▬ Tes lacets sont des fées, et tu marches dessus.

22h-00h

Ils connaissent pas le système C de castorama, ici ou quoi ?

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Tu avais suivi le perroquet. Ce truc répugnant qui t'avait conduit jusqu'à la mairie. Et la Mairie. Que pourrait-on dire sur celle-ci ? A part qu'elle était d'un laid. Bwah. Rien que d'y penser, ça te foutait la chair de poule. Ces tâches rouges. Du sang ? Et puis un drapeau blanc. Comme si cette ville fantomatique avait connu une sorte de guerre. Et qu'elle s'était rendue en hissant un drapeau blanc, symbole de paix.

Tu entras dans le bâtiment, anxieuse. De un, ça sentait le renfermé. Comme si des vieux avaient habité là jusqu'à leur trépas, sans avoir acheté du Airwick. Au moins, toi, tu sentais bon la rose. Ok, tu étais trempée et tu agitas ta crinière, histoire les faire sécher plus vite. Personne ne possédait de sèche-cheveux dans ce trou paumé ? Tu vérifias que tu étais toujours parfaite d'un regard dans ton miroir de poche. Le trait de crayon noir que tu t'étais passé sous les yeux avait un peu coulé. Ça te donnait un style « raton-laveur ». Quel swag.

Tu hésitas un peu avant de poser le pied sur ce parquet. Mon dieu. Ça se trouve, il y avait des rats partout, et puis, des chauves-souris, et d'autres trucs. Qui étaient passés par là. Sans avoir été désinfectés au préalable. Un frisson de dégoût te parcourra de la tête jusqu'aux orteils. Tu serrais fort contre toi ta trousse de maquillage, ta dernière bouée. Elle sentait la cannelle. Tes bottines claquaient contre le vieux parquet grinçant.

Tu poussas la porte et atterris dans un bureau. Bon, comme l'ensemble, c'était moche, poussiéreux, mal rangé. Et tu commençais à penser très sérieusement que ça devait être une sorte de mode, le style grungy. Mais bon dieu, on était pas chez les gothiques. En plus, tu n'avais encore croisé personne. Et tu finirais par faire une crise d'agoraphobie. Et là, ce serait absolument terrible. Tu te mettrais à convulser jusqu'à ce que quelqu'un daigne te mettre du parfum, du Chanel n°5, histoire de te calmer.

Bon, celui qui vivait là, avait un certain sens du goût. Assez vintage, mais bon, tu ferais avec. Divers plats en argent avaient été posés sur la cheminée, et le lustre accroché au mur, était tout simplement grandiose. Si on faisait abstraction des toiles d'araignées. Mais bon, tu étais plus à ça près, maintenant que ta coiffure était fichue. Un courant d'air fit voler ta crinière dorée. Et tu remarquas que les rideaux voletaient dans une danse lugubre. Une fenêtre avait été brisée, et des feuilles pourries tapissaient le sol. Vraiment, ils ne connaissaient pas le mot « ménage » et « propreté » dans ce trou à rat.

Tu t'approchas du grand bureau en bois massif. Et ton coeur fit un tour.
Il s'était passé des trucs dans cette pièce. Ce n'était pas possible autrement.

▬ Agatha Christie aurait du venir ici. Tu mis tes poings contre tes hanches. Elle aurait appelé ça « mystère chez les bouseux ».

Il était tard. Bordel, avec sa sieste dans le train, il n'aurait pas du se sentir aussi crevé. Sauf que les récentes péripéties ne pardonnaient pas, à Nulle-Part. Il n'y avait pas de lumière dans le couloir. Soupir. Il s'était enfin éloigné de tout ce monde. C'est qu'ils étaient bruyants. Et confus. Et enquiquinants, avec leurs questions à la con. Il n'avait pas que ça à faire, de leur raconter tout ce qu'il savait. Et ils n'étaient pas flics, pour lui poser autant de questions, à ce qu'il sache. Une minute... Si ça se trouve, ils étaient flics. La perspective d'avoir affaire à une armée de petites Calvetti ne lui plut pas des masses, bizarrement.

Non mais là, ça n'allait pas du tout, il devait vraiment être fatigué. Il poussa une porte au hasard, soulagé de ne pas avoir à interagir avec plus de monde. Parce que oui, maintenant qu'il était tout seul, il pouvait se reposer, entrer dans le bureau, croiser une Pouf Mouillée, l'entendre parler de bouseux et d'Agatha Christie. Mais oui, c'était normal, tout allait bien. C'était qui, d'ailleurs, "Agatha Christie" ? Il eut un moment de vide cérébral des plus inquiétant. Bah non, il ne savait pas, fallait pas chercher plus loin. Et puis, après tout, ça ne résolvait pas le problème. Il y avait une Pouf Mouillée dans le bureau. Et non, ce n'était pas juste une hallucination bizarroïde due à la fatigue ou à toute autre propriété paranormale de cette Ville.

Il y avait. Une. Pouf. Mouillée. Dans le bureau. Après toutes les énormités qu'il avait vu aujourd'hui. Il fallait qu'il tombe sur une Pouf Mouillée. Génial. Mais bon, il ne devait pas avoir l'air plus fin qu'elle, avec ses cheveux trempés et ses vêtements encore humides. Et le sac beige qui pendait lamentablement de son épaule parce qu'il n'avait pas daigné le régler. Et son air sceptique devant la blondinette qui se tenait devant lui.

Qu'est-ce qu'elle foutait là, celle-là ? Et pourquoi la pièce était en bazar comme ça ? Un jour à Nulle-Part, et Novembre était perdu. Et trop fatigué pour retrouver son chemin.

HJ:

Elle était vraiment perdue. Genre, paumée, disparue, égarée, fichue, hallucinée... Non, parce que quand même, c'était hallucinant tous ces gens qui discutaient tranquillement, sans avoir la moindre idée de leur prénom et de leur passé. C'était dingue, voilà. Muette et immobile, elle serait sans doute restée plantée au milieu de la pièce pendant des heures si West ne l'avait pas poussée en avant. Elle avait obtempéré. Que faire d'autre ? Puis, si quelqu'un voulait s'occuper d'elle, tant mieux. Elle n'avait jamais réussi à s'occuper d'elle toute seule, alors... Visiblement, le gars que West lui avait dit de suivre semblait s'y connaître. Ou, en tout cas, il dégageait une aura de mec sûr de lui, me cherche pas d'emmerdes ou j'te refais le portrait ! Quoiqu'il n'avait pas l'air méchant, non plus, juste... Fatigué.

D'ailleurs, Poppy aussi était fatiguée. Pourtant, elle n'avait pas envie de dormir. Elle avait envie de fouiller la ville, de partir, de trouver des réponses à son amnésie. Puis, elle avait peur. West ne la suivait pas, il restait un peu à la traîne, devant une boule lumineuse. Étrange. Il finirait bien par la rejoindre.

Dans la pièce - un bureau, visiblement abandonné depuis un certain temps - une fille parlait toute seule. D'Agatha Christie. Normal. Elle était trempée, et blonde. Vraiment jolie. Le gars qui la précédait resta muet. Soufflé de voir une si jolie fille ou las de rencontres improbables ? Plutôt la deuxième solution, vu sa tête. La fille ne semblait pas plus à sa place qu'eux tous. Poppy eut un sourire désabusé quand elle souffla :

▬ Laisse-moi deviner, t'es perdue aussi ? ... Trop facile, ces devinettes.

Elle se laissa tomber dans un coin et coinça ses genoux sous son menton. Position de repli !

Il cligna des yeux surpris. La pièce semblait lumineuse et agitée par rapport à...sa vision ? Son souvenir ? Comment était-il censé appeler ça déjà ? Il s'était revu petit garçon en train de jouer au héros avec un pistolet dans un appartement New Yorkais. Et tout était normal. Bien sûr. A priori, les autres n'avaient pas vu la même chose que lui. Mademoiselle la Brune ouvrait une armoire et Poppy commençait à avancer. Il rattrapa la rousse en se tenant toujours la tête d'une main. Il se sentait un peu nauséeux tout à coup.

La crinière rousse de la Poupée s'engouffra dans une pièce et il la suivit sans se poser de questions. Pas plus qu'il ne réfléchit en voyant soudain le brun ténébreux de tout à l'heure observer une jolie demoiselle. Une blonde. Il se demanda s'il les dérangeait - peut être s'étaient-ils donné rendez vous dans une pièce à part pour...Puis il se dit qu'il s'en fichait après tout. Il était amnésique. Dans une ville perdue. Et des trucs jaunes lumineux lui avait refilé un mal de crâne épouvantable.

Oh et puis Poppy venait de se terrer dans un coin en position foetale et semblait faire une petite crise de panique. Il inspira. " Okay. Je sais pas ce qui se passe mais j'en ai marre. " gronda-t-il d'une voix que la fatigue et le manque de paracétamol rendait passablement morose.

Il pointa du doigt le brun. " Toi. T'as l'air d'avoir des réponses. C'est quoi cette ville ? Et comment on sort ? "

Il s'approcha de Poppy et se laissa glisser sur le mur pour s’assoir à côté d'elle. Son mal de tête n'arrangeait pas les choses. " T'inquiètes, on va trouver une solution." souffla-t-il à la rouquine en mode repli.

Invasion de pecnots dans le bureau.

❝
Bon, tout s'était passé super vite. L'instant d'avant, t'étais en train de regarder à quoi ressemblait ce bureau miteux, et l'instant d'après, tu voyais un brun débouler dans la pièce. Sans un bonjour, sans un « Oh, mais tu es parfaite ! Tu veux que je t'invite boire un café ? ». Non, vraiment, les gens ici manquaient cruellement de savoir-vivre. Tu haussas le menton et le dévisageas du Rictus de Haine Profonde.

Puis, il y eut une rousse. Bon, elle était carrément canon, faut bien l'avouer. Et tu aurais bien fait d'elle ta meilleure copine avec qui tu aurais conquis le monde contre la saleté et le mauvais goût vestimentaire. Malheureusement, elle non plus, ne semblait pas prête à faire preuve d'un quelconque tact. Ouai, tu étais perdue, et alors ? C'était leur cas à tous, ici. La rousse disparut de ton champs de vision pour se replier sur elle-même. Ok, monde de barges.

Un dernier garçon apparut. Enfin, tu te demandais s'il n'y avait pas encore une tribut qui allait entrer dans ce bureau. Il gronda. Tu reportas ton regard sur le brun, le premier qui était rentré. Tu reculas et t'assis sur le bureau, et croisas les jambes. Apparemment, le dernier garçon trainait avec la rousse. Et le brun était en solo.

▬ Mais vous sortez d'où comme ça ? Tu croisas les bras, avec un air indigné. Vous ne connaissez pas les usages qui veulent qu'on dise bonsoir à quelqu'un ? Tu fixas le plafond, dégoûtée. Puis tu les regardas à nouveau. Je me présente, je suis Bambi. Tu eus un petit sourire de triomphe. Et tu reportas ton attention sur le brun. Toi, le Ténébreux, parle.

Puis, tu passas ta main dans tes cheveux qui commençaient à peine à sécher. Tu allais boucler, ce serait vraiment horrible. Tu attrapas d'un geste sûr ton miroir de poche, et tu en profitas pour te repasser une couche de rouge à lèvres. Au moins, si tu mourrais dans ce trou paumé et poussiéreux, tu serais belle. Décoiffée, dégoulinante, mais belle. Et c'est ça le principal, non ?

Elle est fatiguée. Il ne l'amuse même plus. Elle les observe à peine. Ils gesticulent, s'agitent, font du bruit avec leurs bouches, de l'air avec leurs bras. Ils sont agaçants. Tous. Doucement, Elle semble se plonger dans une petite torpeur. Et les souvenirs s'échappent d'eux même pour s'arrêter devant le nez de Poppy et de Bambi. Deux petites sphères lumineuses qui flottaient au dessus du sol.

Spoiler:

Quelqu'un l'avait suivi. En se retournant, il constata que la danseuse et le cow-boy - faute de mieux, il leur fallait bien une dénomination - étaient derrière lui. La rouquine avait l'air fatiguée de ce qui se passait à Nulle-Part, le brun semblait énervé de ne rien comprendre. Mais personne ne comprenait rien, ici. Et enfin, il y avait toujours la blonde - la Pouf Mouillée. Elle avait un nom, elle s'appelait Bambi. Sans doute plus flatteur que "Pouf Mouillée", d'ailleurs. Le nom ne lui évoquait rien, pas plus qu'Agatha Christie. Novembre décida de laisser tomber - toute référence incomprise était à partir de maintenant considéré comme sans importance. Ou alors il ne s'en sortirait pas.

La première s'était recroquevillée dans un coin - du calme, bordel, du calme ! Yes ! -, le second posait trop de questions, et la dernière essayait de lui faire la morale sur la politesse tout en se remaquillant. Ils déconnaient, là ? Il n'avait pas délégué le travail d'explications à Calvetti pour devoir se le retaper dans la pièce adjacente ! Non. Il avait envie de leur hurler un non, un non cinglant, un non catégorique, un non définitif. Un non qui voulait dire "non". Non, pas d'explications. Il était trop fatigué. Il en avait juste marre. Oh et puis. Après tout. Ils voulaient savoir ? Ils voulaient savoir, ces enquiquineurs de première ? Très bien. Parfait. Ils allaient savoir.

« La ville s'appelle Nulle-Part, la politesse ça sert à rien ici, et jusqu'à preuve du contraire pour sortir il suffit de suivre la route. Et puis merde, si j'avais toutes les réponses, je serai plus là depuis longtemps, pas la peine de me prendre la tête avec ça. »

Il allait ajouter "si vous étiez normalement constitués, vous auriez un cerveau pour réfléchir", mais deux sphères jaunes s'immobilisèrent devant Bambi et la rouquine à ce moment précis. Nouvelles explications, yeah... Mais plus calmement, cette fois. Il avait eu sa dose d'insultes pour la journée, et comme tout le monde semblait à cran dans la pièce, il doutait que se montrer agressif puisse l'aider en quoi que ce fût.

« Ça, c'est des souvenirs. Quand vous les touchez, vous vous rappelez d'un bout de votre passé en rapport avec la situation que vous venez de vivre. Et ça rajoute du temps à votre compteur - il se saisit du petit sablier bleu qui pendait toujours à son cou pour leur montrer de quoi il parlait. Tout le monde en a un, mais on ne sait pas ce qu'il se passe quand il atteint zéro », précisa-t-il. « Ah, et vous pouvez m'appeler Novembre. »

S'il ne passait pas pour un fou, après ça. Mais bon, ils avaient demandé des réponses, ils les avaient, non ? Il se tourna vers l'autre brun, celui qui se la jouait autoritaire et défenseur de la danseuse :

« Pendant qu'elles découvrent leur vie, autant faire quelque chose d'utile, non ? » Lança-t-il, après un soupire, sur un ton neutre en désignant toute la paperasse éparpillée dans la pièce du regard.

Il décida de commencer par le bureau, puisque celui-ci était directement à sa portée. Divers articles de presse, des lettres, du texte, du texte, du texte et encore du texte se succédaient sur le meuble abîmé en un flot interminable d'informations incohérentes. Qu'est-ce que c'était que tous ces papiers ?

West s'installa à côté d'elle quelques instants plus tard. Doux réconfort dans une ville où elle ne connaissait personne et où tout semblait sombre, glauque, terrifiant. Elle ferma les yeux un instant, et se répéta qu'il ne pouvait rien lui arriver. On veillait sur elle. Elle était forte. Elle allait faire face. Allez, debout. Lorsqu'elle rouvrit les yeux, la jolie blonde la toisait. Elle esquissa un timide sourire qu'elle ne lui rendit pas. Manque de bonnes manières, manque de bonnes manières... Elle en avait de bonnes, elle. Comment faire preuve de bonnes manières lorsqu'on ne connaissait même pas son prénom ? Elle dit s'appeler Bambi. Mignon. Novembre, encore plus énervé que West (visiblement, ça lui déplaisait d'être pris pour le meneur... Malgré tout, ça lui allait vachement bien !), leur expliqua deux-trois trucs qu'elle s'efforça de mémoriser. Nulle Part, pas de sortie trouvée jusqu'à ce jour, compteur, souvenirs incarnés par des boules lumineuses. Ça commençait à devenir marrant. S'il y avait des règles, ça ne pouvait être qu'un jeu.

Justement, une petite boule s'était arrêtée à sa hauteur, ainsi que devant Bambi. Poppy jeta un regard à West, qui semblait n'avoir pas particulièrement bien vécu son expérience lumineuse. Voulait-elle réellement tout connaître de son passé ? Après tout, recommencer une nouvelle vie n'était-elle pas une expérience délicieuse ? Toutefois, la curiosité l'emporta - aidée par le sourire confiant de son... tout nouvel ami ? Elle lança un dernier regard vers Bambi et, juste avant de plonger dans un passé qu'elle espérait à la hauteur de ses espoirs, lui dit, amusée :

▬ Sinon, pour les bonnes manières, moi c'est Poppy.

Et les souvenirs se déployèrent à leurs mémoires...

Poppy:

Bambi:

Mademoiselle la Blonde haussa le ton. Immédiatement, sa voix lui parut trop aiguë pour être agréable et il l'observa les sourcils haussé en une moue stupéfaite. Ils étaient perdus, amnésiques, et elle...elle pensait aux bonnes manières ? Il ferma la bouche après s'être rendu compte qu'il avait l'air passablement stupide et s’ébouriffa les cheveux alors que Blondie se désigna comme étant Bambi. Bambi... Le mot flotta un moment dans son esprit. Ca lui disait quelque chose. Quelque chose de vague et confus mais quelque chose tout de même.

Le Ténébreux Novembre - oui, l'adjectif de Blondie lui allait bien au final - prit la parole pour énoncer ce qu'il savait d'une voix agacée. Il le trouva désagréable et le lui aurait volontiers fait remarquer s'il n'était pas au courant que cela ne risquait pas d'améliorer les choses. Nulle Part. Des souvenirs. Un compteur. Il tira son portable de sa poche et constata avec gêne que les chiffres avaient changés ce qui confirmait les dire de Novembre. D'accord.

Deux petites boules de lumières entrèrent dans la pièce pour se figer devant Poppy et Bambi. West se releva, peu désireux d'entrer en contact avec la source de son mal crâne. Il épousseta son slim et s’avança près de Novembre qui avait déjà commencer à mettre une belle pagaille sur le bureau. Il jeta un regard sceptique aux rideaux.

" Y a du se passer un truc bien glauque ici..." murmura-t-il comme pour lui même en contemplant les rideaux déchirés. Il mit à son tour la main sur le bureau et commença à fouiller les informations. Du texte. Toujours du texte. Il n'aimait pas lire, il en était certain. " Putain, regarde tout ça..." dit-il à nouveau, le nez collé à une coupure de journal. Il n'aimait pas le silence non plus. Et entendre le son de sa voix avait quelque chose de rassurant.

Dans sa somnolence, Elle ne vit par leurs mains s'attarder sur le bureau. Sinon, Elle aurait sans doute essayé de les empêcher. L'imbécile avait déjà la Boîte...

Sur le bureau, au milieu des papiers épars se trouvent entre autre :

un épais registre marron au papier parcheminé sur lequel la première page indique:

Les pages se succédaient identiques à elles mêmes avec des mots barrés suivis de petites lettres, de points d'interrogations ou du chiffre zéro.

Deux coupures de journal:

Deux notes sur deux post-it différents:

Une lettre:

Le reste des papiers était éparpillé sur le sol, sous le bureau etc...

Spoiler:

La Renarde, le Ténébreux, l'Emo et Blondie sont en vadrouille.

❝
Tu regardas le truc voler vers toi. Une luciole ? Tu agitas la main pour la chasser de ton resplendissant visage. Mais à son contact, tes souvenirs cognèrent dans ta tête. Tu avais cessé de respirer, et tu pivotas la tête vers la dénommée Poppy. La rousse, c'était elle, n'est ce pas ? Cette impression que c'était ta meilleure amie, c'est parce qu'elle l'était, tout bonnement. D'un côté, ça te rassura. Voilà, tu étais dans une ville fantôme, nommé Nulle Part. Le nom laissait à désirer, et tu l'aurais plutôt appelé Bambiland, pour le côté parfait. Mais au moins, tu avais avec toi, quelqu'un que tu connaissais avant. Mais est-ce que Poppy était toujours enceinte ?

Tu secouas la tête pour oublier tout cela. Et tu sautas du bureau sur lequel tu étais assise. Les garçons étaient déjà en pleine recherche. On aurait dit ces braves bergers allemands, qui sont connus pour trouver les paquets de drogue, dans les camions. Hé bien, eux, c'était pareil. En un rien de temps, ils avaient déjà mis la main sur une demi-tonne de trucs. Des papiers, ils étaient déjà en train d'éplucher tout cela. Tu te penchas vers le registre.

▬ C'est quoi tous ces trucs barrés ? Des noms ? Tu éclatas de rire. Ça craint de s'appeler "Cocaïne", quand même. Tu pouffas en faisant des guillemets avec tes doigts. Franchement, c'est quoi toutes ces énigmes ? Tu commençais à ronchonner. Tu ne comprenais rien. Que signifiait les lettres à côté des noms barrés ? F ? Pour Fou ? Ça se trouve, ils sont morts. Tu te retournas vers Novembre. Hé, le Ténébreux. T'as bien parlé de compteur, tout à l'heure, non ? Tu postas ton ongle manucuré sous les zéros. Peut-être que ces gens sont morts parce que leur compteur était à zéro ?

Tu pris la pose de la fille trop intelligente, en dévisageant le Ténébreux. Hé ouai, toi aussi, t'en avais dans le crâne, d'abord. Tu croisas les bras, et soupiras. En fait, c'était trop simple, ce jeu. Bitch pliz.

Ok, la rousse s'appelait Poppy. Pas vantarde, déjà. S'il avait laissé ses prunelle s'attarder sur son visage, peut-être se serait-il rendu compte qu'elle était plutôt jolie, tout compte fait. Sauf qu'en l'occurrence, ses prunelles, elles étaient occupées à parcourir divers articles de journaux un peu au hasard. Il tomba sur une coupure de presse traitant de la fermeture du zoo de la Ville... Des loups. Les loups. Ceux qui rôdaient autour de la gare à l'instant présent. Ils ont "doublé de volume". De quels évènements ils parlent ? La remarque de l'autre brun le tira de ses pensées.

En fait, il n'avait pas trop fait gaffe à l'état pitoyable de la pièce. Rideaux déchirés, fenêtres brisées, traces de lutte dans tous le bureau, dissimulées sous le foutoir pas possible qui avait envahit le bureau... "Bien glauque", ouais. C'est le mot. L'autre gars s'exclama encore devant un des articles concernant la Ville. Novembre aperçu le gros titre et lut rapidement par-dessus son épaule. C'était un article justifiant la coupure d'eau - et vue la raison, être privé d'eau courante était peut-être une aubaine sans nom -, et en effet, il y avait de quoi être... Surpris. C'est quoi cette molécule cheloue qui a contaminé l'eau ?

En soulevant un paquet de feuilles abîmées dont l'encre était trop diluée pour être encore lisible, il tomba sur un gros manuel à la reliure de cuire. Un truc ancien, vu sa tronche. Des noms étaient écrits, barrés, annotés. Sauf qu'il connaissait le deuxième. Et le troisième, et le quatrième, et le cinquième. Valentin écopait d'un "F", tandis que les noms de ses trois (anciens ?) acolytes étaient accompagnés d'un point d'interrogation. Les autres portaient tous la mention "T" ou "0", et étaient également rayés de noir. Le zéro, c'était pour le temps ? Mais le "T" alors ? C'était quoi ? "Tué" ? "Trop-lent-pour-survivre" ? "Traumatisé" ? Non, s'ils étaient barrés, c'est qu'ils étaient morts, ou "absents". Disparaissait-on si notre compteur tombait à zéro ? Bambi parla et se moqua de "Cocaïne". Et "Bambi", elle croyait que c'était mieux ? Il la regarda d'un air de profond désespoir. Un désespoir désabusé, qui voulait dire "ma pauvre, t'es irrécupérable."

« Bieeeeen, t'as trouvé ça toute seule Blondie ? Et arrête de m'appeler comme ça, ça m'énerve. »

"F"... "F"... "F"... Valentin était le seul à en être affublé... Il sortit précipitamment la Lettre de sa poche, froissant au passage le papier déjà amoché :

« Le "F", ça doit être pour "Fontaine", je pense. Il doit se passer des trucs pas clairs là-bas... En tous cas, c'est ce que dit cette lettre. Si Calvetti tient toujours à y aller, on pourra en avoir le cœur net. »

Scrutant toujours le bureau à la recherche d'informations utiles, il s'arrêta un instant sur deux post-it intéressants. "Tango est aux marais", et "Les informations sur le vol de temps sont dans le paquet rouge." Il y avait des livraisons, à Nulle-Part ? Des gens, pour les faire ? Il nota ces informations dans un coin de sa tête, sans pour autant les faire remarquer aux trois autres. Il fallait éviter de se disperser. D'abord, le registre.

« Une idée de ce que pourrait être ce "T" ? »

Il renifla, sceptique alors qu'il déchiffrait difficilement sa coupure de journal. Pas d'eau. A cause d'une molécule bizarre. Les quelques mots scientifiques de l'article lui arrachèrent un soupir las et il passa bien vite à autre chose. Comme les deux post-it scotchés au bureau tiens. " Tango est aux marais " L'information ne lui apprit rien, sinon qu'il y avait des marais dans cette ville. Ce devait être un nom de code. Et l'autre post-it, lui, était bien plus intéressant. Des informations sur le vol de temps ?... C'est exactement à ce moment que Blondie alias Bambi commençait à émettre des hypothèses sur les compteurs qui tombaient à zéro avec des babillements aigus de pouf.

Il inspira alors que ses sourcils se fronçaient exactement comme s'il essayait de comprendre quelque chose. Sauf qu'il n'y avait rien à comprendre. Pour une raison inexplicable, leur temps était à priori compté et il y avait un moyen d'en acquérir plus. Et ce moyen était dans un paquet rouge. D'accord. Doucement, les pensées s'assemblaient. Trouver le paquet rouge. Le trouver avant les autres. Vite. Il s'empara du post-it.

" Ouais Cocaïne ça craint. Et Haricot c'est pas mieux. " renchérit-t-il pour détourner l'attention. Même si au fond, Bambi ou Novembre n'avaient pas de quoi être fiers de leurs pseudonymes d'après lui.
Toujours plongé dans ses pensées, il écoutait d'une oreille les déductions du Ténébreux. Ok. Une Fontaine. En quoi une fontaine pouvait-elle être dangereuse ? A part à cause de l'eau contaminée ?

Il tourna la tête vers Poppy toujours plongée dans la rêverie de son souvenir. Le paquet rouge. L'alarme clignotait dans son esprit vide. Il prit sa décision rapidement. Apparemment, le temps était précieux ici.

" Ahem Bambi ? Tu peux veiller sur Poppy un moment ? J'dois aller pisser. " grogna-t-il sans aucune classe à l'égard de la blonde. Il préférait savoir sa Poupée en sécurité avec une autre fille qu'avec un garçon à priori prompt à s'énerver. Et il était sûr que personne n'irait le chercher dans des toilettes. Sa voix ne trahissait pas son trouble, comme si les mensonges lui étaient familiers. Les mains dans les poches, poing fermé sur son post-it, il ouvrit la porte d'un revers de pied et s'éloigna de la petite troupe non sans un dernier regard pour la rouquine. Il reviendrait la chercher. Plus tard. S'il avait le temps.

"Tu m"touches, on couche", c'est bien le slogan de "Bonne nuit, les petits" ?

❝
Tu tires la langue à Monsieur-le-Ténébreux-qui-sait-plus-de-choses-que-tout-le-monde. Nan, mais sé-rieu-se-ment. Personne ne t'a jamais parlé comme ça. Enfin, tu espères. Parce que tu ne te souviens plus si on t'a agressé. C'est pas pratique pour reprocher des choses aux gens, en fait, de perdre la mémoire. Et puis, « T » comme quoi ? Tétraplégique ? Une ville - en partant du principe que c'était vraiment une ville et non une décharge publique - qu'on a nommé Nulle Part. Des gens mourraient - ou pas - et on pouvait rencontrer des nouvelles espèces animales : comme le Ténébreux sauvage. C'était un zoo, quoi. Tu regardas ton portable, et appuyas frénétiquement sur le bouton pour l'allumer. Mais aucun signe de vie. Il avait dû se décharger.

▬ Quelqu'un a un chargeur pour portable ? Tu hasardas. Parce qu'après tout, peut-être qu'ils étaient pourvu d'un minimum de technologie dans ce bled pourri et lugubre. Tu tournas la tête vers le celui qui t'avait demandé de veiller sur Poppy. OH. MA. GAAAD. Il avait un tel swag. Il te comprenait. Oui, Cocaïne, ça craint. Oui, Haricot, ça craint aussi. Mais quand on plussoie une diva comme toi, on te demande pas ensuite de veiller sur la Renarde, parce que Monsieur a envie d'aller faire ses besoins. Tu lui jetas ton Air de Dégoût. Qui devenait aussi récurrent que ton attitude de biatch polie. Tu regardas l'autre s'éloigner.

▬ Bien, bien. Tu te dandinais sur place. Coincée avec la Renarde et le Ténébreux. Tu ne pouvais pas rêver mieux pour une visite touristique dans une ville comme celle-ci. On va rester longtemps ici ? On a trouvé tout ce qu'on voulait, non ? Tu ne savais même pas si vous cherchiez quelque chose. Jusqu'à maintenant, tu n'avais fait que suivre la petite troupe. Pourquoi tentaient-ils de retracer le passé de cette ville-fantôme ? Le plus important n'était pas de s'échapper d'ici ? Tu fis la moue, en gonflant tes joues. Mode bébé phoque en détresse activé.

▬ Et pourquoi tu veux aller dans un endroit où il se passe des "trucs pas nets" ? Tu balayas ton regard sur la pièce. Ne valait-il mieux pas trouver un endroit protégé des bestioles, et attendre les secours ? Tout cela ne te plaisait pas. Pire, ça te tapait sur le système, tous ces gens qui avaient l'air de savoir comment faire. Naturellement. Alors que toi, t'étais complètement dans le vague. Décoiffée, trempée, et perdue. Le combo ultime de l'anti-glamour.

Et voilà la blondie qui demanda un chargeur pour portable. Allô, la poupée Barbie, ici la Terre, les portables ne fonctionnent pas à Nulle-Part, avec ou sans chargeur ils ne servent à rien. West s'éclipsa en demandant à Bambi de surveiller Poppy. Comme si c'était le moment d'aller pisser... Comment être sûr qu'un loup n'allait pas débarquer à l'instant pour les empêcher de fouiller davantage ? Ici, chaque minute était précieuse, mieux valait donc ne pas les gaspiller.

Et lui, il était seul avec les deux filles. Ouais, super. Sauf qu'elles n'avaient pas l'air très... Éveillées. C'était agaçant, il avait l'impression de faire tout le travail. Elles pouvaient pas remuer leurs fesses et l'aider à fouiller la pièce, non ? Non ? C'était trop demandé, ça, peut-être ? Et Bambi qui voulait déjà arrêter. Alors qu'elle n'avait même pas commencé. Haha. Le comble !

« T'as vraiment l'impression de chercher, là ? » Ne put-il s'empêcher de lui faire remarquer, tandis que son interlocutrice gonflait des joues en mode hamster.

Novembre reporta son attention sur le registre qui l'avait intrigué depuis le début. En tournant les pages, il s'aperçut qu'après quelques feuilles vierges, la liste continuait, inlassablement. Il remarqua cependant que l'écriture, l'ancre, les noms, tout était différent. Pas une seule rature, pas une seule marque. Pas d'annotation. Pas de mystérieux "F", de "0" ou de "T". Seulement, certains noms lui étaient familiers. Janvier, Clow, Calvetti, Sky, Novembre, Hawkeye, Ombre, et d'autres qu'il ne connaissait pas. Il remonta brusquement la liste. Novembre. Il était dessus. Comment ça se faisait ? Ses sourcils se froncèrent d'eux-même lorsqu'il constata qu'à part les personnes mentionnées plus haut, personne ne connaissait son nom d'emprunt. et il doutait que Janvier et Clow aient atterri à la mairie avant lui, puisqu'ils avaient emprunté un chemin différent en quittant la maison rouge par la porte de derrière. Alors... Qui avait écrit son nom ? Et ceux des autres ?

Le vieux manuel claqua dans un nuage de poussière lorsqu'il le referma - un peu trop brusquement, peut-être. Bambi avait proposé de partir, hein ?

« Ouais, j'en ai assez vu. Y'a un truc qui cloche, ici. T'as pas remarqué ? Pour trouver quoi, y'a pas trente-six solutions. Faut aller voir les "trucs pas nets". Histoire de se faire une idée, tu vois ? »

Même s'il doutait que Bambi comprenne, il faisait des efforts pour lui expliquer la situation. Elle devrait sérieusement songer à le remercier de l'instruire un peu. Ça serait la moindre des choses.

« Bon, je vais voir ce que les autres ont trouvé à côté. À ta place, je resterai pas plantée là comme une potiche, les loups vont peut-être revenir. »

Il se retint de justesse de préciser l'allure des loups - mutants, trois fois plus gros que la normale, sans doute dix fois plus agressifs, aussi - pour éviter de trop paniquer la blonde. Une Barbie apeurée, ça devait faire des trucs sacrément stupides - genre plus stupides que d'habitude. Il fallait être prudent. Sur ces bonnes paroles, il quitta la pièce et se dirigea en sens inverse, pour revenir à la cuisine, espérant que celle-ci soit moins bondée qu'un peu plus tôt.

HJ:

Ne restait plus dans la salle que Poppy et Bambi.
Poppy ? La jeune femme était toujours assise contre le mur, les yeux dans le vague comme en proie à une vision lointaine. Elle était loin, la Poupée. Loin... Tout le monde ne réagissait pas bien au souvenir. L'écume lui monta doucement aux lèvres alors qu'une rougeur vive monta à ses joues. Elle hoqueta, son corps se souleva comme cherchant désespérément de l'air. Le regard toujours ailleurs, si loin... Des borborygmes sortirent de sa gorge puis elle se tut. Lentement, elle glissa contre le mur. Ses yeux se fermèrent. Le coeur cessa d'acheminer le sang dans les veines. Les cheveux roux tombèrent en une masse éparse sur le sol.

Poppy. La poupée de porcelaine.
Morte.

Son compteur s'est figé.

Elle est morte. Elle est morte. Pauvre petite. Le jouet est a jeter...

Spoiler:

Adieu la Renarde. Je tuerai le Chasseur.

❝
Tu regardas le Ténébreux s'en aller. Tu étais seule avec Poppy. Maintenant que vous étiez seules, tu te disais que tu pourrais un peu engager la conversation avec elle. Après tout, vous vous connaissiez.. avant. Peut-être qu'en restant à ses côtés, tes souvenirs reviendraient plus vite. Un peu comme un post-it vivant. Tu enroulas une mèche de cheveux blonde autour de ton index et tu t'éloignas du bureau. C'est alors que la Renarde se mit à convulser. Tu voulus t'approcher, mais l'écume perla le long de ses lèvres charnues. Son regard était vide.

Tu ne savais pas quoi faire. Tu ne savais pas ce qu'on devait faire. Est-ce qu'elle avait mangé quelque chose ? Est-ce qu'elle avait fait quelque chose de particulier ? Tu ne savais pas. Tu n'arrivais plus à réfléchir. Puis, la cascade rougeoyante s'épuisa sur le sol. Tu touchas sa peau glacée, et tu retiras ta main comme si tu avais été électrocutée. Elle était morte. Entre ses bras, une poupée qui possédait une gourmette sur laquelle était gravée ces mots : Pour ma Poppy. Tu détachas la gourmette avec précaution, tout en te rappelant ces mots : Tu peux veiller sur Poppy un moment ? Non, tu n'avais pas réussi. Tu n'avais pas réussi à veiller sur la poupée de Porcelaine. Tu emportas le réveil digital qui s'était figé dans le but de le donner à West.

Tu reculas, et tu fis demi-tour sur toi-même, sortant ce cadavre de ta vue. Et comme une meurtrière, tu avanças jusqu'à la porte, tu tournas la poignée, et tu refermas le bureau vide, comme s'il ne s'était jamais rien passé. Mais au fond, tu avais juste envie de pleurer. Ce qui t'en empêchait était ton mascara, qui ne devait pas être waterproof. Comme une voleuse, tu quittas la Mairie, et dans la nuit noire mouillée de chagrin, tu serrais ta trousse de maquillage.

▬ Je hais Nulle Part. L'écho était donné, Bambi.

Tu était entrée en Enfer.

C'était silencieux. Très silencieux. Trop silencieux.
Une sueur froide coulait à présent le long de son dos. Il lui semblait qu'il aurait du entendre la petite voix nasillarde de Bambi et le ton bourru de Novembre. Et la voix aérienne de Poppy aurait du s'élever jusqu'à ses oreilles. Sauf qu'il n'y avait rien. Rien que du silence.

Il marchait vite. West venait tout juste de quitter la Poste où il avait abandonné Landscape et Loki non sans s'être au préalable acharné avec eux sur une petite boîte fermée objet de toutes leurs convoitise donc le contenu s'était révélé plus que décevants : des bracelets. Dépité, le jeune homme avait attaché celui de couleur bleu à son poignet et cherchait à regagner le bureau du maire afin de retrouver sa poupée. Poppy. La jeune fille rousse habillée en danseuse. Son teint de porcelaine et ses manières fragiles lui avait fait endossé une sorte de rôle de protecteur et à présent, il se sentait responsable d'elle.

Dix minutes toute seule. C'est pas grave. C'est pas grave, elle s'est pas envolée. murmura sa conscience.

La porte du bureau était fermée. Il fronça les sourcils et posa une main sur la poignée qui lui parut étonnamment froide. La pièce était vide. La paperasse traînait encore sur le bureau. Les rideaux étaient toujours déchirés. Nouveau frisson. Vide, la pièce lui paraissait plus angoissante encore.
" Poppy ? " sa voix rauque perça la silence et résonna contre les murs. Mais aucune réponse ne lui parvint. " Poppy ? " répéta-t-il en faisant un pas dans la salle. Il avançait lentement à présent. Ses bottes se posaient sur les feuilles éparses qui avaient atterries par terre. Du regard, il cherchait vainement un signe de vie. Peut être que Bambi avait été contrainte de partir et qu'elle avait emmené la rousse avec elle. Peut être que Novembre avait embarqué les deux filles loin de ce bureau morbide. Peut être que...

Il vit la main. Une toute petite main pâle sur le sol à côté d'une feuille de papier chiffonnée. Une paume ouverte. Muet d'horreur, ses yeux remontèrent jusqu'au bras plus blanc que neige, l'épaule nue tout juste surmontée d'un morceau de tulle. Une robe de danseuse... " Poppy ! " il avait parlé plus fort qu'il ne l'aurait voulu et s'était précipité sur la silhouette allongée au sol. Une masse de cheveux roux recouvrait son visage. West s'agenouilla auprès d'elle et soutint son torse entre ses bras. Il dégagea des mèches de cheveux et découvrit sa face pâle. Des restes de salive écumeuse gouttaient sur son menton et ses yeux clos lui arrachèrent un " Non ! "

Non ? Non pourquoi ? Non ne sois pas morte ?

Frénétiquement, il cherche à capter un pouls près de sa nuque encore tiède. Mais sa main enfouie dans son cou ne trouve pas la moindre palpitation. Il la secoue, il la serre dans ses bras. Il répète " Non, non, non..." Les larmes roulent sur ses joues sans qu'il essaye de faire quoique ce soit pour les retenir. Son nez se perd dans les cheveux roux de la danseuse alors qu'il murmure la voix déchirée en un sanglot rauque et profond. " Non, non. Je t'en supplie, pas ça. Pas toi. Ne me laisse pas seul." Il serre plus fort le corps sans vie et reprend. " Reviens. "

A genoux près du corps, il pleurt comme un enfant en la serrant contre lui. Poppy. La petite danseuse croisée à la sortie du train. Elle n'existe plus. Et démuni comme jamais, West sanglote contre son corps mort.

Arrête, les garçons ça pleurs pas.

Tout allait vite. Trop vite à Son goût. Elle aurait pu contourner ses propres règles, mais Elle les avait édictées ainsi. Elle les respecterait. De mauvaise grâce Elle laissa échapper une petite sphère de lumière, qui se mit à danser doucement devant West, éclairant la scène macabre d'une lumière étrange...

Spoiler:

▬ Tes lacets sont des fées, et tu marches dessus. 3446118776

00h-02h
Tel une Ombre je me faufile parmi vous

Suite de ceci

Sourire aux lèvres, Ombre sort de la cafétéria. Elle le sait. La ville la protégera toujours et cette destination ne peut être un piège. Elle n’est plus seule désormais. Elle ne le sera plus jamais. Elle ne regarde même pas derrière elle pour voir qui la suit. Elle s’en fiche. Elle peut partir seule car elle n’est plus totalement seule. Ombre l’avait oubliée. Cette présence rassurante. Elle l’avait oublié. Comment avait elle put. Mais maintenant elle s’en rappelle et elle n’oubliera plus. Ses talons claquent dans le silence du couloir. Pourtant le silence n’est pas. La jeune femme s’arrête. Ces talons ne sont pas les seuls qui brisent le silence. Des cris « Reviens. ». Des pleures maintenant. Le sourire de l’adolescente se fend en une moue triste. Crescendo. Elle se rappelle son état lorsqu’elle l’a perdu. Crescendo. Elle ne peut pas laisser cette personne pleurer toute seule. Et les traces ? Elle est stupide. La ville veut la guider quelque part, les traces ne s’effaceront pas. Elle se baisse et frotte le sol de son doigt. Non, ça ne s’efface pas. Un soupir de soulagement s’efface de ses lèvres.

Elle n’attend pas une seconde de plus. Ombre essaye de se diriger grâce aux sons mais ces talons en font plus. Elle se baisse, grimace de douleur en enlevant ses chaussures, et reprend son chemin. Les pleures se sont calmés. Une lumière s’échappe d’une porte. Elle n’hésite pas, elle est certaine que la personne est là. Elle inspire profondément un peu inquiète de ce qu’elle va trouver derrière. La poignée descend dans sa main et elle rentre dans la salle, fermant la porte derrière elle. Tout d’abord elle ne distingue personne. Se décalant sur la gauche, elle voit enfin le derrière du bureau. Sa main se glisse devant sa bouche. Ce petit corps blanc, étendu sur le sol. La crinière rousse qui s’en échappe. Un regard sur le visage la rassure : ce n’est pas elle. Les larmes montent d’elles-mêmes dans les yeux de la vivante. Pourquoi cette inconnue et non elle ? Aux côtés de la morte, Ombre voit le garçon assis à côté d’elle, pleurant. Cet homme pleurant, rajoute de la peine dans le cœur de la jeune femme et ses larmes deviennent plus présentes. Elle allait faire un pas mais au dernier moment, la jeune femme aperçoit la boule lumineuse qui flotte à côté du jeune homme. Elle le laisse donc le toucher et telle une Ombre, elle se fond dans le paysage, patiente. Elle fera remarquer sa présence après.

Musique maestro

" Non..." murmure-t-il toujours d'une petite voix mouillée, le nez enfouie dans ses cheveux.
Il ne fait plus attention à rien. Un vide affreux lui noue la gorge alors qu'il tient le petit corps frêle et sans vie dans ses bras.

Je te jure que si j'avais su, je ne t'aurais jamais laissé seule. Je voulais veiller sur toi. Réveille toi.

Mais elle ne se réveillera jamais. Elle ne se réveillera jamais parce qu'elle est morte. Morte, morte, morte. Le mot résonne dans sa tête. Morte. La Poupée est morte. Il ne veux pas la lâcher. Il lui semble que la lâcher ce serait la perdre à nouveau. Mais elle n'est déjà plus là.

La sphère lumineuse arrive dans la pièce et éclaire la scène. Un cow-boy qui serre une petite danseuse affalée sur le sol. Ca ressemble presque à une mise en scène. Un jeu de théâtre.

Sauf que c'est atrocement réel West. Elle n'ouvrira pas les yeux une fois le rideau baissé. Elle ne se relèvera pas comme un automate que l'on remonte.

Il touche le souvenir d'une main absente. Revoir le passé. Pourquoi ? Pour essayer d'oublier le présent.

Si Elle avait eu des dents pointues, Elle les aurait sans doute découvertes en un sourire carnassier. Douce illusion que le passé sera meilleur. Mais on ne peut pas fuir, West. Le souvenir lui revient, violent reflet du présent auquel il veut échapper.

Personne n'échappe à Nulle-Part, West. Personne.

West:

Même le temps n'efface pas les horreurs, West. Pas même ces six heures gracieusement offertes.

00h-02h
Tel une Ombre je me faufile parmi vous

Dans son coin, Ombre s’est finalement assise et ses yeux verts ne quittent le visage des yeux. Il a touché la sphère et son visage est devenu de marbre, ses yeux sont devenus vagues et distants. Elle sourit. Jamais encore elle n’avait vu quelqu’un toucher un souvenir. D’habitude ces souvenirs sont à elle. Oh doux souvenirs. A ce moment présent, elle n’a qu’une envie : se jeter elle aussi sur la sphère flottante mais cette dernière disparait déjà. Elle soupire et patiente. Le doux visage du jeune homme se contracte à nouveau détruisant l’image du visage neutre et sans émotion observé précédemment. Son souvenir est triste, quelque chose d’horrible se passe. Des larmes prennent place dans les yeux du jeune homme. Il faut le réveiller ! Il faut qu’il sorte de se cauchemar ! Ombre se lève et se jette à côté du jeune homme. Elle prend les épaules entre ses deux mains et le secoue le jeune homme de toutes ces forces. Réveille-toi ! Réveille-toi ! Arrête de pleurer !. Et les mots sortirent de sa bouche sans qu’elle ne s’en rende compte.

« Réveille-toi, s’il te plait. »
Elle n’aime pas voir les gens pleurer. Mais le garçon s’est réveillé. Il la regarde avec étonnement. Elle le lâche. Elle balbutie des excuses dans un murmure. Elle rougit, elle le sait, du coup la jeune femme détourne son regard des yeux du jeune homme. Elle ne sait pas quoi dire. La présence du cadavre l’angoisse un peu et cette honte. Elle ne sait plus où se mettre. Alors elle ne dit rien. Et le silence s’installe. Elle se resserre dans la veste essayant de capter encore l’odeur de landscape, son odeur réconfortante de grand frère improvisé.

La fête, les gens qui dansent, la musique, l'alcool qui tourne. Des visages auxquels il sourit. Celui du blond en particulier auquel il sait qu'il peut faire confiance. Un gars allongé par terre dans un état pitoyable pour qui il ressent une certaine peine mêlée à de l’agacement. Il ne le voit pas bien. Mais les traits lui semblent connus. Moins inconnu que le reste en tout cas. Car tous ces gens ne lui rappellent rien. Rien

Les directives qu'il lance à la cantonnade, l'escalier qu'il monte. Elle. De longs cheveux blonds qui couvrent son visage alors qu'elle est affalée sur le lit. Elle. Son coeur a un sursaut. Qui est-elle ? Il ne sait pas. Mais il sent qu'il l'aime. Passionnément.

La douleur. La douleur qui irradie dans ses veines. Les larmes, incontrôlables. Les gens qui paniquent, qui essayent d'intervenir. La douleur.

Il revient à lui. Il pleure toujours. " Je..." il hoquète, son souffle est court et rauque. Il se sent mal. Mal. " Elle est morte...Elle est morte..." Qui ? Poppy ? Kate ? Pourquoi ? Comment ? Il ne sait pas. Il ne sait pas. Du regard il cherche quelque chose, un réconfort quelconque. Quelqu'un. Ce quelqu'un c'est une fille aux longs cheveux roux qui le regarde. Elle parle. Il n'entend pas. Les mains toujours serrés sur le corps de sa danseuse, le jeune homme répète. " Elle est morte..."

Spoiler:

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▬ Tes lacets sont des fées, et tu marches dessus.

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