La porte s'est ouverte et il a suivi Calvetti à l'intérieur après avoir vérifié que personne ne pénétrait inopportunément dans le commissariat. Il a constaté que le stock d'armes, bien que limité, est amplement suffisant pour tous les Maraudeurs. Et il y a aussi de quoi se débarrasser d'éventuels loups trop curieux ou pas assez craintifs.

Sauf qu'il n'a pas eu le temps de poser la main sur la gâchette usée.

Parce que tout à coup, il se retrouve comme expulsé de la salle sécurisée.

Qu'est-ce que... Quoi ?! C'est comme si la Ville avait rembobiné une cassette. Et il se retrouve de nouveau devant l'entrée de la salle d'armes, comme ça. Ouais, ouais. Sauf que cette fois-ci, en face de lui, ce n'est pas Hécate ou Superman. Ni même Calvetti ou cette plante verte aux cheveux bleus, non. Non, c'est pire, encore. C'est Clow. Clow. Et dans ses bras, il y a une petite morveuse aux cheveux verts.

Novembre arque d'abord un sourcil, extrêmement sceptique à l'idée qu'une gamine de cet âge puisse se retrouver à Nulle-Part. Superman au moins est débrouillard. Pas comme cette mioche qui sert à rien. Bah, tant pis. Elle jouera les boulets avec le rouquin.

Et puis l'inévitable regard acéré et contrarié arrive, irrépressible. Non, décidément, il n'aime pas ce type. Il n'y peut rien s'il ne supporte pas sa présence, hein ?

« Qu'est-ce que tu fous là, toi ? » Grogne-t-il à l'intention du gêneur.

Et surtout, où sont passés les autres ? Connasse de Ville, on n'était pas loin d'être ensembles. S'il avait pu faire quelque chose pour abîmer Nulle-Part en l'instant, il n'aurait pas hésité une seule seconde. Futile esprit de vengeance. Qu'est-ce que t'as fait d'Hécate, maintenant ?

Bientôt, quand tu seras libre, tu prendras un couteau, un long couteau, pas un petit, un long et grand, qui fait bien mal, et tu lui enfonceras dans le ventre, et là, il mourra, et tu riras. Ça te fera plaisir, parce qu'au fond, tu sais bien que tu l’aimes pas, et t’aime pas ici. Ça fait peur. Mais toi, avec un grand couteau, ça fait pas peur, tu seras invincible. Ce n’est pas qu’il t’énerve particulièrement, le roux, c’est juste qu’il est chiant, sérieusement. Il te laisse à peine respirer, il te laisse coller, là, contre lui, et toi t’en a marre. Lui comme cette situation, ça te saoule. C’est comme un chewing-gum coller à ta chaussure, quand ça s’accroche, ça ne te lâche pas. Mais au moins, quand tu auras ton couteau, tu pourras le décoller, et il ne pourra plus jamais se remettre sous ta chaussure.

Et comme il n’est jamais trop tard pour aller prendre un couteau, tu te débats. Encore. Mais plus fort, pour qu’il sache bien que tu veux t’en aller, vraiment. Tu t’en fous de l’autre là, le mec bizarre. T’en a vraiment rien à faire, tu te fiches de ce qu’il peut penser de toi, quand tu auras tué l’autre, Clow. Tu fais comme si il n’était pas là, et puis comme ça, tout ira mieux.

Ouai, bientôt tu seras libre, ce sera cool.

- Soupe, soupe, soupe, soupe, soupe dans ta gueule ♪ Te mes-tu à chantonner à voix basse. Bientôt tu seras libre.

Il plisse les yeux. Comment ça "on se connaît" ? Bien sûr qu'ils se connaissent, même si honnêtement, il se serait bien passé de sa rencontre houleuse avec cet énergumène roux. Et là il se rappelle que depuis la veille, il a bien du prendre une bonne vingtaine d'années - en apparence seulement, hein, 'faut pas déconner. Ah. Oui. Ça. Bon. Ben forcément, Clow aura peut-être du mal à le reconnaître, et c'est pas plus mal. Mais le truc qui le fait tiquer, c'est qu'il semble s'être installé au commissariat. Comme on emménage dans une nouvelle maison, quoi. Et il se comporte avec la gosse - qu'il appelle d'ailleurs Julia - comme euh... Un père ? Un frère ? Un cousin éloigné ? Bref, comme de la famille. Il pense quand même pas qu'il peut habiter à Nulle Part, cet abruti ? Bah, tant pis. Il se fera bouffer par les loups et ça sera son problème.

D'un autre côté, il n'a pas l'air spécialement malmené par la Ville - pas plus que Calvetti ou la potiche bleue, en tout cas. Ça l'agace un peu. Jaloux, Novembre ? Noooooon, pas du tout. C'est juste qu'il a la poisse et pas Clow, mais il peut très bien se dépatouiller tout seul avec ses problèmes, no big deal. Haha. Bien sûr. Évidemment. Tellement pas.

Bref.

« Tu crois que c'est le moment d'avoir le sens de la propriété ? » Siffle-t-il d'un ton moqueur.

Il le toise d'un air sceptique, lui et sa gosse, et arrête là sa remarque puisqu'il voit une femme passer et entrer dans la salle d'armes. Mais le genre ultra louche qu'on n'a pas envie de croiser dans une ruelle sombre, tard la nuit. Avec du sang partout sur la tête, à moitié désapée, la démarche altière qui contraste totalement avec son apparence, bref, la décalée de service. Elle passe sans un mot, et, dans un sens, elle a bien raison.

« Faudra quand même que tu comprennes qu'on est à Nulle Part, et que rien n'est vraiment à personne. Ce commissariat, c'est celui de la Ville avant tout. »

Et c'est comme ça pour tous les bâtiments, pour toutes les affaires, pour tout, ajoute-t-il silencieusement. Il n'a pas l'impression d'être libre, ici. Comme si la ville jouait avec leurs nerfs, mais aussi avec eux.

« Maintenant, c'est vrai, qu'est-ce qui empêche de se servir ? » Lance-t-il par-dessus son épaule en s'avançant de nouveau vers la salle d'armes.

Il n'a pas envie de voir Clow, ni de l'entendre lui faire ses remarques à la con, même si se défouler sur quelqu'un lui ferait un bien fou, lui semble-t-il. Sur le moment, peut-être. Mais bref, il a d'autres choses plus importantes à faire, comme retrouver Hécate et Décembre, par exemple. Ou essayer de régler ce putain de problème d'âge. Ou celui des grenouilles. Voire les deux. Bref.

HJ:

La porte s'ouvre devant, laissant passer l'ancêtre. Mais Chancelier l'ignore passablement et passa furtivement entre l'homme et la porte pour se glisser hors du commissariat, hors de chez lui. Il a bien entendu la voix de l'autre garçon, celui qui lui dit quelque chose. Ah, il avait dit un truc intéressant, porte bonheur ? Chancelier tourne les talons, comme s'il voulait retourner vers le garçon et lui en demander plus sur ce qu'il entendait par porte bonheur. Si cela pouvait le reprocher un plus de Chocolat, il était prêt à s'associer avec n'importe qui.

Sauf que Chancelier était Chancelier et qu'il était incapable de se mouvoir correctement quand il déraillait. Ses pieds s’emmêlèrent entre eux avant même qu'il ne puisse appeler le garçon et il roula littéralement dans les escaliers du perron. Certes, il n'y avait que 4 marches, mais du coup, il n'avait même pas l'occasion de se remettre sur ses pieds et gisait pitoyablement les jambes en l'air et la tête au sol. Une habitude chez lui. Autant dire qu'il était lessivé et tout seul à nouveau. S'il n'avait pas vu la paire de chaussure en face de ses yeux, il aurait probablement commencé à pleurer en se lamentant sur son sort et la disparition de Chocolat.

Il leva les yeux et reconnu immédiatement la personne qui le regardait.

▬ CLOW ! Il se hissa sur ses deux jambes et serra plus fort que jamais Clow dans ses bras en laissant tombé le sac qu'il portait au sol, dans un fracas lourd. Il n'avait jamais été aussi content de revoir quelqu'un depuis qu'il était à Nulle Part. Clow était finalement rentré.

▬ Si tu savais tous ce qu'il m'est arrivé. J'ai pourtant essayé de leur faire comprendre qu'ils n'étaient pas chez eux, mais personne de m'écoute, tout le monde m'ignore. Et cette blonde à même coupé l'électricité, tu crois ça toi ? Sans même me demandé. Il continua ainsi dans son flot de parole, mélangeant les événements pour finalement arrivé à Chocolat. Oui, Chocolat, il devait la retrouver.

▬ Ha mais je n'ai pas le temps, je dois la retrouver, elle me l'a volé, elle m'a volé Chocolat. Il faut que je la retrouver, je lui ai promis de m'occuper d'elle ! Ça ressemblait beaucoup plus au discours d'un fou que d'un être humain normal. Chancelier repoussa Clow et balaya la rue du regard. Et maintenant qu'il était dehors ? Il devait faire quoi ? Il n'avait aucune idée de l'endroit où pouvait se trouver sa blondinette. Il tremblait à l'idée de la louper, ou pire, de ne jamais la retrouver.

▬ Qu'est-ce que je dois faire pour la trouver ? Je veux juste la récupérer, elle a besoin de moi et moi j'ai besoin d'elle... Finalement, il n'avait pas réussit à retenir ses larmes qui dégoulinaient sur ses joues. Il en avait marre de tout ça, pourquoi on s'acharnait sur lui, hein ? Il avait beau savoir que c'était comme ça que les choses fonctionnaient ici, il ne pouvait pas s'empêcher de pleurer.

Dans le monde fantastique de Chancelier, celui où les oiseaux chantaient et où les poneys prenaient de thé avec des petites fours en formes de pingouins, Clow y avait sans aucun doute une place. Suivant les indications de son ami, Chancelier expulsa lentement l'air qu'il avait dans ses poumons. Rapidement, son rythme cardiaque s'apaisa, son corps ne tremblait plus et il sentit ses larmes s'arrêter. Le fait d'avoir Clow en face de lui était sans doute le seul moyen pour que Chancelier puisse retrouver un semblant de calme, au moins jusqu'à ce qu'il puisse à nouveau enlacer Chocolat. On aurait presque dit un enfant tout juste éveillé d'un cauchemar qui se faisait réconforter par sa mère. Quoique très masculine la mère.

Il baissa les yeux, fixant bêtement le sol. Il sentait tous ses muscles se relâcher, il s'en manqua de peu pour qu'il ne tourne l'oeil et ne s'étale inconscient sur le sol. Après autant de stress, ça aurait été le cas de n'importe qui. Mais il n'avait pas le droit de se reposer, pas tant qu'il n'aurait pas retrouver sa chère et tendre. C'est à ce moment là qu'il aperçue l'enfant dans les bras de Clow. Une petite fille aux cheveux salement teint - sérieusement, une teinture aussi ratée, fallait vraiment pas être doué - qui le regardait silencieusement. Il l'avait oublié, cette petite fille qu'avait ramené Clow au commissariat. Il allait demander à Clow qui elle était, mais il sentit une main se poser une épaule. Un geste à la fois salvateur et gratifiant. Ah, il n'avait même pas écouté Clow. Enfin, ses paroles étaient entrées mais il s'était focalisé sur le timbre la voix plus que sur les paroles. Bah, ce n'était pas ça le plus important. Le chef était revenu, c'est tout ce qui comptait.

« Va vider le réservoir d'eau de la machine à café là-dedans et récupère ces papiers étranges qu'on a trouver avant d'être tous séparés, je ne veux pas que ces inconnus puissent en tirer quoi que ce soit. Il est temps d'aller sauver nos princesses, Chancelier ! »
▬ Roger ! Il fit un rapide salut, se mettant au garde-à-vous puis attrapa énergiquement les bouteilles. Tout était de nouveau normal, oubliés les tracas et les autres. C'était reparti pour un tour ! Se précipitant vers le réservoir, il se stoppa et pointa le sac qu'il avait fait tomber. Parce que la blonde à couper l'électricité, on a pu ouvrir la porte blindée... C'était le dépôt d'armes, mais... Je n'ai pas trop confiance en ces trucs là, je n'ai pas spécialement envie de m'en servir... J'en ai pris pour nous deux. Clow penserait probablement la même chose que lui, pas besoin d'armer Janvier - et Chocolat.

Reboutonnant rapidement sa veste, il passa en mode furtif devant la porte de la salle d'armes où se trouvait toujours les autres pour aller remplir ses bouteilles puis repassa tranquillement, faignant l'inaction. Il envoya les bouteilles à Clow ainsi que les dossiers, soigneusement pliés.

▬ Ils sont sur le point de partir... Profitons-en pour fermer la maison... Le message était très simple : c'était Chez eux. Chancelier affichait un sourire bêta. Pas de doute, maintenant que son grand ami était de retour, tout allait bien. Il se sentait de nouveau plein de force et de courage. Son regard se reporta sur la petite fille. Hum, il n'était pas très à l'aise avec les enfants, mais visiblement il allait devoir faire un effort. Ne sachant pas trop comment lui parler, il tira simplement la manche de Clow en la désignant d'un signe de la tête. Elle lui faisait un peu peur.

Clow fixa avec amusement Chancelier passer en mode efficace, ce garçon était décidément bien trop adorable pour son propre bien. Se giflant mentalement, le rouquin commença à réfléchir au décisions prochaines à prendre, tout en préparant machinalement de quoi survivre dehors. Il avait complètement oublié le poids d'une certaine montre dans sa poche.
La mention d'arme attira son attention et il s'avança vers le sac désigner en murmurant :

« Vu les saloperies qui semblent traîner dans cette ville, ce ne sera pas de trop. Par contre, pas question d'en donner une à Janvier, elle serait bien capable de se tirer dans le pied ou de me crever l’œil. »

La réflexion raviva l’inquiétude qu'il avait à savoir la jeune fille loin d'eux, il espérait vraiment qu'elle ait trouver quelqu'un pour la soutenir, quelqu'un qui n'était pas Novembre. Janvier n'était pas faite pour survivre seule, mais heureusement elle semblait plus que douée pour attirer des chevaliers servants à sa rescousse. Secouant la tête, Clow saisit les deux pistolets et tout le nécessaire pour les passer à sa ceinture, leurs présence avaient quelque chose d’apaisant. Dans un certain sens.

Rangeant soigneusement ce que Chancelier lui envoya, Clow lui sourit et lui ébouriffa les cheveux.

« Oui, tu as raison, c'est chez nous après tout et on reviendra. Donc, fermons ces maudites portes que les gens arrêtent d'y entrer comme si c'était un moulin. »

Son attention fut détourner de ces idées quand son ami tira timidement sur sa manche pour désigner l'enfant toujours coincée entre ses bras.

« Ah, c'est Julia. Je la connaissais visiblement avant d'arriver ici, je pense que c'est ma sœur ou ma nièce, quelque chose comme ça. J'avais aussi pensé ma fille à un moment, mais vu son âge et mes p...bref, c'est quelqu’un à qui je tenais et je tiens énormément. Mais que ça ne t'empêche pas de la réprimander si elle devient capricieuse, d'accord ? Après tout, toi et Janvier, vous êtes aussi important pour moi à présent. »

Enserrant un instant l'épaule du garçon, le roux finit pas se concentrer à nouveau sur les portes. C'était bien beau de vouloir les fermer, mais encore fallait-il trouver un moyen de le faire pour de vraie.

Chancelier fixait la petite fille, essayant de comparer ses traits à ceux du garçon. Il n'arrivait par à leurs trouver une ressemblance frappante, mais si on lui annonçait qu'ils étaient la même famille, il ne trouverait rien à redire. Chancelier n'était pas physionomiste, mais il y avait quand même quelques choses de commun entre Clow et la petite fille. Il fallait maintenant qu'il ajoute une personne de plus dans son monde. Tout ceux qui ne faisait parti de leur cercle étaient rapidement oubliés. Malgré tout, il y avait quelques exceptions, comme la brune aux mains palmés qui semblaient attachées à Chocolat, et puis la blonde qui avait ouvert la salle d'armes. Il y en avait un, par contre, qui restait malgré la volonté de Chancelier de l'oublier, c'était le garçon qui avait débarqué après.

Comment quoi, même en le voulant, on ne pouvait pas oublier le passé une fois que l'on s'en souvenait. Même si ce garçon avait été important pour lui, il valait mieux pour Chancelier qu'il ne s'en souvienne jamais. Maintenant, il n'y avait plus que Chocolat, Janvier et Clow - et accessoirement la petite fille.

Mais jusque là, Chancelier avait bêtement cru qu'il était le seul à penser de cette façon. Il faut dire que Janvier avait l'air de le détester de plus en plus. De savoir que Clow le mettait sur le même plan qu'une personne lui étant lié par le sang, cela lui fit énormément plaisir. De joie, il se jeta dans les bras de Clow pour se frotter contre lui, comme l'aurait fait un enfant.

▬ Je pense exactement la même chose ! Janvier et toi êtes très important, autant que Chocolat ! Même si Chocolat, c'est pas pareil quand même.

Il avait bafouillé et ça ne voulait, encore une fois, rien dire. Chancelier était bien parti pour rester faire des câlins à Clow, mais il y avait urgence : retrouver Chocolat. Repoussant presque aussitôt son compagnon aux cheveux roux, Chancelier se dirigea vers le tas de matelas pour récupérer les vêtements qui traînait pour les fourrer dans le sac.

▬ Chocolat est en sous-vêtements.

Précision inutile. Les intrus avaient désertés le commissariat, ils étaient maintenant libre de leurs mouvements. Il fallait maintenant fermer le commissariat. Mais sans pour autant s'enfermer dehors. Chancelier observa la salle histoire de trouver une idée.

▬ Et si on poussait le bureau contre la porte ? On peut toujours sortir par l'une des fenêtres et s'arranger pour la coincer de façon à ce que nous seuls puissions la rouvrir. Ou alors on fouille et on chercher la clé maiiiis...

Ils n'avaient pas vraiment le temps de chercher une clé, alors que leurs deux amies étaient perdues dans la ville.

Spoiler:

Tu bafouillas quelques mots doucement, en colère. Le grand garçon aux cheveux roux pensait qu’il pouvait te disputer, si jamais tu faisais mal, sauf qu’il n’avait pas le droit, non, tu ne lui avais pas donné l’autorisation. C’était injuste. Il t’avait juste recueilli, le temps que tu te fasses à l’idée d’être dans une sorte de monde étrange, avec des gens étranges eux aussi, mais maintenant que tu avais compris, tu étais en droit de te libérer. Mais avec lui, qui voulait soi-disant te protéger, c’était maintenant impossible. Tu ne songeais cependant plus à le tuer, avec un grand couteau, parce qu’on te prendrait finalement pour une folle, et tu ne voudrais pas ressembler aux fous. Comme ce garçon à la couleur de cheveux douteux, -oui même si toi-même, tu en as une-, qui se jette dans les bras, se défait, parle, crie, fait des trucs pas normal. Il te fait peur. Un peu comme tout le reste. Et si tu deviens une folle, tu auras peur de toi. Et si tu as peur de toi, tu mourras. Ce sera mal.

- Quelqu’un m’attend quelque part, je dois la rejoindre, avant qu’il ne soit trop tard.

Tu vas mourir de toute façon. Parce que les autres vont te tuer. Ils sont grands et fort, eux, et toi tu mens.

- Je ne vais pas me perdre, t'en fais pas.

Tu mens encore. Tu ne peux que te perdre, ici.

- Je veux sortir, où est la porte ?

Tu te détaches un peu d’eux. Pas assez pour éviter une fessée, si on veut te punir, mais de toute façon, tu n’es qu’une toute petite fille, avec une toute petite voix aiguë. Ils arriveront à te punir de toute manière. Alors, tu te mords la lèvre. Espérons qu’ils te laissent. Quoique tu serais plus en sécurité avec eux. Tu sais pas ce que tu veux. T'es nulle.

En prononçant ces mots, Clow n'aurait jamais pensé obtenir une réaction pareille de la part de Chancelier et quand celui-ci l'enlaça, il resta littéralement figé sur place. Du moins, jusqu'à ce que le jeune homme commence à se frotter contre lui. Adorable, certes, mais plus que gênant. Le roux rougit un instant, embarrassé.

« Heu...Chancelier, tu pourrais... »

Heureusement pour lui, son ami semblait nourrit à la pile électrique aujourd'hui et aussitôt coller, il s'était déjà détaché. Soupira de soulagement, Clow l'observa et leva un sourcil à la fois moqueur et amusé en le voyant empaqueter les fameux vêtements de son ''amie'' disparut.

« Et je peux savoir ce que vous faisiez tous les deux pour qu'elle se retrouve en sous-vêtements...allongée sur un matelas ? »

Après tout, Clow était un adolescent avant d'être une proie de Nulle Part et parfois il avait besoin de se rappeler ce fait. Alors, il avait bien le droit de taquiné un peu ses camarades, non ?

Reprenant presque aussitôt un visage sérieux, le jeune homme tenta de se concentrer sur l'idée de Chancelier, mais il trouvait ça de plus en plus difficile au fur et à mesure que les secondes s'écoulaient. Clignant des yeux, une fois, deux fois, le rouquin fini enfin par tilter. Il était épuisé. Il n'avait pas vraiment dormit (sauf si on comptait les drôles de téléportations) depuis trop longtemps et son corps continuait de demander quelque chose dont il n'arrivait pas à se souvenir. Si l'envie de nicotine était étrangère à sa mémoire, elle ne l'était visiblement pas à son corps, si Clow en avait été conscient, il aurait probablement sorti une blague du type « Pour vous guérir de vos addictions, tentez la méthode NP ! Douloureuse, mais 100 % efficace ou remboursé ! »

Seulement voilà, il ne s'en souvenait pas et là il voulait juste s'allonger deux petites heures pour retrouver un peu d'énergie. Et c'est évidemment ce moment que choisit Julia pour faire un nouveau caprice, elle était bien plus mignonne quand il l'avait trouvé à la gare ou dans la tour.

Posant gentiment sa main sur l'épaule de la fillette, il se pencha à sa hauteur, comme pour les mettre un peu plus sur pied d'égalité.

« Julia, je sais que tu n'aimes pas cet endroit, d'accord ? Et je sais que tu n'aimes pas forcément que je te dise quoi faire. Mais ici, c'est dangereux et même si nous étions dans une ville normal, en tant qu'adulte et surtout en tant que quelqu'un de ta famille, je ne pourrais pas laisser une enfant se promener seule. C'est comme ça, Julia. Les enfants de ton âge ne vont pas vadrouiller dans un endroit inconnu sans surveillance, parce que c'est dangereux et je ne veux pas qu'il t'arrive malheur. Tu comprends ça non ? Je sais que tu es une petite fille très intelligente. »

Prenant la peluche, qu'ils traînaient toujours avec eux, tu lui tends et ajoute :

« C'est comme avec Capsule, tu ne voudrais pas le laisser dehors, tout seul, dans un endroit inconnu, non ? Et bien moi c'est presque pareil, sauf que tu es plus importante pour moi, que Capsule ne l'est pour toi. Je n'ai pas envie de te gronder ou de te punir, alors soit gentille Julia et arrête de vouloir t'enfuir tout le temps. »

Lui embrassant la joue, Clow tourna l'espace de quelques secondes un visage las vers Chancelier. Tout serait tellement plus facile, si la mémoire pouvaient miraculeusement tous leur revenir. Julia pourrait enfin le reconnaître et peut-être le suivre sans chercher à fuir et se mettre mortellement en danger...Gaby pourrait peut-être se souvenir de lui et du mal qu'il lui avait fait. Le roux soupira avant de déclarer : « Je pense que c'est un bon plan que tu as là Chancelier. » Posant une main sur l'épaule de son ami et plantant son regard dans le sien, il ajouta : « Mais, je ne crois pas pouvoir partir de suite...écoute Chancelier, je sais que tu as vraiment envie de retrouver ta Chocolat et notre Janvier, mais je n'ai pas dormi depuis je ne sais combien de temps et je suis crevé. Honnêtement, je ne peux même pas te dire comme j'arrive encore à tenir debout et pour tout te dire, je me sens plus rassuré à dormir en plein jour, que la nuit où toutes ces saletés semblent rôder dans notre dos. Alors, donne-moi deux heures, juste deux heures de sommeil. Si tu ne veux pas dormir, c'est ok, tu peux voir si tu trouves quoi que ce soit d'utile pour la suite, voir même la clef de cet endroit. Et si tu veux dormir, ça me va aussi. Je suis désolé... »

Et, il l'était vraiment, désolé.

Se dirigeant vers le bureau, il commença à le pousser contre la porte. Il n'avait pas confiance en ceux qui pouvaient entrer dans leur sanctuaire ou en Julia pour ne pas se sauver.

Clow lui posa une question surprenante, mais qui ne manqua pas d'embarrasser Chancelier. Comment pouvait-on imaginer un seul instant que Chocolat et lui avaient... Il n'osait même pas y penser, chaste comme il était. Il aurait bien sorti une série d'explication complètement aléatoire et peu convaincante, comme seul lui était capable de le faire, mais Clow ne s'occupait déjà plus de lui.

En le voyant aussi attentionné envers la petite fille, Chancelier compris enfin ce que l'on pouvait qualifier de famille chez eux. Il avait vraiment l'impression de voir une petite fille faire un caprice à son aîné. S'il avait eut un appareil photo, il en aurait probablement profité pour les prendre en photo, amusant comme ils étaient - bien que la petite fille semblait réticente à se faire chouchouter.

Par contre, la suite lui plût un peu moins. Il pensait pouvoir compter sur Clow pour partir à la recherche des filles, mais visiblement il allait devoir faire sans. Chancelier voyait bien que son ami était fatigué. Lui avait déjà eut le temps de se reposer un peu, même de se refaire une santé mentale ! Voyant Clow se confondre en excuses, Chancelier ne pouvait pas lui en vouloir. Pas à lui.

▬ Hum... Tant pis, c'est peut être mieux que vous restiez là. Je veux dire, il faut que vous vous posiez un peu, faire le point et des choses comme ça... Comme ce qu'il avait fait une heure plus tôt, en chouette compagnie. Vous n'avez qu'à fermer la porte derrière moi, et attendre le retour de Janvier. Et puis il y a aussi tous les documents à lire. Chancelier attrapa le sac dans le quel se trouvait les feuilles pour le jeter dans les bras de Clow. Ça te fera de la lecture quand tu te réveilleras !

Sortant sa jolie lame, il la passa dans un des étuis ramassés dans la salle d'armes et le fixa à son pantalon, ça tenait. Il allait devoir trouver une ceinture pour faire mieux.

▬ Je dois aller récupérer Chocolat au plus vite. Je m'inquiète pour sa santé, et puis, je lui ai promis... Le choix était dur. Entre Clow et Chocolat, les deux étaient important, mais là, il devait retourner vers la jeune fille. Je sais que tu vas bien, si tu ne quittes pas le commissariat, j'aurais la conscience tranquille, c'est mieux pour elle aussi. Je reviendrais au plus vite, et je te présenterais Chocolat ! Et à Janvier aussi !

Il n'avait pas fière allure, mais l'intention y était.

Spoiler:

Tu serras Capsule fort contre ton cœur. Toi et lui, ça durait depuis longtemps. Vous vous connaissiez depuis une éternité sûrement, parce que tu l’aimes tellement que tu le sais, tu arrives à la ressentir. Alors que lui, ce n’est pas pareil. Il ne s’est pas réveillé avec toi dans les bras. Il t’a trouvé. Et c’est tout. De toute façon, on ne peut pas aimer quelqu’un qu’on a juste trouvé. Surtout toi. Parce que toi tu étais sale, et tu avais les cheveux verts. Puis, si tu n’as pas les cheveux comme lui, ça veut dire que tu n’es pas à lui. Les gens doivent se ranger par couleur de cheveux, le reste n’est pas important.

Spoiler:

Clow pensait vraiment que s'il y avait quelqu'un, dans cet endroit maudit, sur qui il pouvait vraiment compter : c'était Chancelier. Il s'était visiblement trompé.
Non pas que Janvier ne soit pas honnête et ne fasse pas de son mieux, c'est juste qu'elle se reposait beaucoup sur leurs épaules, sur ses épaules. Mais ça allait, c'était bien comme ça, parce qu'elle était gentille et encourageante, un peu comme la lumière qui continue de tenter d'éclairer même les pièces les plus sombres. Parfois, elle échoue, mais elle ressayera toujours le lendemain.
Seulement, la jeune fille n'était pas là, elle avait disparu dans dieu-sait quel terrible endroit que cette Ville maudite avait choisi pour elle. Et son absence pesait sur les épaules du roux.

Deux heures, c'est tout ce que le jeune homme avait osé espérer. Juste deux minuscules heures. Et maintenant, il se retrouvait avec un paquet de putain de feuilles dont il avait sincèrement rien à foute sur les bras et un Chancelier, qui voulait le laisser en arrière.
La goutte d'eau, qui fait déborder le vase, comme ils disent. L'absence de cigarette, non comprise, aidant probablement, Clow explosa :

« Pourquoi, tu me fais ça ? »

Dans un mouvement incontrôlé, il laissa les papiers s'écraser au sol.

« Juste deux heures, c'est tout ce que je t'ai demandé Chancelier. Juste deux putains d'heures, où j'aurais pu dormir pour de vrai. Sans avoir peur d'être éventrer par un loup géant ! Ou traînées par des ronces vivantes, qui ne s'arrêtent que quand tu n'es plus qu'un morceau de viande émietté sur la chaussée ! Ou même craindre que ma petite soeur, ma cousine, ou peu importe qui elle est, sorte imprudemment par une fenêtre pour aller se perdre ou même se faire tuer dans cette ville de MERDE ! Parce que crois-moi Chancelier, cet endroit ne veut pas qu'on s'en sorte ! Cet endroit, Nulle-Part, elle veut notre peau ! Je te demandais juste...juste de surveiller mes arrières pour quelques heures et t-toi tu m'envoies un paquet de feuille, bonne lecture et à plus ?! Tu me demandes de rester là et de ne pas sortir en t'attendant ?! Je demandais peut-être deux heures pour me reposer, mais tu ne mettras certainement pas deux heures à revenir !! »

Clow ne savait même pas ce qu'il disait, les mots sortaient de sa bouche dans un flot ininterrompus de vérités.

« Et je ne pourrais pas me permettre de t'attendre ! Si je reste enfermé ici avec Julia, si j'essaie de la protéger comme ça, on finira par crever de faim ou de soif !! Tu sais que ce qu'on a, tiendra pas ! Et je ne peux pas me défendre indéfiniment seul ! Pas avec une enfant accrochée à la hanche ! Comment j'utilise un couteau ou un flingue avec une gamine ?!! Je la pose par terre à chaque fois qu'un loup ou autres abominations tournent le coin de la rue ? Genre -Hey, si vous pouviez attendre juste cinq minutes que je pose la petite et que je me mette en place...Cool, c'est bon, vous pouvez essayer de nous bouffer, maintenant. Je suis prêt !-. Honnêtement, parfois je me demande comment toi et Janvier, vous me voyez ! Je ne suis pas un héros, Chancelier et je n'ai pas envie d'en devenir un, surtout pas dans cet endroit. REGARDE-MOI ! Regarde-moi et dis-moi ce que tu vois ? Parce que je me suis vu dans le miroir et tu sais quoi ? Je ne pense pas être vraiment plus âgés que toi ou que Janvier et je ne sais pas ce que je fais ! J'essaie, vraiment, je fais de mon mieux ! Mais qu'est-ce que quelqu'un de mon âge connaît de la vie ? Merde ! Qui à Nulle Part connaît quoi que ce soit sur la vie ! Nous n'avons même plus de souvenir de la nôtre ! Depuis ce matin, j'ai nagé au milieu de sangsues et cette saloperie d'endroit m'a envoyé droit sur une mine au trésor ! Sérieusement, lampe, bouffe, eau, couvertures ! Et tu sais quoi, Chancelier ? J' ai rien pris. J'ai rien pris parce que j'avais peur ! Parce que j'ai peur ! A chaque pas que je fais, je meurs de trouille !! Tu sais de quoi cette Ville est capable, personne n'est protégé, personne n'est à l'abri. Pour ce que j'en sais, la nourriture aurait bien pu être empoisonné ! »

Ses yeux commençaient à le gêner, le piquant furieusement. Refusant de reconnaître les larmes de frustrations qui pointaient, le rouquin baissa les yeux.

« Pourtant, je suis là. J'étais inquiet pour toi et pour Janvier, alors j'ai vraiment fait de mon mieux pour revenir. Je pensais ce que je t'ai dit tout à l'heure, Janvier et toi, vous êtes les personnes les plus importantes que j'ai dans cette ville. Et j-je pensais vraiment que tu étais sincère quand tu as dit que c'était aussi le cas pour toi ! Et pourtant, je ne compte pas assez pour que tu me donnes deux heures de ton temps ?! Laisse-moi rire ! »

Et rire, il le fit, levant les yeux au plafond, Clow lâcha un rire mêlé à un sanglot. Plantant ses yeux légèrement brillant dans ceux de son ami, il croisa les bras devant lui, comme s'il devait maintenant se protéger de son compagnon.

« Tu sais la chance que tu as ? Toi, tu retrouves quelqu'un de ton passé et BANG elle te saute dans les bras et te voilà tout feu, tout flamme pour aller la chercher ! Et bien tout le monde n'a pas ta chance ! »Nouveau demi-sanglot.« Moi aussi, si tu veux tout savoir, j'ai retrouvé la personne qui comptait le plus pour moi dans cette ville. Le garçon que j'aimais et avec qui je sortais -et oui, je suis gay, au cas où tu avais besoin d'une raison de plus pour te casser au plus vite d'ici-. Mais, tu crois qu'il était heureux de me revoir ?! Non !! Il ne se souvenait même pas de moi de cette manière ! I-il m'a repoussé et à commencer à me raconter des conneries comme quoi se serait mieux pour tout le monde qu'on ne se revoit jamais, comme quoi il ne craignait rien avec ses nouveaux super amis et il est parti pour aller...e-embrasser et sourire à cette fille !! Et cette putain de ville qui envoie ce souvenir de merde...parce que tu vois Chancelier, j'étais visiblement si con et naïf avant, que mon petit copain allait voir ailleurs et à même réussit à engrosser une fille et à avoir un enfant derrière mon dos ! Sans que je me doute de rien ! Personne ne se souvient de moi, ici Chancelier ! Julia veut me fuir parce qu'elle pense que je suis juste un adulte-menteur qu'elle ne reconnaît pas ! Gabriel me sourit comme un abruti avec ses phrases à deux balles, mais sans jamais mentionner le fait que je sois autre chose qu'une vague connaissance d'avant ou le garçon qu'il a trompé ! Et une fois qu'enfin, j'arrive ici, je me dis que je vais enfin retrouver quelqu'un qui m'aime pour ce que je suis là et maintenant. Qui n'a pas besoin d'avoir un passé commun pour m'apprécier, c'est genre bye-bye chéri, démerde-toi bien ?! Pourquoi, merde ?!!! »

Silence. Le regard perdu, le jeune homme reprenait sa respiration. Passant une main nerveuse dans ses cheveux, devant ses yeux, il inspira une fois, deux fois, trois fois. Inutile. Le sanglot s'échappa de sa gorge, suivis d'un autre et d'un autre. Lentement, Clow se laissa tomber au sol, assit, les yeux baissés et les larmes coulant sur ses joues rougies par toute la frustration que ces mots venaient de relâcher.
Il se sentait épuisé.
Non.
Il se sentait vide.

Spoiler:

Trois personnes formaient le petit groupe des Sentinelles. Le centre, le pilier, c'était Clow. C'était sur lui, le plus censé des trois, qu'on s'était reposé. Et maintenant ? Celui qui semblait inébranlable s'écroulait littéralement sous les yeux de Chancelier. Quand avait-il commencé à être à bout, à devenir faillible ? Clow n'était pas du tout l'être tout puissant qu'avait sublimé Janvier et Chancelier. Maintenant, il s'en rendait compte, ce n'était qu'un adolescent tout aussi pommé qu'eux. Un humain comme lui.

Il ne pouvait pas laisser les choses telles quelles. S'il partait maintenant, il trahissait son ami définitivement. Il n'avait rien vu, il n'avait jamais vraiment compris Clow, comment pouvait-il vraiment s'appeler ami dans ces conditions ? S'approcha de Clow, il l'attrapa par le bras pour le relever. Comme il venait de vider son sac, il était fébrile. Mais tant pis.

La claque était partie sans même que Chancelier s'en rende vraiment compte. Il fallait juste qu'il remette les idées de Clow en place. Parce que même s'il avait raison, qu'il avait lui aussi le droit de craquer et d'avoir des doutes, Chancelier ne lui laissera jamais le droit de se laisser aller. Sa main lui faisait mal, sans doute autant que la joue de Clow, il y avait mis force et conviction. Plus de place pour l'hésitation dans la tête de Chancelier.

▬ Si je dois rejoindre Chocolat, ce n'est pas parce qu'elle appartient à mon passé, mais parce qu'elle incarne mon futur. Sa voix ne tremblait pas, mais son corps si. Il avait envie de s'écraser au pied de Clow pour s'excuser. Je veux pouvoir lui montrer ceux en qui j'ai confiance, lui montrer que mon passé importe peu, pourvu que j'ai ces personnes à mes côtés. Clow, j'ai définitivement dit adieu à mon passé, j'ai choisi Nulle Part, même si ça veut dire que je vais mourir demain parce qu'elle ne sera pas d'accord. Je ne veux pas retrouver ma vie d'avant, celle que j'ai ici me convient.

Il posa sa main sur la joue de Clow qu'il venait de frapper, prenant garde à ne pas trop appuyer de peur de lui faire encore plus mal, puis posa son front contre celui de Clow.

▬ Je ne connais qu'un seul Clow, celui que j'ai en face de moi, celui de Nulle Part. Que dois-je faire pour qu'il reste tel qu'il est ? Pour qu'il redevienne le gentil garçon qui veille sur nous, je serais près à tout. Chancelier s'écarta de Clow, la mine grave et posa ses genoux au sol, puis son front, il implorait presque Clow. Mais il y a une chose que je ne ferais jamais. C'est trahir ceux qui m'ont donné leur confiance. J'ai promis à Chocolat de ne jamais la quitter, alors je la retrouverais coûte que coûte. Je t'ai promis que je reviendrais, alors je le ferais, même si cela doit me prendre une vie. Tu as promis à Julia que tu la protégerais. Le regard qu'il jeta à Clow lorsqu'il releva la tête était plein de reproches. Si te souvenir de ton passé t'empêche de tenir tes promesses, comment pourrais-je encore te faire confiance ? Tu as raison, c'est normal d'avoir peur ici, Nulle Part est un lieu terrifiant, et c'est justement pour ça qu'on ne peut pas se permettre de douter ou de ressasser le passé.

Chancelier finit par se relever, mais conservait toujours son regard critique envers Clow. Il ne pouvait pas le laisser seul avant d'être sûr qu'il était capable de réfléchir convenablement.

▬ Il est tant de faire un choix. Qu'est-ce qui est le plus important ? Ce type qui t'as foutu ta vie en l'air ou ceux qui pourront te permettre de t'en refaire une ?

La claque stoppa définitivement ses larmes, écarquillant les yeux, Clow releva enfin son regard vers Chancelier. Il n'avait rien vu venir et pendant un instant, il paniqua, prêt à s'excuser auprès de son ami, à le supplier de ne pas partir définitivement, de ne pas être en colère contre lui.

Le discours de Chancelier le fit se sentir petit, petit et honteux. Comme un enfant qu'on rabroue, le jeune homme rougit honteux et baissa à nouveaux les yeux aux sols. Chancelier était peut-être celui à genoux, mais Clow avait l'impression que c'était l'inverse. Il avait de nouveau envie de pleurer. Oui, il avait promis à Julia de la protéger, mais tout d'un coup elle avait décidé qu'elle ne voulait plus de lui et ça lui faisait peur. Parce qu'il ne comprenait pas ce qu'il avait fait de mal pour qu'elle ne l'aime plus, il ne savait pas ce que Régis avait pu faire de mal pour perdre Gaby et il était terrifié à l'idée que lui, Clow, puisse perdre Chancelier et Janvier sans savoir comment les récupérer.

Soudain, sans savoir comment ou quand, il se retrouva enlaçant Chancelier. La tête enfuit contre son épaule.

"Je ne veux pas mourir ici... Je veux pouvoir recommencer une nouvelle vie, une vraie nouvelle vie. Là où je dois m'inquiéter de ne pas être renversé par une voiture, d'avoir un job pour me nourrir ou d'aller voir le médecin si je suis malade. Pas une vie où je dois craindre sommeil, bêtes, Elle. C'est trop pour moi Chancelier. Ne me laisse pas derrière, s'il-te-plaît. Ne me laisse pas tout seul. "

Pour le coup, Chancelier avait l'impression qu'ils avaient changé de place. C'était un peu bizarre, mais il avait déjà réconforté Chocolat, alors pour pas Clow ? L'adolescent se montrait aussi possessif que sa petite blonde à dire 'ne m'abandonne pas' - Chocolat ne l'avait pas vraiment dit aussi clairement, mais l'avait montré par ses actions. Chancelier lâcha un long soupir avant de faire tomber Clow sur les matelas. Il se retourna ensuite vers la petite fille qu'il attrapa par le col et installa à côté de Clow sur les matelas. Il fallait aussi régler son problème à elle. Elle se montrait beaucoup trop capricieuse et c'était un gros problème. Ils avaient déjà assez à faire avec Janvier niveau caprice.

▬ Je te donne une heure. Pas plus. Julia est sous ta responsabilité, pas la mienne, alors débrouille-toi pour te réconcilier avec elle si tu ne veux pas qu'elle te file entre le pattes. Après cette heure, je partirais à la recherche de Chocolat, alors tu auras intérêt à savoir ce que tu veux.

Ça ne lui ressemblait vraiment pas de s'exprimer de cette façon. Mais s'il restait tout gentil, Clow n'allait sans doute pas lui obéir, et il fallait absolument qu'il le remette sur pieds. Chancelier se baissa et ramassa les feuilles que Clow avait envoyer balader. Il pouvait toujours les lire, pour éviter de penser à Chocolat. Il fallait aussi qu'il ferme le commissariat.

▬ Tu sais, je ne pense pas que cet endroit soit si invivable et dangereux que ça...

Après tout, il ne tenait qu'à eux de rendre les choses plus facile non ? Bien sûr, c'était complètement utopique comme vision, mais maintenant qu'il avait choisit de rester à Nulle Part, il fallait bien qu'il se raccroche à quelque chose.

Spoiler:

Ca frappe à la porte. Des grands coups de poings désespérés. Janvier cogne contre la cloison, de toute la force de son petit corps. Elle se jette à moitié contre la porte et prie pour qu'on l'entende. Pour qu'on ne la laisse pas seule.

Elle n'a même plus la force de pleurer. Elle ne ressemble plus à rien. Une fille vide et épuisée. Les ronces l'ont traîné à travers la ville avant de la poser devant le commissariat. Tout son corps n'est plus que douleur. Elle renifle et frappe encore. Et elle hurle, d'une éraillée. " Clow ! Chancelier ! "

Rien. Plus rien n'a de sens. Juste la chaleur d'un corps humain. " C'est moi, c'est Janvier. " Elle arrête de frapper, laisse glisser son poing sur la porte et souffle plus bas. " Laissez moi entrer. Ouvrez moi. Ouvrez moi. "

Chancelier avait beau être le type le plus sympa du monde, il pouvait être aussi le plus injuste au monde. Même si c'était avec un ton dur et pas forcément aimable, il n'empêche qu'il s'inquiétait et essayait d'aider Clow. Il était gauche, mais il n'avait jamais fait ça avant - en tout, c'était l'impression qu'il en avait - alors normal qu'il se plante un peu en chemin. Et puis on ne devient pas exprès en relation humaine du jour au lendemain, dans une ville abandonnée et vivante.

Il lui avait cédé une heure, alors que Chocolat était quelque part en train de l'attendre, n'était-ce pas suffisant comme preuve d'attention. Non, sans doute pas. Clow ne pouvait pas comprendre le lien qui unissait Chancelier à sa douce Chocolat. Personne ne pourrait le comprendre sans doute. Mais la remarque que lui balança l'adolescent à la figure quand Janvier frappa contre la porte eu le pire effet possible.

Ah, vraiment ? C'est juste ça ? Je suis bon qu'à faire la potiche pendant que mademoiselle est absente ? Ah la jalousie ! En face de lui, Clow serrait maintenant Janvier dans ses bras. Une belle girouette ce gamin. Piqué au vif, Chancelier posa les feuilles sur le bureau et récupéra le sac dans lequel il avait fourré les vêtements et le passa par ses épaules. La seconde suivante, il avait passé la porte et avait descendu les quelques marches du perron.

▬ Puisque Janvier est rentrée, ce n'est pas la peine que je reste. Ça m'embêterais de gâcher vos cinglantes retrouvailles, et puis j'ai mon propre honneur. Servir de substitut ou de bouche-trou pour un ado en mal d'amour, je laisse ça aux autres. Parce que oui, là pour le coup, il avait vraiment eut l'impression de faire le bouche-trou. Clow lui avait vidé son sac, fait sa crise et maintenant tout est bien quand Mademoiselle Janvier revient ? La bonne blague.

▬ Ce n'est peut-être même pas la peine que je revienne. Le ton se voulait mesquin mais si Chancelier l'avait dit avec ironie, il n'en pensait pas moins. Il avait essayé de s’accommoder pour que tout le monde soit content, mais malgré tout, on le prenait pour une bonne poire.

Spoiler:

Elle se rit de leurs petites disputes insignifiantes. Si leurs nerfs lâchent pour si peu... Et bien s'ils lâchent, tant pis, tant mieux. Tant pis pour eux ! Elle se plie néanmoins une nouvelle fois à ses règles pour offrir à Janvier un nouveau fragment de son passé. Une petite sphère lumineuse qui vient se placer juste sous son nez...

HJ:

Janvier n'était plus qu'un pauvre petit paquet de nerfs en pelote, décoiffée et méconnaissable avec son visage hirsute et sa veste trop grande. Elle s'effondra dans les bras de Clow en pleurant misérablement sur son épaule reconnaissante et rassurée de retrouver la présence chaleureuse et protectrice de son prince charmant attitré. Elle grommela quand même entre deux sanglots mouillés " C'est...c'est pas drôle, Clow. " Et elle s'essuya le visage d'un revers de manche.

Elle entendit à peine le discours de Chancelier mais elle s'arracha de l'étreinte du roux pour s'affaler contre l'homme aux cheveux bleus et le serrer contre elle, sans cesser de pleurer. " Non. T'as pas le droit de nous abandonner. On a pas le droit de s'abandonner, on est en groupe, on est comme une famille. "

Petite fille qui cherchait du réconfort, elle cessa néanmoins de renifler pour murmurer, toujours contre Chancelier. " J'ai eu tellement, tellement peur sans vous. Vous comptez tellement pour moi. Ne pars pas Chancelier. Ne nous abandonne pas. " Sa voix avait des accents larmoyants et pathétiques. Elle grimaça en voyant le souvenir mais tendit tout de même la main pour le voir, alors qu'elle était agrippée à l'homme aux cheveux bleus.

Et la mémoire remonte lentement dans le petit crâne de Janvier... Lentement... Douloureusement.

Janvier:

Tu restes toujours immobile. Tu as peur. Seulement peur. De quelque chose. Tu ne sais pas quoi. Mais tu as peur. Tout ce que tu as fait n’avait aucun sens. Tu cherchais juste un peu de parole rassurante, de bras qui te serre bien fort et une voix qui te murmure des mots gentils, tout le temps, qui ne se préoccupe que de toi. Parce que tu as peur. Et que rien ne te fait plus peur que d’avoir peur. Mais ses trois amis, qui s’aiment fort mais qui se disputent aussi très fort, ils devaient être comme toi, aussi, avant. Avant de grandir, et d’être des gens confiants, de se sentir en sécurité ici. Il suffirait juste de les imaginer en gros lapin tout roses, tout mignon, et de les aimer très fort, et toi aussi tu grandiras, tu seras confiante et tu seras en sécurité.

Spoiler:

Lentement, alors que Janvier s'en allait dans le fond de sa mémoire, Clow la décrocha de Chancelier et l'installa gentiment sur les matelas posés au sol. Se dirigeant ensuite vers son ami, il lui sourit tristement :

«Je suis désolé, j'étais en colère contre toi et je voulais te blesser. Mais Janvier a raison Chancelier, nous sommes une famille et nous devons rester ensemble pour nous protéger. Surtout dans un endroit comme celui-là...Pardon. Je sais que tu dois aller la chercher et je ne vais pas t'empêcher de partir, mais dans ce cas s'il-te-plaît, ne nous séparons pas fâchés...»

Soupirant et le regard dirigé vers ses chaussures, le rouquin ajouta :

«Je t'aime beaucoup Chancelier, avec toi c'est plus facile, je n'ai pas besoin de prétendre être fort ou brave ou adulte. Janvier est adorable c'est vrai, mais elle n'en reste pas moins une fille hyper fragile devant qui je dois prétendre pour éviter la panique. Je ne suis pas en mal d'amour, tu sais ? Après tout, je t'aime toi, Janvier, Julia et même Gabriel. Même si bon hein, les filles c'est pas vraiment ma...heu...tasse de thé ?»

Il commençait sérieusement à s'éloigner du sujet, mais bon.

«Bref, tout ça pour dire, une fois que tu auras retrouvé Chocolat, ramène la, ici. J'ai hâte de voir la fille qui a réussi à attraper ton cœur aussi fort. Si tu vois les matelas contre le mur, ce sera un signe qu'on est parties explorer, mais qu'on essayera de revenir vivants...»

Souriant maladroitement, il se pencha en avant pour poser ses lèvres contre sa joue, murmurant :

«Reviens-nous vivant, s'il-te-plaît. On ne laissera pas cet endroit tant qu'il y aura une chance que tu revienne...Alors, reviens dès que tu le peux.»