Jamais il n’a cherché à savoir si la manière dont il vivait était ce que le commun des mortels jugerait « correct ». Mais ça ne lui a jamais posé un quelconque problème au quotidien. Il a juste pris la voie qui s’offrait à lui, sans jamais prêter une quelconque attention aux remarques pernicieuses de ceux qui l’entouraient, ne suivant que son propre chemin.

S'il devait se décrire en quelques mots, il est plus que probable qu'il vous enverrait plutôt vous faire foutre. Avec ses yeux rayons lasers capables de vous geler sur place dès qu'ils se posent sur vous, il est plus qu'à prendre avec des pincettes, le gaillard. Cela va bien plus qu'une question de tact ou de politesse - en général, on évite, voire on oublie de lui parler et même de le regarder. Parce qu'au-delà de l'image lisse et sans faille qu'il renvoie, il y a quelque chose chez lui qui force le respect et la crainte. Même si ce n'est pas forcément perceptible au prime abord, dès que l'on s'intéresse plus de quelques secondes à lui, on le sent. Cette méfiance qu'il impose par sa simple présence, difficilement dissimulée derrière une couche de faux-semblants, il ne faut pas la prendre comme bénigne. Ce que l'on sent, c'est, bien plus loin que ses glaciaux coups d'œil, une violence à peine contenue, une sauvagerie à fleur de peau qui n'attend que le moindre déclencheur pour exploser avec fracas. C'est cela qui le différencie des autres ; non content d'imposer une certaine crainte par ses brusques montées de violence, il sait se faire respecter sans même menacer. Par le ton de sa voix, le fiel doucereux des mots qui coulent d'entre ses lèvres, sa voix glaciale, il vous fait ployer l'échine devant lui, vous faisant vous sentir pire que le dernier des derniers. Il vous fait courber la tête, sans avoir l'air particulièrement effrayant ou imposant physiquement, se posant en être supérieur par le simple ton de sa voix. Une voix qui a l'habitude de se faire obéir sans jamais rechigner, une voix qui a toujours tout ce qu'elle désire.

Bien sûr, il n'est pas que ça, loin de là. Une fois la conversation lancée avec lui, il vous montre sans difficulté à quel point il est le plus imparfait des hommes. Mesquin, arrogant et insolent, peu lui importe qui vous êtes, d'où vous venez et ce que vous faites ; la seule chose qui lui importe est votre valeur et tant que vous ne la prouvez pas, vous ne serez pas plus qu'un infime vermisseau à ses yeux. Vous pourrez lui être utile et peut-être tempèrera-t-il un minimum ses mots, mais ne vous attendez pas à grand-chose ; les gens ne sont utiles qu'un temps, après tout. S'encombrer d'individus dont la loyauté n'est ni prouvée ni éprouvée ne l'intéresse pas. Son orgueil - c'est quelque chose, ça aussi. A ses yeux, vous n'êtes rien, à peine digne de lui arriver à la cheville, et ce tant que vous ne lui prouverez pas que vous êtes digne de sa confiance ou même supérieur à lui - quoi qu'il risque de se refuser à le reconnaître tant que les preuves ne seront pas étendues devant lui. Cet orgueil, et plus encore, sa possessivité envers les choses qui lui appartiennent font de lui quelqu'un de loyal en soit. Loyal aux siens, loyal à ceux qui lui sont fidèles. Les autres... Il s'en contrefout.

Dans son esprit désormais effacé, il y subsiste pourtant quelques traces qui semblent imprégnées en lui, comme des marques gravées au fond de son être dont même le temps ne pourra venir à bout. Elles sont curieuses et dissemblables, mais pourtant elles semblent aller de soi. L'instinct, puissant et aiguisé du combat qui le fait réagir sans même qu'il en ait réellement conscience ; des connaissances au sujet d'illicites douceurs ainsi que de savantes doses de cette policée politique.