ailleurs. Et au troisième et bref. Il regarde par-dessus son épaule et s’apprête à proposer à la brune de rentrer à l’intérieur sauf que, imprévu, son pied bute contre quelque chose. Et oui quand on ne regarde pas devant soit, voilà ce que ça donne. Avant qu’il n’est pu comprendre ce qu’il lui arrive son corps se trouve entraîné inexorablement dans une chute vers le sol. Ouais la gravité tout ça. Il se rétame donc sur le goudron, grognant un « putain de bordel de merde » venant droit du cœur. Ignorant la douleur dans ses bras qui lui on servit d’amortisseur, il se relève prêt à défouler sa colère sur le truc qui a osé le faire tomber. Sauf que premièrement il s’aperçoit que c’est un corps allongé à même le sol, ce qui ne l’aurait pas empêché de shooter dedans me direz-vous, mais il se rend compte que c’est une fille et enfin que c’est June.

-Ha pardon.

Qu’est-ce qu’elle fout là ? Ça l’éclate de dormir sur un parking ? Ou alors elle est morte. Ça serait grave con. Il se penche et la secoue légèrement histoire de vérifier quand même :

 -Youhouuu June, réveilles-toi, t’es pas dans ton lit là.

 Heuu comment on vérifie si les gens sont mort déjà ? Genre comme dans les films là. Ouais sauf que rien ne lui revient sur le coup, putain de mémoire.

« Je suis contente que tu sois avec nous » lui dis-je, le visage toujours enfoui contre son cou.
« Ha pardon ! »
Je relevai soudainement mon visage de la peau de mon ami brun pour voir June allonger sur le sol. Tapotant l'épaule de Reflet pour qu'il me fasse descendre, je me rendis vers-elle tandis que Reflet se précipita également vers-elle, posant deux doigts sur son poignet. Le pouls, je pense. 

Elle traîne des pieds derrière Matt en espérant qu'il sait où il va. En fait elle est fatiguée. Février est inépuisable, c'est comme une pile électrique suivant une loi sans mémoire - quelle ironie, enfin ! Jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de réactifs. Jusqu'à ce qu'elle soit crevée. Et d'un coup, d'un seul, toute l'énergie qu'elle a dépensée dans la journée se transforme en un poids impossible à supporter.

Elle est morte, c'est une grosse loque, maintenant. Ses yeux se ferment à moitié, et elle ne parle plus. Oui oui, elle se tait, pour une fois. Elle écoute la remarque de Matt sans l'entendre. Habituellement c'est l'inverse, mais même si elle comprend les mots, elle ne capte pas le sens. Trop morte. Elle ne sait même pas où il emmène le groupe, mais elle suit, bêtement et sagement.

Et puis Matt s'arrête, alors comme elle ne l'a pas vraiment vu, elle se cogne dans son dos. En fait il est en train de secouer une fille, qu'il appelle June. Donc c'est elle, hein ?

« Heiiiiin ? Ah, c'est elle June ? Salut. »

Elle agite mollement la main en signe de "bonjour", au cas où, mais sa voix traînante laisse transparaître son manque de vivacité du moment. Elle baille à s'en décrocher la mâchoire, une main à moitié devant la bouche, avant d'ajouter :

« Moi aussi je ferai bien la sieste, là... Y'a pas un endroit où on pourrait se reposer ? »

À moins de provoquer son esprit de contradiction, voire de compétition, vous pouvez rêver pour la déloquiser, les cocos.