Rejoindre la gare ne fut pas très long, bien qu’ils devaient adapter leur vitesse de marche à celle de Damian. Ce furent les recherches qui durèrent plusieurs heures.

Ils avaient fouillé la gare de fond en comble à la recherche de la jeune fille et du petit garçon qu’Amanda avait rencontrés en arrivant. Ils n’avaient rien trouvé, pas même le plus petit indice. Il n’y avait pas trace de loups non plus. Sans rien dire à personne, Giuseppe avait cherché des yeux des traces de sang frais, au cas où. Mais pas de sang non plus. Au moins, rien n’indiquait que les loups — ou quoi que ce fut — avaient attaqué les enfants. Malheureusement, ils n’avaient aucun élément pour savoir où poursuivre leurs recherches non plus.

Et évidemment, cela agaçait profondément Giuseppe. Damian, Finn et lui se retrouvèrent bredouilles au milieu de la gare.

« Ils ne sont plus là. »

Giuseppe énonçait l’évidence avec amertume tout en réfléchissant à quelle était la direction logique pour des enfants ou adolescents à prendre quand on se retrouvait seul et sans aucun souvenir dans une gare déserte. Il n’en avait pas la moindre idée. Frustré, il avait bien envie de refaire le tour de la gare pour vérifier qu’il n’avait rien loupé et au cas où une idée brillante lui viendrait en marchant, mais il se doutait que c’était parfaitement inutile. Il avait déjà insisté plus que de raison, peut-être au point d’exaspérer ses compagnons.

En soupirant, il se tourna vers Amanda, toujours mal à l’aise quant à la façon de s’adresser à elle. Il devinait qu’il n’avait jamais été très doué avec les plus jeunes.

« Si tu n’avais pas été en direction des maisons ou si tu ne nous avais pas trouvés, où serais-tu allée ? »

Ca avait fait tout drôle à Dragibus - ou plutôt Amanda, bizarrement, la jeune fille avait du mal à se faire à son vrai nom - de revenir à la gare. Elle avait été déconcertée par la facilité avec laquelle le petit groupe avait rallié le vieux bâtiment, alors qu'elle même s'était perdue pendant ce qui lui avait semblé être des heures pour faire le chemin en sens inverse.

Elle avait elle aussi peu d'espoir de retrouver ses deux camarades. Mais accompagnée de trois adultes, elle avait non seulement plus de chances d'y arriver, mais aussi moins peur.

"Si tu n’avais pas été en direction des maisons ou si tu ne nous avais pas trouvés, où serais-tu allée ?" lui demanda soudain l'homme sombre (dont elle ne connaissait toujours pas le nom).

"Je crois que... J'aurais cherché un commissariat de police, une mairie, quelque chose d'officiel. Un endroit où je pourrais trouver un adulte qui sache ce qu'il fait, pour qu'il me dise où je suis et ce que je dois faire..."

C'était peut-être un peu naïf, mais elle n'avait pas plus de ressources pour s'occuper d'elle-même. Ça ne lui plaisait pas, mais elle allait devoir s'en remettre à la protection d'autres personnes pour encore un moment...

A ce moment là, son ventre émit un gargouillis sonore. Elle se tortilla, un peu gênée, et tenta d'ignorer le bruit embarrassant.

[Vu que Finn est pas trop dispo, finalement, je saute son tour :( ]

Il a cherché. Au début, au moins. Puis il a eut l'élancement dans son dos, à boitiller, s'est assit et a regardé sans aucune conviction autour de lui. À qui le regardera, un regard mauvais. Gratuit, il en a d'autre, prends en. Puis pour faire plaisir – à Finn, sans doute- il recherchait encore un peu. Appelant d'une voix molle. Parce qu'il n'y croit pas à ces recherches. Pas du tout.

Au rassemblement, il vient sans se presser, écoute l'un, écoute l'autre. Approuve la petite.

« Bon point, c'est sensé. »

Et il sait alors où veut en venir le brun, le regarde dans les yeux.

« Alors, on se jette à corps perdu dans la recherche d'un bâtiment officiel ? Chouette plan, et c'est où ? Car, avant qu'on se rencontre, c'est ce qu'on cherchait et ce qu'on n'a pas trouvé. »

Il se passe une main dans les cheveux, écartant les mèches de son regard acier, qui se fait dur. Il en a marre de courir dans tout les sens. Surtout avec ce sentiment de vainc.

« Et après ? Le temps qu'on trouve, les gamins auront bougé. Qu'on trouve l'hosto, ils seront sans doute ailleurs. Leurs meilleurs chances, c'est qu'ils aient, comme elle (fait-il en désignant Dragibus), trouvé des adultes qui prennent soin d'eux. À quoi ça va leur servir qu'on galope la dedans ? »

D'un geste de main amples, il montre la ville, qui leur fait face. Il fait un petit signe non de la tête, soupirant lentement.

« Je dis pas qu'on doivent les abandonner... » Encore que, il se rend compte, il s'en fiche un peu du devenir de deux gamins inconnus. Mais s'il l'avoue, il sent le pain italien lui venir dans la gueule en moins de deux. Ça va, une jambe en moins, une mémoire en moins, il trouve qu'il a assez trinqué ces dernières heures pour s'éviter ça. « Non, on n'abandonne pas. Mais je crois qu'avant de vouloir les aider, faudrait qu'on s'aide nous même. Qu'on cherche à savoir où on est et ce qu'on fout là. On peut demander, farfouiller au passage, ça ne mangera pas de pain. Mais juste chercher deux gamins dans une ville comme ça, c'est comme chercher deux aiguilles dans une botte de foin : une perte inutile d'énergie. » Ou, en un mot, comme en cent « Faut que nous même, on se recentre un peu. Notre gamine à nous aussi, faut pas la laisser tomber pour chercher deux gosses introuvables » finit-il en montrant Dragibus de la tête.

Est-ce qu'il s'en soucis vraiment ? Peut-être, peut-être pas, qu'importe. Mais si monsieur sang-chaud pouvait y croire, ça l'arrangerait bien. Car ça l'agace cette course qui mène à rien. Ça l'irrite même. Ça... non. Non c'est pas ça qui l'agace. Il réalise alors. Ses yeux s'écarquillent soudain, il redevient presque pâle.

« Où est Finn ? » Il le cherche du regard. « Où est cet idiot de Finn ? »

ça, c'était pas à perdre.