Quête terminée

16h-18h
J'étais là

Lentement mais surement, Vodka s'était enfoncé dans les égouts, espérant ne pas s'être trompé de chemin. Son instinct se révéla juste cependant et un sourire s'étira sur ses lèvres. Maintenant, il se dépêchait de retourner dans cette étrange pièce avec toutes les petits bouteilles aux liquides colorés. Rien n'avait bougé depuis la dernière fois, personne n'avait du donc se rendre en ses lieux. En même temps, qui s'amusait à venir patauger dans les égouts ? Sans plus attendre, le yéti se stoppa devant la table et sortit la fameuse fiole bleue de sa poche.

"Et voila m'sieur le mur, comme promis."

Doucement - ça serait con de la casser maintenant - il la déposa sur la table devant lui, la rendant à son propriétaire.

La nuit commence à doucement tomber alors que Vodka entre dans le Repaire des Statues. Et la nuit amène les esprits. Au bruit de la fiole sur la table, un écho répond, et doucement le mur devant lui ondoie pour ouvrir un passage. Parmi l’obscurité une douce lumière bleue se fraie alors un passage. Et Vodka peut alors voir apparaître devant lui une statue. Un chat se mouvant parfaitement sous son pelage de pierre recouvert de runes. D’un bon souple malgré son armature, le félin se retrouve sur la table. Ses deux saphirs se posent alors sur Vodka, qui devient soudain moins velu et ne garde qu’un fin duvet blanc. Puis sans dire un mot, le chat fait tomber la fiole à terre. Moment de suspend avant que le verre ne se brise en milles éclats sur le sol humide. Un autre bond et le chat commence à laper le précieux liquide. Le liquide coule dans sa gorge, opère alors. Les runes qui parcourent son corps disparaissent, la pierre devient pelage, le pelage devient peau. Et sous les yeux de Vodka, ce n’est plus un chat mais bien un homme qui se redresse. De taille moyenne, des cheveux auburn en bataille. Un bipède qui a tout ce qu’il y a de plus humain, sauf peut-être ses prunelles. Presque aussi aiguisées que celles d’un chat, il les braque soudain sur Vodka. Ce n’est pas un regard reconnaissant qui se lit dans ses yeux bleus, c’est un bonheur égoïste. D’un mouvement félin, il effleure le blond, lui dérobe son arme et la pointe sur son ancien propriétaire. D’une voix moqueuse il lâche :

- Merci quand même. Mais maintenant, c’est toi qui es condamné.

Son rire retentit entre les pierres. Ceux qui survivent à Nulle Part ne sont pas les plus serviables, ce sont les tricheurs et les voleurs. Dans le chaos, tout est inversé. Et sans un bruit l’ancien chat disparaît dans l’obscurité des égouts. Car il les connaît mieux que personne.

Vodka observait le tout avec intérêt, ne remarquant pas forcément son pelage diminuer -si ce n'était à cause de la très légère brise qui semblait plus fraiche soudainement. L'animal si étrange prit forme humaine et le yéti, trop fasciné, ne réagit que tardivement lorsque son arme fut saisie. Tant pis, il en trouverait d'autres pensa-t-il. Son humeur n'était pas dans le conflit pour l'instant. Ses yeux verts quant à eux ne quittaient pas une seconde cet être si captivant. Il le trouvait beau avec cette grâce féline et ce regard particulier. Pourtant, il ne tenta pas de le retenir et se retrouva rapidement seul dans la pièce.

"Bon... c'était à prévoir que j'aurais rien."

Observant autour de lui, il finit par récupérer deux fioles posées sur la table. Ca serait sa récompense pour avoir agi de manière si louable. Il notait d'ailleurs dans son esprit de ne plus recommencer.

"Salut l'mur !"

Et il tourna des talons, glissant les petites bouteilles dans une poche chacune.

En une fraction de seconde, il était passé du confort d'un lit douillet et du corps chaud de l'enfant pressé contre le sien à une couche autrement plus dure et humide. Le paysage s'était frelaté devant lui, le laissant quelques instants hagard alors que sa vue redevenait claire et que se dessinaient devant lui des contours qui n'étaient assurément pas ceux d'une chambre aux couleurs de l'arc-en-ciel. C'était comme lorsqu'il avait été déplacé du musée à l'amphithéâtre, sauf qu'il était resté conscient. L'homme à moitié doré balada son regard presque figé autour de lui, se redressant avec maladresse en se tenant au mur. Plus d'enfant blond – à moins que celui-ci n'ait connu une incroyable poussée de croissance, devant lui se tenait un jeune homme tout aussi blond que le gosse mais qui ne lui ressemblait assurément pas. Le gosse n'avait jamais eu un quelconque signe d'une aussi incroyable pilosité - même dans l'obscurité ambiante, le brun pouvait voir le fin duvet clair qui recouvrait les parties visibles de son corps. Drôle de type. Qui était-il ? Le brun le contemplait d'un air méfiant, conscient qu'il devait avoir un tout aussi drôle d'air avec sa peau désormais d'or et figée.
Qui es-tu? demandait le regard, mais rien ne sortit d'entre les lèvres figées du brun.
Foutue couronne.

Le blondinet poilu n'eut pas le temps de sortir qu'une nouvelle apparition se fit. Arquant un sourcil, il dévisagea le nouvel arrivant autant que ce dernier le faisait. Après la statue vivant, il n'était pas vraiment sur d'être surpris par ce corps en parti doré. Naturellement, il s'approcha de lui et toucha du doigt cet ornement, curieux de savoir s'il s'agissait de vrai ou non.

"Salut... t'es aussi une statue ou juste un mec qui a mangé un truc bizarre comme moi ?"

En l'observant plus intensément, il réalisa que ses lèvres étaient... figées ? Étrange tout ça. Fouillant sa poche, Vodka lui tendit une potion - sa bonté le tuerait - et offrit un sourire amusé à l'étranger.

"Essaye de boire ça, ça t'aidera peut-être."

Le brun dévisagea un long moment l'inconnu. Il n'avait pas l'air spécialement étonné de le voir se dresser devant lui avec son corps à moitié doré - pire, il s'approcha même et l'effleura du bout du doigt, comme pour s'assurer que ce qu'il voyait était bel et bien réel, lui posant nonchalamment une question à laquelle le brun ne pouvait assurément pas répondre. Il sembla s'en rendre compte, lui tendant une fiole en lui proposant d'en boire. Comme si tout était tout à fait normal, comme si le remède magique à son mal était contenu à l'intérieur de la fiole. Faire confiance, ne pas faire confiance ? De toute manière, il n'avait rien à perdre. Tendant difficilement les doigts, il les referma sur le col de la fiole, l'inclinant sur ses lèvres figées pour ingérer le liquide.
Et advienne que pourra - ça ne pourrait pas être pire que maintenant. Même s'il écoutait sans discuter les propositions d'un total inconnu.

Les effets se font sentir rapidement, une grosse chaleur envahit le corps entier de Vinci tandis que l'or qui le recouvrait fond petit à petit, à grosses gouttes jusqu'à ce qu'il n'en reste plus et qu'il retrouve enfin l’intégralité de son apparence d'origine.

Il n'a pas le temps de se retourner pour dire quoi que ce soit, il a à peine le temps de comprendre sa nouvelle normalité qu'il est déjà happé ailleurs. Un donné pour un rendu, la Ville commence doucement à s'agiter et à se réveiller.

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