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8h-10h

Dans les conditions actuelles, il valait mieux qu’aucun des deux hommes ne se retrouvent seuls. Content de constater que sa nouvelle rencontre le suivait, le blondinet descendit du train et posa pieds sur le quai vide, poussiéreux, jonché de plantes en tout genre, comme si le coin avait été abandonné depuis des siècles. Du moins, suffisamment longtemps pour que la nature reprennent ses droits dessus. Ils avaient l’air aussi perdu l’un que l’autre, à la recherche d’indices visuels flagrant qui pouvait leur indiquer à première vu le lieu, la ville, ou la gare où ils pouvaient bien se trouver. Peut-être même l’heure qu’il était ? Pourtant, tout était suffisamment sale pour ne rien laisser transparaitre. Cet endroit n’avait rien de rassurant, il avait même tendance à être oppressant par le silence de mort qui y régner pour un tel endroit, même la nature y était silencieuse. Une crainte souleva le cœur de l’homme, et si toute la ville était dans le même état ? La gare était plutôt grande, ce qui annonçait une grande ville. Et une grande ville n’abandonne pas une gare comme ça, sauf si elle-même était laissée à l’abandon.

Il ne fallait pas se laisser aller à la peur. Il fallait que l’un comme l’autre ils en apprennent un maximum sur cet endroit, et l’un sur l’autre. Et était-ce l’instinct de survie ? Mais il sentait qu’il valait mieux éviter de se séparer. Ce gars était certes petit, mais il avait l’air assez malin, et ça pouvait être un avantage énorme. Ils marchèrent l’un à côté de l’autre pour explorer l’endroit lorsqu’il se décida à parler.
« Artifices ou pas, cet endroit ne me dit rien qu’y vaille. Je me suis réveillé tout à l’heure dans un compartiment à côté du tiens. Et je ne sais pas, je sais pas comment, ni pourquoi, ni ce qui s’est passé pour que j’arrive là. J’ai entendu du bruit alors je suis sorti du compartiment pour aller voir, quand y a eu cette boule lumineuse. »
Il tressaillit à l’idée de se rappeler la scène. Tout s’était passé si rapidement, et elle n’avait rien d’agréable. Toutes ses émotions d’un coup l’avaient largement chamboulé une première fois sans qu’il ait envie de les revivre. Pourtant, elle lui avait apporté des éléments précieux sur lui, sur sa vie. Il avait une sœur, là, quelque part.
« Écoute, je suis la premier à ne pas croire à ces bêtises de magie. Mais quand je l’ai touché. Y a ce moment de ma vie, avec ma sœur blessée. Je ne peux pas dire à cent pour cent que c’était un souvenir. Mais je suis sûr de l’avoir vécu, et c’était moi dedans. Et ça, je ne sais pas comment l’expliquer. »
Il ne voulait pas lui expliquer les détails de la scène, c’était bien trop personnel, bien trop affligent. Toute cette rage, cette peur, ses yeux le disait, mais lui voulait se taire. Il passa la main dans ses cheveux désespéré. Il était sur d’une chose. C’est qu’elle était à l’hôpital. Pourquoi ? Comment savoir si elle y sera ? Ça aucune idée. Mais à moins qu’il ait une meilleure idée, il ne savait pas quoi faire d’autre. C’était pour le moment, son seul but.
« Avant de toucher cette boule, je me souviens que d’une fille à l’hôpital. Et je suis persuadé que c’est elle ! Alors il faut aller voir. C’est tout ce que je sais à vrai dire. Je ne sais même plus comment je m'appelle ! Mais si toi tu sais quelque chose, c’est le moment de me le dire. Parce que si c’est une belle blague, elle n’est vraiment plus drôle ! »

Il mit la main dans sa poche pour en sortir son portable. L’air désespéré. Un portable inutile. Il pouvait le jeter mais ce nombre l’intrigué. Il avait tant de question et l’esprit très embrouillé pour le moment par tout ça. Il regarda tour à tour ce qu’il avait dans sa poche cherchant des réponses dans le peu qu’il avait. Il montra finalement l’écran de son portable lorsqu’il revint dessus. Tentant à nouveau de l’allumer. Mais seul ce « soixante-douze » s’affichait.
« Et ça, c’est quoi se nombre qui décroit !? »

Celui-là n’avait pas l’air des plus loquaces. Quel surnom étrange, Caruso. Mais pourquoi pas. Le grand blond se dirigea à l’opposé du quai de gare, vers l’intérieur, sans donner de réponse. Il entreprit l’exploration du lieu d’un pas plus rapide, à la recherche d’indices quelconques de la gare dans laquelle ils se trouvaient. Mais plus il avançait, plus il se sentait mal à l’aise. Certes l’endroit était vide, jonchait de plantes en tout genre, mais autre chose ne tournait pas rond dans cet endroit. Sans doute, et il l’espérait, ce n’était qu’un simple et très mauvais sixième sens. Mais on n’était jamais trop prudent. Il rangea son portable dans la poche, et sortie la dague de l’autre, prêt à l’utiliser. Il fallait trouver une carte, une pancarte, il y avait souvent des cartes pas loin de l’entrée principale d’une gare.

L’œil vif, l’air concentré, il réalisa enfin en regardant l’état des lieux, ses choix absurdes. Je ne suis pas en état de réfléchir. Le constat était dérisoire comparait à ses actes. Réfléchis et reprend-toi. Non, tu es trop troublé par ce souvenir. Mais il ne pouvait rester comme ça. Il s’accrocha par mégarde à une ronce qui lui déchira une petite partie de la manche de son tee-shirt, ce qui eut pour effet de le sortir de sa réflexion. Il observa l’étendue des dégâts avant de remarquer son tatouage de dragon sur l’épaule, très ressemblant à celui de sa lame. Il se tourna vers Caruso décidé à parler.

« Tu n’auras qu’à m’appeler Dragon. »

Il rangea sa lame, une fois de plus. Moins avertis, plus détendu. Il jeta un œil aux alentours sur ces vieux panneaux indiquant des chiffres à peine lisible. Sans doute des numéros de quais. Puis sur un autre lui complètement illisible. Toute la gare devait être dans le même état, voir au-delà de la gare. Peut-être que d’autres personnes se trouvaient ici aussi, tout comme eux.

« J’ai l’impression que des réponses, on en aura pas ici. Si tout le coin est comme ça, on n’aura pas de réponses avant un moment même. Tu penses qu’on devrait partir d’ici ? »

En équipe, il devait agir en équipe. Pour l’intérêt de l’un et de l’autre. D’abord survivre avec la base, eau potable, nourriture. Ensuite, visiter les environs. Trouver une forme de vie ou une autre. De vie j’ai bien dit. Un restaurant peut-être ? Il devait sans doute y avoir de quoi manger dans une gare, si la nourriture n’était pas rassit. Chose grandement probable. Il fallait rester prudent, s’ils n’étaient pas les seuls, comment les autres survivaient ? Il fallait un maximum de renseignement.

Spoiler:

Cela fait longtemps qu'elles ne se sont pas amusées à martyriser des gens. Ca doit bien faire quelques minutes déjà. Voir une bonne heure. Doucement elles s'avancent vers les deux hommes qui ne font rien que discuter. Doucement elles serpentent contre le sol jusqu'à atteindre les chevilles de chacun. Elles s'entourent et serrent fort ces morceaux de chair. Et là, pas de pitié, elles les tirent jusqu'à une bouche d’égout. Elles en laissent tomber un puis l'autre. Les voilà tous les deux pataugeant dans l'eau nauséabonde des égouts. Elles auraient souri si elles avaient eu un visage. La grille se referme doucement laissant les deux personnes dans l'obscurité des tuyaux.

Spoiler: