Ils avaient suivi les traces, les petits curieux. Et cela les avait menés dans les égouts. Dans les égouts ils se retrouvent devant une porte aux étranges reflets bleu fluorescent. Une porte sans poignée. De derrière leur vient une voix, mais les paroles sont étouffé et incompréhensible.
Alors qu'allez-vous faire ?

Suivre les traces. L'idée lui avait parut farfelue et bizarre. Suivre des traces qui pouvaient vous mener droit dans un piège comme des proies dociles et naïves. Il avait hésité. A présent, tout ce qui semblait être trop évident lui apparaissait comme une mascarade, un tour de cette Ville étrange pour les plonger dans les abysses de l'horreur. Mais Ombre semblait y tenir alors en silence, il avait attrapé sa main et s'était efforcé de suivre les pas lumineux.

Ils s'étaient enfoncés dans la ville. La pluie avait cessé de tomber mais l'air restait encore humide. Ses bottes de cow-boy écrasaient les flaques d'eau en mouillant son slim plus qu'il ne l'était déjà. Et dans la pénombre, les deux jeunes gens étaient guidés par des traces. Normal quoi. Des traces qui brillent dans le noir et qui disent "Suivez nous, on connaît la sortie." C'te blague. songeait-il, inquiet. La petite paume chaude d'Ombre dans la sienne le réconfortait un peu. Seul, il aurait probablement fait demi tour. Mais la rouquine semblait savoir où elle allait.

Il ne parlait pas. Il n'avait rien à dire.

Les loups rôdaient peut être encore dans les environs et il n'avait pas envie que les bruissements de leurs voix puissent les attirer. Il n'y connaissait rien en bestioles, West, sinon il se serait sans doute rendu compte que leur seule odeur suffirait à les faire venir. Le jeune homme ne marqua une pause que lorsque les traces s'arrêtèrent face à une bouche d'égout. Il jeta un coup d'oeil interrogatif à Ombre et demanda. " Tu veux vraiment continuer ? " Devant sa réponse, il plissa les sourcils et s'accroupit pour se mettre en devoir de soulever la plaque. Les muscles de ses bras se raidirent alors qu'il déployait un effort colossal pour la faire bouger. Bien. Il n'était pas sportif. C'était bon à savoir. Enfin, il réussit à la poser sur le côté. Dans l'eau sale, les traces brillaient toujours. " Après toi..." grommela-t-il.

Il sauta. Ce n'était pas profond. Plock, firent ses bottes dans l'eau crasseuse. Il fit une moue. Elles allaient être fichue après ce séjour dans ce lieu humide. L'eau lui arrivait aux genoux. L'endroit avait une odeur repoussante et il n'avait aucune envie de mettre sa main dans l'eau pour voir ce qu'elle pouvait contenir. Leur seule source de lumière était les traces. Toujours les traces. Elles finissent par s'arrêter pour de bon. Devant une porte. Une porte sans poignée aux étranges motifs fluorescents. Il déglutit, sceptique. De derrière vient une voix, un chuintement, un murmure. Il regarde à nouveau Ombre. Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ?

La porte frissonne au contact de la paume de la jeune fille. Elle frissonne et semble glisser comme un serpent. Pourtant quand on la regarde elle n’a rient d’exceptionnelle. Elle semble couiner, oui au sens propre du terme, la porte couine puis s’ouvre. Dévoilant une salle plongée dans l’obscurité. Des runes brillent d’une couleur bleuté recouvrent les murs et percent difficilement de leur lueur, l’épaisse brume noire environnante. Le sol est lisse et chaud. Le plafond paraît haut, étonnant pour un lieu se trouvant dans les égouts. Au dessus d’eux il y a des battements d’ailes, une silhouette d’oiseau gravée de runes se déplace. Les battements cessent. Une voix intervient.

-Les curieux se sont égarés ? Viennent-ils se réfugier d’Elle ?

Il y a un ricanement et la couleur bleuté des runes devient d’une couleur rouge. La voix reprend :

-Mais il n’est pas bien d’entrer dans notre repère sans nous demander l’autorisation.

Un claquement sec résonne alors dans la pièce. La porte est fermée, les deux jeunes ne peuvent plus sortir. Par là en tout cas.

Cet endroit est définitivement bizarre. Il pataugeait les pieds dans l'eau en grimaçant. Heureusement que ses bottes étaient étanches. Il n'avait pas remarqué la robe d'Ombre sinon sans doute aurait-il eut une once de compagnie pour l'eau gelée contre les jambes nues de la rouquine. Ou pas. Il ne savait pas s'il devait lui en vouloir de l'avoir entraîné dans une pareille aventure. Suivre les traces, la belle affaire. C'te connerie... La bouche plissé et les sourcils froncé, il guettait la porte. Toutes les fibres de son corps lui hurlait de faire demi-tour.

Sauf qu'Ombre lui tira la main. Il la suivit, réticent certes mais pas lâche au point de laisser la demoiselle s'aventurer toute seule derrière la mystérieuse porte. Il entra. Et cligna plusieurs fois des yeux. C'est quoi. Cette. Merde ? Des runes bleus fluos partout, une brume noire et épaisse. Un mauvais trip. Il chercha ma sortie du regard. Porte fermée. Putain.

Il déglutit difficilement prêt à répondre à la statue qui venait de parler. Normal. Tout allait bien. Très bien. Sans le vouloir, sa main serra davantage celle d'Ombre. Il avait peur. Lorsque le décor vira au rouge il sursauta. Mais il lui sembla perdre tout à fait ses moyens lorsqu'Ombre se mit à parler. Mais à qui parlait-elle bon sang ? A qui ? Pour quoi ? Il n'y comprenait rien. Son coeur battait la chamade, il avait trop chaud. Fuir. Chercher une sortie n'importe où, abandonner Ombre s'il le fallait. Il était lâche, West. Et en l’occurrence, il pensait que la rouquine pourrait très bien se débrouiller seule. Bon sang, pourquoi l'avait-il suivie ?

Cette fille est folle. Elle va nous tuer. Voilà ce qu'il pense alors que ses yeux verts l'observent horrifiés. A sa dernière réplique il prend la parole. Sans réfléchir.

" J'ai rien demandé. Laissez moi partir. " Il aurait volontiers ajouté " c'est sa faute, gardez la, faîtes en ce que vous voulez mais laissez moi sauver ma peau." mais sa gorge sèche lui empêchait ce long discours.

Lâche. Et alors ? La fin importe les moyens.

Les battements d'ailes deviennent plus rapide au fur et à mesure que le volatile s'approche d'eux. D'un geste gracieux et léger, il s'affiche devant le visage de l'adolescente et un nouveau ricanement se fait entendre dans la pièce. Les runes changent à nouveau de couleurs, comme si elles étaient en harmonie avec la voix et ses ricanements.

- Tu penses qu'Elle va t'aider ? Mais tu es chez nous ici. Elle ne t'entendra pas, ni toi, ni tes caprices.

L'oiseau fit claquer son bec puis se posa lourdement sur la tête du garçon. Les deux semblaient aussi apeuré l'un que l'autre, mais le garçon était visiblement le moins courageux.

- Tu veux partir ? Mais tu es entré. Si tu ne voulais pas, il ne fallait pas. Maintenant que tu es là, tu ne peux plus sortir. Fit-il la voix, hachée par un claquement de bec. L'oiseau s'envola à nouveau et dessinait de grands cercles autour de ses deux proies. Elles étaient entrées alors qu'elles n'en avaient pas le droit. Pour sortir, ils faillaient qu'elles respectent les règles.

- Entrer n'est pas facile, mais sortir l'est encore moins. Jouons et si vous gagnez, je vous laisserais peut être sortir. Sinon... Un ricanement se fit à nouveau entendre. Les runes qui couvraient les mur se changèrent en un blanc intense avant de s'éteindre, plongeant à nouveau la pièce dans le silence. Plus de battements d'ailes, ni de ricanements, l'oiseau s'est tu.

Une sueur froide et désagréable coulait le long de son dos. Un violent frisson parcourut son échine lorsqu'il entendit l'oiseau parler à nouveau. L'oiseau parler. Cette réalité invraisemblable avait quelque chose de dérangeant et de particulièrement terrifiant. Il ne comprit pas ce qu'il disait. Pas plus qu'il n'avait saisit le baratin qu'avait prononcé Ombre de sa petite voix fluette. West n'y faisait pas attention. West voulait juste sortir.

Elle crie. Elle lui dit de le laisser partir. Il aimerait approuver en hochant vigoureusement la tête mais voilà que quelque chose vient se poser sur le haut de son cuir chevelu. Panique. L'oiseau est sur sa tête. Sur sa tête. Il se mit à reculer en exécutant de grands mouvements des bras pour chasser le volatile. Il se heurta au mur dans son geste et tomba sur le sol. Le souffle court et le coeur battant, il regardait la pièce.

Elle était devenue blanche. L'oiseau a parlé d'un jeu. Un jeu pour quoi ? Pour sortir ? Il sent les larmes affluer à ses yeux. Il se sent faible, lâche et misérable, incapable de prendre une décision rationnelle. Assit sur le sol, il ramène sa tête dans ses genoux et passe une main dans ses cheveux. Il est désespéré. Apeuré et désespéré. Il aimerait gémir, rester ici toujours et attendre que quelqu'un d'autre prenne les choses en main. Ce quelqu'un d'autre, c'est Ombre. Ombre la petite jeune fille, la rouquine aux allures de gamine. Ombre prend la parole et dit qu'elle va essayer le jeu.

Il relève la tête. Inspire un grand coup et réponds. " Moi aussi. "
Sa voix tremble. Elle ne lui plaît pas. Il ne se reconnaît pas.

Bein alors West ? Les évènements te dépassent ?