Tout va bien se passer, nee ?

06h - 08h

Yokatta...

J’m’excuse.

Daijobuu, je suis contente que tu sois là !

N-nanda ?

... Nee, Crépy... Il ne faut pas faire de bruit, tu vas les réveiller...

Arimasen... Arimasen...

Ils étaient sortis ! Ils avaient survécu aux statues et aux pièges de la ville. Mais un souffle d’air frai les avait enveloppés dès leur sortie. Elle regarda West et lui sourit. Ils étaient sauvés. Si elle n’avait pas été si timide elle lui aurait sauté au cou. Mais elle l’était et elle ne fit que sourire. Elle regarda le ciel étoilé. Elle pouvait veillé sur elle maintenant. La joie fut de courte durée. Doucement les paupières de la jeune rousse clignèrent pour enfin se fermer totalement. Et son corps, sans tension, s’écroula sur le sol. Ses jambes flanchèrent, sa hanche tomba à terre puis son épaule non blessée. Elle était tombée sur le côté sauvant ainsi sa tête. A la lumière de la lune, à la lumière de la ville, dans ce ciel étoilé tant envié, elle s’était écroulée.

He wants to kill you…
Mieux qu’un réveille, cette mélodie dans la tête et cette parole. La seule parole dont elle se rappelle et qu’elle sait placer à l’endroit stratégique de la mélodie. Doucement d’autres arrivent mais ce ne sont que des bouts qui ne s’enchaînent pas. Ca l’énerve. Ca l’énerve de ne pas savoir la suite alors elle reste là, les yeux fermés, sur le sol. Elle est allongée sur le dos et elle ne comprend pas. Que sait-il passé ? Et cette chanson qui ne veut pas sortir de sa tête et qui l’empêche de réfléchir. Une voix s’élève à quelque centimètre d’elle. Il y a quelqu’un. Un hurlement de loup retentit. CRESCENDO ! La jeune rousse ouvre les yeux d’un coup et se retourne sur son épaule. Elle grimace de douleur. Il n’y a personne de se côté. La première voix s’élève à nouveau, grondant… le loup ?
Crescendo. Doucement la jeune femme se redresse et regarde autour d’elle. Le jour s’est levé sur la ville. Elle est étendue dans une rue, en plein milieu de la route. Elle regarde la blonde rapidement mais n’y accorde pas d’importance. Crescendo. Il y a des loups ici. Où es tu crescendo ? La blonde murmure, elle ne lui accorde toujours aucune importance. Maintenant sur ses jambes, Ombre cherche partout. Sa robe est toujours dégoulinante d’eau des anciens égouts et sa blessure lui fait plus mal qu’avant. Elle est pieds nue aussi. Elle a perdu ses chaussures avec West. Elle murmure.
« Crescendo es tu là ? »

Elle ne le voit pas, elle commence à paniquer. Crescendo où es tu? Je t’ai tant recherché, tant voulu. J’ai tant prié que tu sois en vie. Tout ça à cause de ces loups. Son regard tombe sur le louveteau. Ce monstre. Son cœur s’emplit d’une rage et d’une envie de vengeance. Elle tremble. Elle est à deux doigts de sauter sur le loup. Elle le pointe du doigt. Sa voix tremble de rage et de haine.
« Tu. Tu as tué mon ami ! Toi. Toi et ta bande ! Monstres ! »

Jamais au grand jamais elle n’aurait fait du mal à un animal. Mais cet animal av tué Crescendo. D’ailleurs s’est la première fois qu’Ombre admet oralement la possibilité que crescendo soit mort. Jusqu’à maintenant elle ne voulait le croire mais les loups sont bien vivants. Bien sur elle n’a aucune chance contre ce loup mais, ça elle ne le voyait pas totalement. Heureusement, un corps se redresse attirant son attention. Elle fusille du regard la blonde qui tient de compagnie au louveteau et se précipite vers la jeune femme qui vient s’éveiller.

Une main sur son épaule, qui tente de retourner son corps. Il aurait dû être bien trop lourd pour la frêle blonde qui retourne ainsi à moitié la brune. Seulement voilà, il l’est à peine. Tu sais, faudrait penser à manger. Mais la jeune femme préfère ne pas faire de bruit. Car à nouveau, elle est perdue. Incompréhension. Asphalte sous elle, vent frais sur son visage, chaleur humaine qui s’en retourne plus loin. Perdue ; encore. Alors, elle prend le parti de ne pas montrer qu’elle est éveillée. Après tout, dans cette ville, on ne sait jamais. Son corps se laisse retomber sur le flanc dans sa position initiale plutôt que de basculer sur le dos, achevant ainsi le geste de la jeune fille. Ce serai ainsi plus facile de se relever en urgence qu’échouée les quatre fers en l’air. Elle module sa respiration sur le rythme du sommeil, et attend, alors que les pas s’éloignent.

Profitant du silence tout relatif, elle repassa les derniers évènements en mémoire. L’éveil dans le train. Quand elle avait quitté la gare pour les maisons, et que le camé l’avait suivie. La gamine aux cheveux roses. Pourquoi l’avait-elle défendue ? La lame sur sa gorge. Le poids qui l’empêchait de respirer. Et cette mise en abyme de souvenir, le lit d’hôpital, et un jeune qui semblait être son petit frère. Ensuite un étrange silence avait pesé dans la maison, quand le blond avait fait irruption. Et après ? Quoi, entre le moment où elle s’était mise à fouiller le salon et son réveil ici ? Surtout, comment était-ce possible ? Elle lia le mauvais goût qui lui traînait en bouche, la rendant pâteuse, à une drogue ou autre. Une seule certitude : elle avait été endormie.

Doucement, une de ses paupières se leva. Une rue. Bordée du même genre de maison que celle dans laquelle elle était rentrée auparavant. Un peu plus loin, la blonde agenouillée à côté d’un silhouette rousse, elle aussi au sol, et très sûrement féminine. Apparemment, la brune n’était donc pas la seule à avoir subi ce traitement. Et surtout, il semblerait que cet endroit maudit était plus peuplé qu’il n’y paraissait. Cet endormissement avait-il été général ? Ces deux jeunes filles se trouvaient peut-être dans ce périmètre, et si un gaz soporifique ou autre avait été lâché uniquement ici, elle ne pouvait en tirer plus de conclusion. Tant pis. Elle reporta son attention sur le chiot qui semblait suivre la première éveillée, tandis qu’elle lâchait de temps en temps ce qui lui semblait être des mots en japonais. Et le chiot aboya. Hurla plutôt. Un louveteau. Génial. Et le reste de la meute allait suivre, aussi ? Une grimace se peignit sur son visage et resta inachevée, ses lèvres se pinçant seulement comme sur le coup d’une douleur. Ne pas se faire repérer. Pas encore. Soudain la rousse s’éveilla. La suite échappa à sa compréhension. Quelques mètres plus loin, une altercation éclata, sans qu’elle puisse en saisir les tenants et aboutissants. Ne pas attirer plus l’attention. Bien. Il était temps de se lever, une diversion ne serait pas de refus. Il était inutile de maintenir la comédie plus longtemps. Dans un geste qui aurait été parfaitement leste si sa tête ne lui tournait pas, elle se remit d’aplomb sur ses deux pieds, le regard brumeux. Réajusta la bretelle de son sac sur son épaule. Bien, au moins elle l’avait encore. Et enfin, détailla les deux jeunes filles. Celle qui s’était rapprochée allait nu-pied et semblait bien amochée. À l’épaule notamment. Et totalement paniquée, aussi.

▬ C’est quoi cette histoire de morts ?

Voix éraillée, comme beaucoup trop souvent depuis son réveil dans le train. Sourcil relevé en accent circonflexe. La brune a l’impression de se retrouver au beau milieu d’une pièce de théâtre, d’avoir atterri au beau milieu du règlement de compte général lors de l’acte final. Et ça ne lui plait pas. Du tout. Mais les deux en savent peut-être plus qu’elle. Elle, cherche à savoir. Autant essayer d’en apprendre plus. Elle se dirige alors vers la silhouette au sol, et lui tend une main, attendant qu’elle la saisisse pour l’aider à se relever. Le loup à côté ne semble pas représenter grande menace. Elle ne sait pas si un jour, elle savait comment se comporter avec un animal, mais un bon sens lui souffle de simplement l’ignorer. Le plus simple à faire, encore.

Gomene, mon petit Crépy... Je n'arrive pas à m'interposer, gomenasai... Ne l'écoute pas, tu n'es pas un monstre, tu es mon p'tit loup à moi, nee ?

Arigato gozaimasu...

... Tt...

Eto... Je m'appelle "Eka". J'ai un groupe normalement, mais je ne sais pas où il... Se trouve...

Et vous ? Vous... Vous appelez comment ?

You know you’re not safe here. You know you’re not safe here.
La brune se réveille donc. Un sentiment d’appréhension prend la jeune rousse. La nouvelle réveillée s’est moquée d’eux. Elle a tout entendu, elle a juste fait semblant de dormir. Sa phrase l’a dénoncée. C’est quoi cette histoire de morts. La jeune blonde au loup n’a pas fait attention. Elle parle et Ombre remarque à peine le changement de langue. Une indication sur son passé ? La langue semble asiatique, elle parle donc une langue venant de l’asie. Peut être y a-t-elle vécu ? D’ailleurs cela concorde avec son souvenir de sa mère. Elle avait bien un bol de riz sur les genoux avec des baguettes. Son estomac se serre, il y a des souvenirs qu’on n’aurait jamais voulu retrouver. Mais maintenant qu’elle l’avait, elle ne voulait plus le perdre. Elle regarde avec un œil mauvais la brune qui s’avance vers Eka. Était-elle donc folle ? Néanmoins il fallait lui répondre. D’un ton détaché elle dit :
« Boarf rien de très grave. Des loups nous ont sautés dessus. L’un m’a mordu et je ne sais ce qu’il est advenu de mon ami. »

La blonde semble en mauvais état aussi, appuyée sur une branche qui lui sert de béquille. Mais ça ne lui fait pas mal au cœur. La blonde la révulse. Non pas qu’à cause de ce louveteau. Quelque chose chez elle empêche Ombre d’être gentille comme elle l’est naturellement. La blonde se présente. Eka. Bien s’il elle veut. Elle dit qu’elle a un groupe, Ombre tique. Qu’elle idée de faire un groupe alors qu’à chaque moment on risque de perdre ceux avec qui on s’est accrochés. West, sa copine, Elle, Crescendo, Landscape, Violette. Qu’elle naïve ! ne peut elle s’empêcher de penser. Cette façon de penser l’étonne. Jamais elle ne s’est conduite mal envers quelqu’un. Jamais méchante envers quelqu’un. Sauf peut être ce fou qui a voulu tuer Crescendo. Mais Eka a quelque chose qu’Ombre ne pouvait accepter. Eka les questionne sur leur prénom. Froidement Ombre répond.
« Ombre. »

D’ailleurs elle n’a pas bougé de sa place. Alors que la brune a rejoint la blonde, Ombre est restée seule, à l’écart, loin de cette blonde. Elle les regarde. Tantôt avec de la gentillesse pour la brune, tantôt avec de l’animosité pour la blonde. Elle ne peut s’empêcher de penser au trio des totally spies. Une blonde, une rousse et une brune. Comment peut-elle se rappeler de ça et non du reste ? Doucement elle chantonne et sourit tout en regardant le sol, sa propre voix l’apaise.
« Super friends, super spies »

Cela sonnait tellement faux.

Étrange. Ce mot qui revenait, toujours. Incessant. Oppressant. Qui s’étendait, partout, ne laissait de place à rien d’autre. Que la tension. L’appréhension. Le danger. La peur. La peur qu’elle avait lue l’espace d’un instant dans les yeux presque trop bleus de la petite blonde. Tu sais, qu’elle se reflète dans les tiens. Qu’elle stagne, vicieuse, au fond de toi. Et elle détestait ça. Elle exécrait le fait de se sentir dominé par ce sentiment bestial. De se sentir faible, mais surtout impuissante. Oui, sans raison logique apparente, elle détestait cette expression. Ou plutôt, préférait la prendre de haut. Pour ne pas se haïr elle-même. Elle ne se le permettait pas. Sa main resta offerte au vide, le temps que la jeune fille se ressaisisse, et s’en saisisse. La brune la trouvait bien trop légère. Le souvenir acide de son reflet dans le miroir tira soudain ses lèvres vers le bas. Tu t’es vue pour parler ?

Encore cette langue. Elle n’y comprenait rien, mais se doutait qu’elle la remerciait, ce à quoi elle se contenta de répondre d’un sec hochement de tête. À croire qu’elle économisait sa salive. Lorsque la jeune fille vacilla, elle ne tenta rien pour la retenir ; l’aider à se remettre sur pied dépassait déjà ses attributions, apparemment. Baby-sitter pour ado ? Et quoi encore. Pour tout dire, ça la faisait chier, cette pitié en regardant sa cheville bandée. Même si elle gardait une expression neutre. Haussant à peine un sourcil intrigué en entendant la voix de la rousse, qui semblait se vouloir sans inflexion mais vibrait de haine, tremblait de peine, comme en écho. Les sourcils vinrent se froncer. Rien de grave ? Elle se mentait à elle-même si elle voulait, après. Not your problem. Mais autre chose. Elle a saisi son regard. Et il porte à croire que la rousse a compris, a remarqué son petit jeu de tout à l’heure. Bien. Au moins une clairvoyante. Même si elle pensait au départ ne pas être mise à jour sur sa tromperie en carton, ça avait eu le mérite de révéler quelque chose.

Elle se tourna à nouveau vers la jeune blonde. Des noms ? Le sien, d’abord. Eka. Même consonances que la langue qu’elle gazouillait depuis avant. Et Ombre. Ça paraissait cyniquement approprié. La jeune femme ressentait comme un creux. Des noms. La définition de l’être, ici. Une appellation choisie, et non imposée à la naissance. Et toi alors ? Tu choisis quoi ?

Rien.

Un Néant réel, presque tangible. Rien. Même un nom, un mot. Rien pour la cantonner à quelques lettres. Une forme de liberté. Disponible ici uniquement, citoyens ! Offre unique de Nulle Part ! Ne pas avoir de nom. Que l’on n’ait pas de prise sur elle. Oui, dans l’idée, ça sonnait bien. Sur le papier, c’était joli, tous ces embrouillaminis de grandes paroles, ces citations inconnues, ces réflexions alambiquées. Mais ne pas donner de nom auquel l’associer, c’était prendre le risque qu’on lui en impose un, un jour. Soit. Si quelqu’un restait assez longtemps dans ses parages, peut-être que ça allait arriver. C’était le seul risque. Elle le prenait. Un de plus ou de moins, ici. C’est donc investi d’une sorte de paix féroce qu’elle répondit, sa voix de retour à son état normal, à défaut de savoir s’il était habituel.

▬ Je n’en ai pas.

Point, retour à la ligne. Même pas un « pour l’instant » sous-entendu. « Bon OK on s’est retrouvées au même endroit mais c’est pas une raison pour faire ami-ami comme ça, je bouffe pas du même pain que vous siouplait. », et avec le sourire. C’était presque ça, toute l’arrogance en moins. Mais de la joie, presque. C’est fou ce que c’est bénéfique les monologues mentaux sans queue ni tête. Sans faire de bruit, à présent presque habituée à ses talons -bien que la jeune femme trouve toujours cela aussi inutile et encombrant-, elle rejoint Ombre, alors qu’elle regarde le sol, ses lèvres remuant, un filet de voix s’échappant de ses lèvres. Elle perçoit tout juste ses mots, alors s’approche, encore, se penche à côté d’elle, un peu trop grande. Jolie voix, mais qui sonne sans conviction. Elle soupire, se relève, pose sa main sur son épaule, un « Relève-toi » par le geste. Enfin, tu te retrouves un peu. C’est tout son corps qui se met en branle, ses mouvements qui lui reviennent. C’est peut-être parce que c’est le matin. Peut-être parce qu’à l’extérieur, l’ambiance lui semble à peine moins oppressante que la veille dans cette maison. Elle ne sourit pas. Mais vit, tout simplement.

▬ Bien. Je ne sais pas vous, mais je ne compte pas m’éterniser ici. L’une de vous deux connaîtrait les points stratégiques de la ville ?

Retour aux occupations primaires. Mine de rien, au moins depuis ce matin à son arrivée dans le train, elle n’a rien bu. Elle peut encore se passer de nourriture, pour quelques temps. Mais pas bien longtemps ; elle a trop peu sur la peau, ne sait pas à quand remonte son dernier repas d’avant, et ce sommeil imposé ne lui a apporté aucun repos. Juste un engourdissement qui s’accroche à ses membres, tant bien que mal. Et elle veut trouver. Les raisons, le pourquoi le comment. Ici, il n’y a rien. Asphalte et ciel. Elle doit partir. Seule ou avec les deux jeunes filles. D’ailleurs. Elle pointe le menton vers Eka.

▬ Tu penses pouvoir marcher ?

De toute manière, elle veut retrouver son « groupe », non ? Bien que cette notion lui semble idiote, dans cette Ville qui se joue d’eux, les déplace sur son échiquier pendant la nuit, les sépare et les rassemble. Tant pis. Pour l’instant, ça dessert ses intérêts. Depuis quand es-tu aussi calculatrice ?

Je n'étais pas d'un caractère à détester tout le monde, du moins depuis que je suis arrivée dans cette ville. L'idée d'haïr quelqu'un m'était totalement inconcevable. J'aimais offrir sans attendre le moindre retour, sincèrement. Savoir que la rousse ne me portait pas dans son cœur me faisait énormément de mal, bien que je sois en faute. J'avais vite compris que par le passé j'avais été horrible avec, et je m'en excuse... À moins que... Cette haine soit méritée ? Non, non. Je n'étais pas en droit de penser de telles choses. Personne ne mériterait de subir ce genre de chose. Il y avait réellement de bonnes pensées dans les plus mauvaises personnes, j'en étais assurément convaincue. Néanmoins... Quand je voyais la lueur haineuse de ses yeux lorsqu'elle me dévisageait, je ne pouvais m'empêcher de songer à mon propre regard dans mon souvenir.

Non, je t'en prie. Ne deviens pas la fille que j'étais par le passé ...

Je ne désirais plus les suivre. J'avais vite décelé la pitié dans le regard de l'une, et la haine dans celui de l'autre... Et s'il y avait bien une seule chose que je ne tolérais pas depuis que j'étais ici ... C'était de prendre quelqu'un avec de la pitié. Daikirai da. Les mots fusèrent, tout seul malgré moi dans ma tête : j'allais me débrouiller. Non. Là, j'avais ce genre de pensée parce que j'étais vexée du jugement de la grande brune. D'ailleurs, rien n'était vérifié, peut-être était-ce moi qui me faisais des idées car je ne la connais pas, c'est d'ailleurs fort probable. Non seulement je n'avais pas confiance en moi, mais en plus j'accordais difficilement ma confiance à mes coéquipières temporaires - non, je ne les considérais même pas comme. Que de simples connaissances, rien de plus. Ma troupe me manquait déjà horriblement... La brune nous demanda si on connaissait un point stratégique de la ville, alors, pour ne pas être impolie, je pris la parole :

Il y a bien la fontaine, je sais où elle se trouve ! Elle mène vers les rails du métro abandonné et ... Non, rien

... Et le zoo. Mais qui dit zoo ; dit loup. Et il semblerait qu'Ombre ait un différend avec ces derniers. Par réflexe, je pris Crépuscule dans mes bras, collant ma joue contre la sienne, poilue mais douce. Je voulais retrouver Fire... Et June...

Et Matt.

On me demanda si je pouvais marcher. Mouvement de recul de ma part, Crepy en descendit de mes bras. Non, je n'avais pas du tout confiance en elles. Mais malgré tout, mon geste n'était nullement intentionnel. Serrant mon bâton dans ma main, je dis pour être honnête :

Assez pour me débrouiller par moi-même, ne vous occupez pas de moi... Ça ira. Je ne veux pas être un poids...

Ça, c'était dit. Vivement qu'on arrive à la fontaine, je trouverais une solution pour retrouver Matt et les filles, je n'étais plus un bébé. Je commençais à partir en tête, autant partir maintenant, cette rue semblait sans fin.

Run baby run. This world is not made for you
Doucement la fille sans prénom s’approche d’Ombre. Cette dernière ne relève pas la tête car perdue dans sa chanson elle n’a rien vu. La main qui s’abat sur son épaule la fait trembler. Elle ne l’avait vraiment pas vu. Elle lève la tête vers la jeune femme. Cette dernière ne sourit pas, ne la regarde pas. Ombre sourit. Merci. pensée qui ne franchira jamais ses lèvres. La femme aux cheveux noirs demande s’ils connaissent un coin stratégique. Ce à quoi la blonde répond que la fontaine semble en être un. Ombre réfléchit. Elle ne connait pas la fontaine et elle a l’impression de ne rien connaître sur la ville. Sentiment désagréable. Surtout que cette blonde en sait plus qu’elle. Soudain son esprit s’éclaircit. Si ! Elle sait des choses. Un éclair de peur passe dans ses yeux.
« Jamais. Au grand jamais n’allez dans les souterrains de la ville. Les deux fois où j’y suis allée j’ai crû que j’allais y rester. »

Puis la femme demande à la blonde si elle peut marcher. Ombre sourit méchamment. Bien sûr qu’elle peut. Elle l’a bien fait jusque là. Et puis c’était elle qui voulait traîner avec les loups hein. C’était de sa faute. D’ailleurs, la blonde a dû lire dans les pensées de la rousse car elle explique qu’elle peut s’en aller d’elle-même. Bizarrement Ombre n’est pas soulagée que la brune reste. En fait elle aimerait que la fille sans prénom s’en aille aussi. Elle a besoin de se retrouver un peu. De retrouver la ville. Mais si la femme reste et bien tant pis. De son côté Ombre doit avancer, elle doit partir. Chercher Crescendo. La trouver. Comprendre. Et si elle ne bouge pas elle ne trouvera jamais rien.
"Je vais avancer aussi. Il faut que je trouve des choses qui débloqueront des souvenirs. Ne pas savoir me rend folle. Et faut que je retrouve Crescendo aussi. "

La rousse se tourne dans la direction inverse d'Eka. Hors de question de faire le chemin avec elle. C'était à la brune de choisir maintenant. Ombre sourit à la jeune femme. Puis attendit de voir où irait la brune. Une nouvelle chanson s'installe dans les pensées de la jeune femme.

La fontaine, hein ? Et les rails du métro. Deux informations dont elle ne pouvait vérifier l’intérêt, mais qu’elle garda bien ancrée quelque part sous son crâne, en attendant qu’elles puissent devenir utiles. Lorsque la blonde fut coupée dans son élan, la jeune femme arqua à nouveau un sourcil. Et ? Et quoi ? Le regard lancé en diagonale à la rousse ne passa pas inaperçu. Elles ne semblaient pas se connaître, pourtant. Alors, qu’est-ce-qui la poussait à taire un détail supplémentaire ? La brune s’égarait dans un raisonnement futile. Elle s’en rendit compte. Eka quittait déjà l’emplacement où elles s’étaient réveillées, de toute manière. Et ça ne la concernait pas. De la fatigue, peut-être. Oui. Mais il n’était pas temps de prendre du repos. Pas encore. Et pourquoi ce mouvement de recul ? Elle faisait si peur que ça ? Elle se retint de pouffer. Oui, décidément, ce trop-plein de bonne humeur, quelque chose n’allait pas. La peur qui la taraudait depuis son arrivée semblait s’être muée en hystérie.

La brune se donnait vaguement l’impression d’avoir trop bu. C’était pourtant impossible ici. À moins que pendant son sommeil, quelque chose quelque part se soit amusé à lui injecter de l’alcool dans les veines, mais… Injecter. Son souvenir remonta à la surface. Tout ce qu’elle avait rejeté de toutes ses forces. Le monde bascula. Les paroles d’Ombre ? Elle ne les saisissait pas. Tremblante, alors que la jeune fille lui tournait déjà le dos. Elle passa une main sur son visage. Releva la tête juste au moment où elle lui adressait un sourire. N’eut que la force de lui en renvoyer un amer en retour.

▬ Va.

Elle n’avait rien d’autre à lui dire. Elle préférait commencer à explorer les lieux seule. Surtout, en l’instant présent, elle avait le besoin d’être seule. Sans que personne ne la voie, que personne ne la gêne, ne la regarde, ne lui parle. Juste le temps qu’elle enfouisse à nouveau cette vision du passé au plus profond d’elle-même. Juste le temps de bander cette plaie, juste pour l’ôter de sa vue. Elle ne voulait pas la subir. Juste l’oublier. Rechercher son passé ? Ce serait retourner le couteau dans la plaie. Cette amnésie, c’était un nouveau départ, aussi glauque soit-il. Peut-être n’aurait-elle dû penser qu’à partir d’ici. Cela faisait partie de ses préoccupations. Mais tant qu’à faire, autant comprendre la raison de sa présence, de celle des autres.

Elle resta plantée au beau milieu de la rue, dos tourné à Ombre, bras croisés sur sa poitrine dans laquelle une douleur fantôme persistait.

▬ Saleté…

Un rictus vint déformer ses lèvres. Elle n’entendait déjà plus les pas d’Eka, sa fine silhouette boitillait, accompagnée du louveteau. Ceux d'Ombre ? Elle n'était pas sûre de les entendre. Partie ou non ? Au fond ça ne relevait pas d'elle. Si elle s'était déjà éloignée, tant mieux. Ne serait-ce que pour aligner deux pensées, elle avait besoin de ce silence presque macabre qui régnait. Enfin, la brune releva la tête. Le soleil matinal lui fit plisser les yeux. Rien ne tournait rond, ici. Qulqu'un tirait les ficelles, elle en était persuadée. Comment tout expliquer, sinon ? Des loups, des fous, un train qui venait de nulle part et y restait, et pourtant, il semblait que de nouveaux arrivants se réveillaient dans la gare, à chaque fois. Car ces deux jeunes filles semblaient être arrivées bien avant elle. Aucune raison que le flux s'arrête donc. Quelqu'un coordonnait le tout, c'était impossible autrement.

Ne me demandez pas ce qui commençait à se tramer dans sa petite tête à ce moment précis, je préfère ne pas le savoir.

▬ C'est comme ça que tu fais les choses, alors ? Tu nous poses comme pièces, sans même nous demander notre avis ? Elle marqua une pause, écarquilla ses yeux gris foncé. Sa voix se fit doucereuse. Je te boude, alors. Ou mieux, je te déclare la guerre.

C'est bien beau les échecs. En attendant, un petit soldat de plomb avait décidé de s'inviter sur le plateau de jeu. Il avait juste oublié qu'une guerre sans arme, c'est, au bas mot, du suicide. Il ne savait pas s'il attendait vraiment une réponse de l'ennemi. En tout cas, il ne voulait croiser personne un petit moment. Retourner aux bâtiments des civils peut-être. Il était toujours affamé.

HJ:

Ēkā semble se diriger vers la Fontaine, heureusement pour elle, elle retrouve son chemin et sort de la Rue sans Fin. Mais quand Ombre marche vers un chemin inconnu se doute-t-elle qu’elle va se retrouver au Conservatoire ? La Rue sans Fin est imprévisible si bien que lorsque Noan suit le chemin d’Ombre elle ne se retrouvera pas près du conservatoire comme Ombre, non la Rue a changé d’avis entre temps. Et elle laisse découvrir à Noan le Commissariat.

Spoiler:

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