Sifflement admiratif, prunelles émerveillés, pas lents quand devant eux se profilent les maisons vides, imposantes demeures de pierres autour desquels –dans lesquels ? – la nature semble avoir repris ses droits, tapissant les murs et les pavés de végétation ma foi florissante, et surtout souveraine. Effectivement, pas de bruit venant ses bâtisses semblant abandonnés, pas un seul gamin jouant au ballon sur un seuil, rien. Rien que Mitaine aurait sans doute dû trouver inquiétant si tout ici n’était pas subjuguant, attirant, intriguant.

« God… »

Soupire rêveur quand elle lâche les doigts de Caruso, le devançant un peu, sans savoir où donner de la tête. Devrait-elle entrer dans une maison ? Continuer ? Crier, chercher, revenir sur ses pas ? Elle hésite, bouffe le décor du bout des iris, peut-être trop curieuse pour son propre bien.

« Eh, Curso, qu’est-ce que tu crois qu’on devrait faire ? »

La question est lâchée sur un ton légèrement absent, alors qu’elle accélère brusquement la cadence en l’apercevant. Le commissariat. Imposant, silhouette délabré, venant d’un autre temps. La brunette se demande brièvement où elle a bien pu atterrir, baisse la tête, capte un éclat… Bleu ? Une, c’est bien ça, un éclat –une mèche.. ? d’un joli bleu roi attire son regard, le monopolise soudainement. Puis elle approche, plus ses doutes se confirment. Vivant. Ce truc bleu appartient à un être vivant.

Vivant et manifestement féminin de surcroît. Mitaine s’accroupit en souplesse, sur à côté de la demoiselle, la retourne sur le dos, avec un manque évident mais involontaire de délicatesse. Elle est trop excitée à l’idée d’enfin avoir des explications, aussi la bombarde-t-elle se questions malgré son inconscience.

« Mademoiselle ? Hé ho, Mademoiselle ! Ca va ? Vous savez où nous sommes ? Mademoiseeeelle ? Réveillez-vous ! J’ai besoin de réponses, voyez ! Oh mais qu’est-ce que vous vous êtes fait à la tête ? Vous avez mal ? Vous croyez que je peux vous aider ? Je me souviens de rien, et je suis arrivée par un train ! Eeeeh oooh, Mademoiseeeeeelle… »

Aieuh... Ses tympans bourdonnent et sa tête abrite un véritable marteau piqueur. Si bien qu'elle ne comprend absolument pas les paroles de la jeune fille qui vient de vivement la retourner sur le dos... Elle a envie de fermer les yeux, d'oublier encore, de s'abandonner dans ses rêves où elle retrouve LSD... Mais la voix l'en empêche. Une voix enjouée, pétillante, pleine d'entrain. Une voix qu'elle n'entend pas pour la première fois...

Alors elle lève les yeux vers la jeune fille brune qui se tient au dessus d'elle, lui cachant le soleil. Mais le soleil est là pourtant. Juste à la place de son sourire, ce sourire qu'elle a déjà vu près de la fontaine. Il y a même les étoiles, au fond de ses yeux chocolat qui un jour lointain se sont posés sur elle, dans une rue bondée, sous la pluie.

Merde mais qu'est-ce qu'elle fait là... Elle a pas le droit d'être ici... Pas le rayon de soleil. A cette pensée, Pâques comprends qu'elle s'est perdue elle-même. Parce qu'elle a été comme cette fille non ? Si, au début, en sortant de la gare avec LSD, elle devait lui ressembler un peu. Énergique, vive, curieuse, heureuse de vivre... Et maintenant elle est là, brisée, gisant sur le sol, anéantie par un passé trop lourd à porter et une absence cruelle... Elle refuse que le rayon de soleil finisse comme elle...

Quand sa raison lui dit de la faire fuir, son coeur en décide autrement. Elle a besoin... De tendresse. D'affection. De protection. Parce qu'au fond, elle ne sera jamais comme Novembre. Même dans ses souvenirs de dealeuse elle ne lui ressemble pas. Alors elle attrape la cheville de la jeune fille et tire dessus pour la faire tomber sur les fesses et tirer sa jambe qui s'étend sur le sol.

Lentement, elle lève la tête et la pose sur le mollet du rayon de soleil. C'est chaud et confortable. Ça fait du bien. Alors elle sourit. Elle plante ses yeux dans ceux de la quasi-inconnue et lui demande, la voix vibrante d'espoir :

" Dis, je peux rester avec toi un peu ? S'il te plaît... "

Elle courut après le petit garçon qui c'était enfuit tel un sauvage. Elle courut, encore et toujours mais elle l'avait perdue de vue. Elle lâcha un soupire. Elle avait courut sur le quai et avait parcourut quelques rues et ruelles sans savoir vraiment où il pouvait être. Prise d'une inquiétude maternelle, elle regardait à droite à gauche mais rien. Elle ne connait pas cette drôle de ville et en plus de ça... elle est perdue ici. Superman avait disparut. Sirius regarda autour d'elle sans comprendre vraiment ce qui lui arrivait. ▬ Superman ! Superman ! ▬ Hurla-t-elle espérant qu'il viendrait vers elle. Mais rien. Inquiète, elle avance dans la rue et finit par atterrir devant plein de maisons abandonnées. Cette ville est donc déserte... Elle n'y comprenait pas grand chose. Elle n'y comprenait même rien. Elle sait juste qu'elle avait perdu Superman et qu'elle c'était perdue par la même occasion.
Elle avance donc sans but précis... elle veut retrouver ce môme un peu turbulent... la brune s'inquiète tellement pour lui... Ce garçonnet ne se rendait pas compte à quel point elle pouvait s'inquiéter et au fond ça l'énervait un peu. Elle soupira d'énervement et finit par regarder le soleil qui était apparut il y a peu puisqu'il n'était pas encore très haut dans le ciel. Elle garda sa veste sur elle et continua sa route.

Peu de temps après, elle vit des silhouettes sur le sol. Elle alla vers elle, peut-être qu'il y avait Superman dans le lot... qui sait ? Elle courut espérant voir le garçonnet mais elle ne vit que deux jeunes filles. Une avec les cheveux bleu et une autre brune. Elle leur sourit avec un petit air déçu ▬ Salut. Je suis Sirius et vous les filles ? ▬ elle essaye d'installer une atmosphère détendue car c'était un peu bizarre de se présenter sous le nom d'une étoile. Mais si Superman, Innocence et elle même n'avait plus de souvenirs... alors elles n'ont plus devaient pas en avoir. Enfin, c'est ce qu'elle se disait.

Le geste de la schtroumphette la surprend. Elle a l’air gauche et blessée, comme un oisillon tombé du nid, aussi Mitaine est intriguée par l’initiative qu’elle prend la forçant à s’asseoir, pour ensuite caler son crane contre sa cuisse, souriante.

« Dis, je peux rester avec toi un peu ? S'il te plaît... »

Sa voix est vibrante d’espoir et la brune se surprend à la fixer, interdite. Elle a l’impression, vague, à peine perceptible, de l’avoir déjà vue quelque part. Elle n’en garde aucun souvenir, mais la sensation est bien là, diffuse, courant d’air qui l’étreint le temps d’une fraction de seconde quand elle la regarde, fascinée.

Cette fille est étrange. Elle a l’air si fragile que Mitaine en ressent comme une pointe de pitié, mais d’un autre côté… D’un autre côté, elle est fascinante. Comme tout ici, d’ailleurs, avec ses cheveux bleus et ses phrases inattendues. Inattendues, mais pas troublantes, pas pour elle, en tout cas, qui, lassée de son immobilité un peu trop prolongée à son goût, pose doucement la tête de la blessée sur le pavé en se relevant d’un bond, sourire de nouveau accroché aux lèvres.

« Si tu veux, ouais, tu peux rester avec moi. Mais tu sais je suis perdue et amnésique, alors j’aurais besoin d’infos. T’as l’air d’être là depuis plus longtemps, je me trompe ? Et puis t’es blessée, tu t’es fait ça comment ? Tu te souviens de quelque chose, toi ? Oh et puis ! J’ai un sablier sur moi… Jusque là, normal, quoi, mais il continue à s’écouler dans le sens initial même quand je le retourne ! T’as ça, toi aussi ? Si oui, tu sais ce que c’est, au juste ? »

Pendant sa tirade, elle s’époussète, sautille pour remonter son pantacourt sur ses hanches, attend que Mademoiselle cheveux bleus [ma marque de fabrique] décide de se relever. Finit par entendre ses bruits de pas précipités, lève la tête, espère voir Caruso, déchante vite.

Devant elles se dresse une jolie jeune femme, plus âgée et légèrement essoufflée, un peu déçue peut-être quand elle les aperçoit. Ses cheveux ondulent et cascadent, libres, au creux de ses omoplates, alors que ses lèvres d’étirent en un sourire légèrement contrit quand sa voix retentit, détendue malgré tout.

« Salut. Je suis Sirius et vous les filles ? »

Elle lui sourit en retour, enjouée, et répond presque du tac au tac en essayant de soulever sa toute nouvelle compagne de fortune, qui ne semble pas décidée à bouger. Elle se baisse et glisse son épaule sous une aisselle à portée, se relève laborieusement, jambes flageolantes – pas qu’elle soit particulièrement lourde, mais elle-même possède la corpulence d’un moineau, alors…- glisse sa paume au creux des reins de l’autre, pour la soutenir un peu mieux, finit par enrouler son bras autour de sa taille gracile.

« Hello, Sirius ! Moi c’est Mitaine, t’as l’air d’avoir couru ! Tu cherches quelque chose ? C’est dément comme cadre, tu trouves pas ? Oh, et, tu te souviens de quelque chose, toi ? Parce-ce que moi et le garçon avec qui je suis arrivé, on se souvient de rien. Vous êtes arrivés avec nous, par le train ? On venait de New York, c’est ça ? Tu peux venir m’aider à la soutenir, ‘steplait ? Elle est légère mais je te cache pas que j’ai du mal, là. D’ailleurs, Little Miss Blue Hair, c’est quoi ton petit nom, à toi ? Veux bien qu’on reste ensemble, mais faudrait que je sache comment tu t’appelles ! »

Le regard du rayon de soleil se perd dans le sien et soudain Pâques comprend qu'elle ne se souvient sans doute pas d'elle. Et ça lui fait mal au coeur. Parce que cette fille, c'est le seul rayon d'espoir qui ait illuminé son passé. Quand elle la repousse et se lève, le coeur de Manaphy se serre dans sa poitrine et elle ferme les yeux pour ne pas se mettre à pleurer.

Elle pose des questions. Trop de questions. Et puis elle veut pas dire comment elle s'est blessée parce que si elle parle de son Géant, elle va fondre en larmes. Et oui elle se souvient, mais ça non plus elle ne veut pas en parler parce qu'elle, elle ne se souvient pas et ça fait mal, très mal. Là, elle veut juste... Retourner avec Novembre. Il la secouera un peu, ça ira mieux et elle pourra retrouver LSD sans lui faire peur et le faire paniquer. Elle pourra se retrouver.

"Salut. Je suis Sirius et vous les filles ?"

Perdue dans ses pensées, elle ne l'a pas entendue arriver. Mais elle aime bien la couleur de sa robe. Et puis elle est grande et belle... Pas comme elle, allongée sur le sol, la tête ensanglantée, engourdie dans une vague de tristesse, en proie à la perdition. Si Novembre était là il se moquerait d'elle, la traiterait de gamine, partirait devant en haussant les épaules, sachant très bien qu'elle se lèverait pour le rattraper...

Soudain, elle sent le rayon de soleil qui la soulève avec difficulté et elle essaye de tenir sur ses jambes. Mais elle veut pas de sa pitié. Pas si elle ne se rappelle même pas. Elle se débrouillera toute seule. Et puis il lui faut la fiole. Elle doit pas oublier la demande du Chat. Allez gamine, secoue toi ou crève mais fais quelque chose !

Les paroles du rayon de soleil résonnent dans sa tête, et quand elle l'appelle "Little Miss Blue Hair", quand elle lui demande son prénom, Pâques sent les sanglots monter dans sa gorge. Trop c'est trop. Elle se laisse gagner par la rage qui revient, comme après son second souvenir. Rage contre sa mémoire défaillante, rage contre son noir passé, rage contre son présent qui ne lui offre même pas la chance d'éclairer sa vie et de rattraper ses erreurs.

"Tu veux pas savoir qui je suis, tu te contentes de me regarder dealer de la drogue et de me dire que c'est mal avant de t'évaporer dans la foule en me laissant dans la merde..."

Pâques enrage, elle a mal, elle devient comme Novembre... Elle se dégage de l'étreinte de la fille et commence a marcher, lentement, très lentement, ses mains prêtes à la rattraper à chacun de ses pas titubant.

Spoiler:

Sirius arrive et à sa question, la brunette lâche un flot de paroles. Tout s'enchaîne vite et elle assimile les informations au fur et à mesure. Son souffle est redevenu régulier, elle regarde les deux jeunes filles mais la miss aux cheveux bleus pousse doucement Mitaine. Elle lâche des mots que Sirius ne comprend. La jeune adulte regarde les filles ▬ Je suis arrivée d'un train et je suis amnésique aussi. Enchantée Mitaine. Je cherche un jeune garçon brun se baladant avec des figurines et se nommant Superman. Je m'inquiète, il est partit et j'ai perdu sa trace. ▬ fit elle avec un ton inquiet à la fin de sa dernière phrase. Puis, doucement, elle s'approche de l'autre jeune fille et l'entoure d'un bras autour de la taille et dit ▬ Tu es blessée et ne fait pas ta tête de mule. Tu peux nous guider ici puis... t'isoler ne t'apportera rien à part des ennuis ! Alors, reste avec nous, d'accord ? On s'aidera mutuellement en commençant par soigner ta blessure. On te laissera pas seule ici. ▬ fit elle en regardant Mitaine comme pour dire à la jeune fille de confirmer ses dires. Elle soutient la jeune fille faisant le poids d'une plume et elle lui ébouriffe doucement les cheveux avec sa main de libre en faisant un sourire. ▬ Alors, comment t'appelle tu ? ▬ lâcha-t-elle doucement. Elle ne veut pas lui faire peur... elle veut la rassurer et juste lui faire reprendre confiance en elle. Si elle arrive déjà à faire ça, ça serait pas mal.

Elle se joue de leurs sentiments. Les plus noirs sont les plus forts. Les meilleurs. Le désespoir, par exemple... Et de temps à autre, Elle change la donne. Comme maintenant. Doucement, Pâques s'efface, Pâques s'évapore, finit par disparaitre.
Lorsque celle-ci réapparait, elle n'est plus vers les maisons abandonnée. Non, elle se trouve désormais devant une immense étendue d'eau...

Mais Elle n'a pas finit ! Doucement Sirius est aussi envahie par les ténèbres mais ce n'est pas le soleil qui l'accueille à son retour. Non seul l'obscurité est présente. Pourtant quelques lumières sont allumées au loin et une musique de forain est jouée.

Spoiler: