Le gamin et la grenouille

10h-12h

Le décors change, alors même que la blonde avec réussis à ouvrir la porte... Quel poisse ! Alors que je pensais être le seul, je découvre avec moi la brune, celle qui était avec la perche. Un soulagement s'empare de moi, c'est toujours mieux d'être avec elle qu'avec Albator. Je m'approche d'elle et je remarque à ce moment la ces mains, relié par une fine membrane de peau, comme les pâtes des grenouilles. C'est une grenouille ? Comme dans les comptes de fée ? Je lui tend ma main pour qu'elle puisse prendre la mienne. << Vient, on va retrouver les autres ensemble. >>. Je n'attend même pas qu'elle prenne ma main, je saisie la sienne sans attendre. Je n'ai pas peur d'elle, même si elle a des mains palmées et des dessins étranges sur le visage.

Je marche dans les couloirs de cette étrange demeure. Tout est ancien, à l'abandon. Où sommes nous ? Comment sommes nous arrivés ici ? Je soupire, exaspéré. << Elle est où, cette putain de sortie ? J'ai l'impression d'être un stupide piaf qu'on aurait mis en cage. >>. Je regarde la brune, elle a l'air d'être ici depuis plus longtemps que moi, mais elle n'a pas l'air de connaitre cet endroit. Bon, tant pis s'il y a des ennemis dans le coin, au pire je leur foutrais une bonne raclé. Je toussotais légèrement pour m'éclairer la voix avant de crier. << Il y a quelqu'un dans cette putain de maison ?! >>

« Tranquility ? In Nowhere ? … Really ?
Le gamin et la grenouille 50897519

10h-12h

« Le réveil sonne. Dans sa tête, c’est l’anarchie. Vad är det här drömmen ? Detta ... Jävla dröm ? Il sursaute, le langage Suédois lui revient. Il s’embrouille, s’emmêle. Quel réveil, où est ce foutu réveil ? Et c’était quoi ? C’était quoi.. Ce ce truc ? Ce… Foutu rêve ? Anglais, Français… Tout se mélange, pour former une langue hérétique et méconnue.

… La langue à Candide, quoi.
Et le pire ?
Dans la salle… Aucun réveil.

« Il se masse les tempes, perdu, paumé. Il se relève. Car oui. Car oui, ça lui revient. Il s’était endormi par terre. Et avec ce souvenir, le reste lui remonte en tête. Son arrivée, sa rencontre. Dieu, Symphonie. Le souvenir, le cheval. Les ronces… Le message, les maisons, l’araignée. Le manoir. Le lit…

Attends.
Ou est passé Dieu ?
Et Symphonie ?

… Jävla fuck.

« Il n’y a plus rien. Juste lui. Lui et sa grossièreté nouvelle. Lui et sa période d’adulte en révolte. Seul. Seul, mais quand il y pense. Symphonie n’était déjà pas là, quand il s’était assoupi. Enfin. Il ne sait pas. Il n’a jamais su. Alors il hausse les épaules, regarde autour de lui. A l’éclairage, il est au moins midi. Mais ça ne l’avance pas. Comme ce rêve aux abords réels. La Saint-Valentin. A cette pensée son visage s’assombrit. Le blond aurait-il décidé d’en vouloir à la… Profiteuse ?

Qui sait.
En attendant.
C’est passé.
Et lui, il a encore oublié.

« C’est un fait. Un fait indéniable. Les souvenirs, si l’on peut qualifier ce rêve de souvenir, sont incohérents. Un jour prince en devenir, un autre simple humain perdu et lâché aux bras de l’humanité ? Il frissonne. Lui et ses sentiments. Lui et sa frustration. Alors il soupire. Encore. Laissant couler les dernières traces de sa nuit, sa courte sieste.

Et se remet d’aplomb.

« Son sac à l’épaule, toujours aussi arriviste et inconscient, il contemple la pièce. S’intéresse à la grande glace. S’y approche. Sait-il au moins… À quoi il ressemble ?

Un cri.
D’enfant.
En colère.

« Et tu sursautes, comme un bleu. Un bleu qui s’observe enfin. Lui et son écharpe volumineuse, lui et sa chemise blanche, son pull noir. Lui et ses cheveux … Tel le plus beau champ de bataille. Il se fixe, vrillant ses pupilles miels dans … Les siennes. La couleur ne l’étonne pas. Son long manteau beige non plus. Ni même les sortes de… De choses – fils – lacets – élastiques rouges qu’il porte sur deux doigts. En fait. Il se trouve même… Familier.

Assez pour se détourner, en tout cas.
Car oui, il prend la poudre d’escampette.
Et fuit son image d’apollon.
Enfin. De prince égaré amnésique, n’ayant pas même conscience de sa fichue beauté.
Foutu riche.
Riche refoulé, en plus.
Le comble.
… Ne manquait plus qu’une princesse ventouse, qu’un chat parlant et qu’une grenouille chevaleresque.
Enfin.
Nous n’y étions pas encore.

« Si Candide avait eu à se décrire, il aurait sans doute utilisé le terme ‘bizarre’ ou encore même ‘familier et peu probable’. Mais le blond n’avait pas eu à se décrire, et encore maintenant, si une chose était bien des moins intéressantes, c’était bien celle-ci. Blond qui d’ailleurs, était sorti de la pièce et qui faisait face. Face à une femme grenouille et à un gosse brun ébouriffé.

… C’était définitif.
Candide était à présent l’homme le plus blasé qui n’ait jamais existé.
Un homme heureux, pour résumer l’affaire.

« Il y a quelqu’un, oui. Bonjour bonhomme. Besoin d’aide ?

Ton assuré, sourire dissimulé pour iris profonds. Où était donc les autres ? Si Dieu semblait parti... Ou traînait Symphonie ?

10h-12h
Alone. Again.

Nouveau changement de décor. Nouveau lieu. Et nouvelle solitude. Non, pas vraiment solitude. Superman est là, avec elle. Mais elle a perdu Novembre. Encore. Et elle ne sait pas quand elle va le retrouver. Encore. Elle ferme ses yeux un instant. Se reprendre. Ne pas être faible. C'est ce que la ville attend, alors ne pas être faible. Elle jette un regard au petit garçon à côté d'elle, qui vient de prendre sa main d'autorité. Regard vide. Égarée.

Elle songe soudain a retirer sa main. Sa main palmée. La princesse grenouille. Tout en elle lui rappelle Novembre. Tout en elle la dégoute. Mais le garçon ne la lâche pas. Se pourrait-il qu'il n'ai pas remarqué... Non, aucune chance. Il a forcément vu. Alors quoi ? Elle le regarde avec un air triste. Est-ce qu'elle aurait dégouté ce fameux petit frère, celui de son souvenir ? Comment était-il, ce frère qu'elle n'avait pas connu ? Dans sa tête reviennent les premières phrases d'une chanson, venues d'elle ne sait où. "Toi le frère que je n'ai jamais eu, sais-tu si tu avais vécu, ce que nous aurions fait ensemble...". Elle mordilla sa lèvre. Ce n'était pas le moment d'être nostalgique et de pleurer. Pas alors que le gamin -le gamin quoi ! - cherchait la sortie.

Et qu'au lieu de la sortie, ils trouvèrent un étrange individu. Blond comme les blés. Et aussi perdu qu'eux, à voir sa tête ensommeillée. Elle lance un regard noir à Superman pour lui signifier que parler de façon aussi vulgaire n'est pas correcte pour un enfant. Même si ça ne sera sans doute pas aussi efficace que si elle avait parlé. Sauf qu'elle ne veut pas parler. Parce que qui dit parler dit coasser. Et ça, c'est plus qu'hors de question.

« Il y a quelqu’un, oui. Bonjour bonhomme. Besoin d’aide ?

Elle hausse un sourcil. Le type est souriant. Son ton ne montre rien. Rien du tout. Et elle n'aime pas les gens dont le ton ne montre rien du tout. C'est d'autant plus louche. Est-il chez lui ? Est-il réellement perdu ? Ou simplement à moitié endormi, comme semblent l'indiquer ses cheveux ? Est-ce qu'il vit ici ? Les sourcils de la jeune femme se froncent doucement. Non, elle n'aime pas ça. Non, elle n'aime pas rencontrer des gens dont elle ne sait rien. Surtout dans cette ville. Et elle n'aime pas avoir un gamin à charge alors qu'elle est seule. Où est sa liberté d'action, hein ? Et pourquoi la ville l'a-t-elle transportée ici ? Avec ce gosse dans les pattes ? Sans Novembre ?

Elle serre fort la main de Superman dans la sienne, essaye de le tirer un peu vers elle. Non, ils ne resteront pas là. Il faut retrouver les maraudeurs. Maintenant.

10h-12h

My...Gad... C'est quoi ce bourgeois ?! Je l'examine de haut en bas. Blond, cheveux arrivant jusqu'aux épaules, yeux ambrés, environ... 1m80 pour une soixantaine de kilo... Quoi j'en fais trop ? Gneugneugneu. Bref, je l'examine quoi, lui et ses vêtements de bourgeois de la renaissance... "Bonhomme" MAIS C'EST DÉPASSÉ BONHOMME ! Has been ! Retourne à l'époque des dinosaures sale diplodocus ! Je reste auprès d'Hécate, je préfère largement rester avec la princesse grenouille plutôt que de rester avec l'autre bourgeois du début des années 1900. Hécate serre ma main et me tire un peu vers elle. << Hey l'ancêtre de l'alpaga, va brouter la poussière de ce manoir ailleurs capiche ? Allez oust, pchiiit ! >>.

Je regarde Hécate et lui fait signe de partir, lui montrant l'escalier du doigt. Nan, l'aristo, je le sent pas du tout, un peu trop "parfait", c'est louche, trèèèèès louche. << Bon c'est pas tout mais j'ai du boulot qui m'attend, je chaume pas ! J'ai encore une fille aux cheveux roses à sauver, et une bande de paumé à retrouver. >>

« Let me ! I'm the farthest princes. The farthest of your heart. Of my mind. So stop. Your game. All. Freedom. Liberty. I'm selfcontrol. I'm the limit. The limit of the off limits.
Musique.

« Il est là. Il est là et n’y peut rien. Impuissant face à sa situation, il fixe distraitement le bambin qui se lâche. Que voulez-vous qu’il réplique ? Distant, blasé. Mais pas puéril. Qu’ils continuent, tous ! Qu’ils continuent. Ils ne perdent rien pour attendre. Mais en attendant, si ils perdent bien quelqu’un… C’est Candide. Car le blond ne cherche plus à réfléchir. Son corps sature. Allez savoir de quoi. L’arrivée. Dieu. Les… Contretemps. Caprices de la ville. Et ce brun. Ce brun qui le fait fuir. Ce brun qui lui monte à la tête. Ce brun qui l’entraine, l’énerve. Pour faire quoi ? Disparaître. Et encore. Il n’en est pas si affecté. Le tout puissant n’est pas si important. Mais… Comment exprimer ? Exprimer cette frustration qui se tend peu à peu dans l’esprit de notre penseur sans pensées ? C’est lent, fourbe. Mortel. Il n’a pas bien dormi. Il ne veut pas dormir. Il ne veut pas rester. Il ne veut pas partir. Il ne veut pas. Il ne veut rien. Il ne sait pas.

Et ça l’exaspère.
Beaucoup.

« C’est bon ? T’as fini ton marathon ? Tu peux te casser, maintenant ?

« Froid. Explosif. Maitrisé. Blasé. Et cruellement direct. La corde a cédé. Et de cette fin, s’achève le volume qu’il n’avait pu contrôler. L’histoire passe derrière. À présent il reprend les rênes. Son soupir accentue violement ses dires alors qu’il se passe main dans cheveux. Il se redresse. Il toise. Il méprise. C’en est assez. Assez de ces enfantillages, de ces babillages. Il n’en a que faire. Il n’en a cure. Candide a repris son trône en main. Lui, fuyard oublié. Lui. Lui ayant tout donné. Lui, lui ayant choisi l’inexpressif à la vérité. À quoi bon nier. Au final, il n’était bon pour la fugue. La bataille l’enivre. La colère l’apaise. Le rend digne. Charisme glacial, regard omnipotent. Tout en lui clame ce changement. Enfin. Enfin il accepte son rôle. Et qu’importe. Qu’importe qu’il ait un frère, ou même un cousin lointain. Qu’importe qu’il ait déjà tout oublié une, voire deux fois. Qu’importe qu’il ait chuté d’une place qui à l’époque ne l’attrayait pas.

Seul compte ce présent.
Aussi dur soit-il.

« Et jamais il ne s’abaissera. Plus maintenant. La joie n’a pas disparue. La simplicité non plus. La douceur n’est pas bannie. Candide est juste différent. La partie sombre en son sein n’est même plus de taille. De taille face à cet être de feu. Un feu de glace. Il est la neige, le frisson. Il aime, sait aimer. Mais ne sait plus s’éprendre. Électron libre, dès à présent il vogue. Imprenable. Il est le follet fou, la démence profonde de la lucidité claire. Jamais plus il ne tombera. Et si tomber il doit. Alors avec ou sans gloire, il se redressera.

« Alors ? Vous attendez quoi ?

Pas ma photo, j’espère.
Car vous savez quoi ?
J’en ai rien à faire.

10h-12h
Alpaga ?

Elle hausse un sourcil. Une fois de plus, Superman est parti dans une tirade, et pas des plus polies. Elle ne peut s'empêcher de grimacer. Pourquoi est-il si vindicatif, verbalement. Et pourquoi, grands dieux, la ville l'a-t-elle laissée seule avec lui ? Il a soudain l'impression d'être incapable de gérer ce gamin insolent et effronté, qui agresse les inconnus qu'il croise par la parole.

Elle baisse ses yeux sur lui, lorsqu'il lui fait signe de s'en aller en montrant l'escalier. Attend attend, tu va pas partir après l'avoir agressé comme ça, si ? manque-t-elle de demander. Mais elle songe soudain que cette remarque ne servira sans doute à rien, vu le caractère que semble avoir le gosse. Elle ose un regard vers le type en question. Sa mine sombre ne lui dit rien qui vaille, et c'est sans réel étonnement que la réplique du blond la cueille en plein dans le ventre :

« C’est bon ? T’as fini ton marathon ? Tu peux te casser, maintenant ?

Ouch. Vraiment pas content. Elle fronce les sourcils, jette un regard noir à Superman. Bien joué, vraiment, voilà, t'es content, tu te l'es mis à dos. Ah non, tu nous l'a mis à dos !

« Alors ? Vous attendez quoi ?

De nouveau, son regard vert remonte sur l'inconnu, qui les toise de toute sa hauteur, et elle manque de se sentir petite. Non non non. Elle ne doit pas se laisser démonter. Et elle a le gosse sur le dos, et même si c'est de sa faute, à ce mioche, il est de toute façon trop tard pour rattraper ses bêtises. Et on ne revient pas en arrière, à Nulle Part comme ailleurs. Elle soupire doucement, plante ses yeux dans ceux couleur de miel du type, se décide à ouvrir la bouche pour la première fois depuis longtemps. Stop, le carnet et le stylo, ça prend trop de temps.

- On n'attend rien de particulier. Coâ.

Elle grimace de nouveau. Ah oui, super, vraiment, quel cadeau cette merde. Elle rougit un peu. Espère soudain que la ville l'avalera dans un grand tremblement de terre, et qu'elle disparaitra aux yeux du monde. Après avoir pris son courage à deux mains et lancé un nouveau regard mortel à Superman, elle se décide à continuer :

- Désolée pour...les paroles de Superman, coâ. Il ne mesure pas vraiment ce qu'il dit, coâ.

Elle serre les poings. Décidément, c'est pitoyable. Pi-to-ya-ble. Elle en pleurerait. Mais elle garde la têtte haute. Pense à cet hypothétique petit frère qui se trouve peut-être quelque part dans cette ville. Peut-être.

- Est-ce que tu sais...où on est ici ? Coâ. On cherche des...amis à nous. Coâ.

Ses pensées s'envolent un instant vers Novembre. Ami ? Un peu plus ? Quoi qu'il en soit, il faut qu'ils rejoignent le groupe. Ils faut qu'ils sachent où ils ont atterri. C'est tout.

10h-12h

Attention, monsieur bourgeois se met en colère, je répète, monsieur bourgeois se met en colère ! Il va faire quoi hein ? C'est pas parce qu'il est blindé de tune qu'il doit se sentir tout permis ! J'allais répliquer à nouveau, mais Hécate me devança, émettant des croassement en cour de phrase. Je fixais le blond, l'air de dire "si tu te moques de ma princesse grenouille, bah je te lance un rayon laser dans ta face !". Ma main serre celle d'Hécate, je reste devant elle, de sorte à la protéger. C'est vrai que le blond est en colère maintenant, et j'ai pas envie qu'il s'en prenne à ma princesse grenouille. << Ne fait pas de mal à Hécate, elle n'a rien fait ! Si t'as un problème, tu le règles avec moi. >>.

Je tilt en l'examinant, blond, comme le cliché des princes charmants dans les contes de fées. Je souris, fier de moi, ça va marcher j'en suis sûr. << Hey toi, t'es un prince ? Enfin, t'as l'air d'un prince - tu ressembles surtout à celui dans Shrek - avec ton air bourgeois en tout cas, alors embrasse là ! Allez, embrasse Hécate ! Comme dans les contes de fées, les princes embrassent les princesses grenouilles pour qu'elles redeviennent des belles jeunes femmes ~ >>. Je sens qu'elle va me détester, mais fuck, je me met derrière le "prince" pour le pousser en direction de la brune, espérant que dans sa chute, il rencontre les lèvres d'Hécate.

Il était une fois, dans une ville abandonnée et remplit d'amnésique, une princesse grenouille, un prince alpaga et un super-héro ~ Le super-héro poussa "accidentellement" le prince sur la princesse, et ils vécurent heureux et eurent des enfants amphibienalpagifiés... Quoique non c'est gore, pas d'enfant !

« I’m too far. It’s too late. Too late for you. For us. Hope ? No. Longer worth.
Musique facultative.

« Gène. Tel est le mot dans l’esprit du prince. Que voulez-vous qu’il dise ? Que voulez-vous qu’il fasse ? Trop à dire, trop à faire. Un trop qui au final l’exaspère. Il n’y a rien. Voilà la réponse idéale. Rien à prononcer, rien à commencer. Pas de fin, pas de début. Un néant froid dans une atmosphère de glace. Les coassements de la brune ne l’intriguent même pas. Il s’en fiche. Candide survole la petitesse, n’est plus au niveau de quelques bassesses. Qu’attendiez-vous ? Quelles répliques espériez-vous ? Un sursaut ? Un cri horrifié ? Des pupilles dilatées ? Ne l’y prenez pas. Il n’est si puéril, si enfantin. Son omnipotence érige son esprit, dresse ses barrières et délimite ses frontières. Sans doute est-il proche physiquement, mais psychiquement… Il est dans un autre monde.

« Le blond toise son opposé. Elle qui s’exprime. Elle qui s’excuse. Elle qui tremble. Qui tremble de l’intérieur. Ses poings se serrent, alors que lui, lui reste calme. Calme dans sa froideur. Dans sa colère tourbillonnante. Il se condense, se maîtrise. Est déjà bien plus que prince. Il n’oscille à la malédiction, ne prête attention au corps. Il n’est un monstre. Ni même dictateur. Au contraire de savoir s’éprendre, il sait écouter. Superman ? Quelle ironie. Il réprime un rire méprisant et la réplique cynique se fait violence. Où ils sont ? Au manoir, bien évidemment. Des amis ? Le mot lui fait mal. Déchirant. Mais il l’ignore. Pensent-ils sérieusement qu’il va les aider ? N’est-ce pas trop demander ? Après l’avoir agressé, on se plie à son jeu pour lui soutirer diverses utilités ?

La blague.

« Un rire lui échappe, lointain. Un rire qui veut tout dire. Rire qui exprime sentiments et contradictions. Candide est las. Las et blasé, las et fatigué. Il ne se bat plus, se contente de diriger ce qu’il peut maintenir. Un fil déjà a cédé, et d’autres vont bientôt suivre. Pour le meilleur comme pour le pire. Ses iris se vrillent dans ceux de la dame. Iris opalescents et violents. Iris qui se détournent pour dévisager la bestiole brune qui se débat verbalement. Alors, on tente de s’imposer ? Profondément agacé, il écoute le braillard piailler à ses oreilles mille absurdités. Un agacement qu’il ne montre pas. Un agacement qu’il change, transforme en mur de glace. Oui. Si Candide sait bien jouer, il sait encore mieux être. Indéchiffrable et déstabilisant. Deux mots qui sont ancrés au plus profond de son âme, qui sont brûlés au vif dans ses manières et son statut. Deux termes qui qualifient son rôle. Rôle qui le saille, l’épouse mieux que quiconque. Un rôle qu’innocemment, le bambin vient d’énoncer. Ô ignorance.

« Et l’enfant bouscule le plus grand. Sa force de nourrisson désamorce Candide, qui trébuchant, se contracte. Vif, il empoigne d’une main le gosse et de l’autre la palme d’Hécate. Moment d’arrêt. Le blond fixe ses deux prises, impénétrable. Ce n’est qu’une demie seconde plus tard, qu’il renonce à la larve brune, gardant en poigne la menotte visqueuse de sa nouvelle partenaire. Dégouté ? Même pas. Il semble vouloir hausser les épaules. Mais ne le fait pas. Un autre fil a sans doute lâché. A vrai dire, de cet instant, de nombreuses choses auraient pu se passer. Le prince aurait pu empoigner Superman, le coller à l’on ne sait quel mur et lui démanteler son petit visage d’une baffe monumentale. Il aurait pu, aussi, le secouer à n’en plus pouvoir, tentant vainement de connecter un neurone égaré.

Mais il n’était si bas.

« Qui je suis ? Ce que je suis ? Tu veux vraiment savoir, petit ? Je suis pas une tâche, moi, en tout cas. Et surtout pas con.

« Sa main lâche toutes attaches. Il s’éloigne de deux pas. L’insulte a fusé, l’insinuation est sans doute trop perchée. Mais qu’importe. Froid et incontrôlable, il ne peut plus. Plus rester ainsi collé. Il a besoin d’air, besoin d’autre chose. Insupporté et cruellement distant. Candide est plus loin que jamais. A vouloir jouer et espérer, ils ont fini par le perdre. Le blond ne joue pas dans la cour des enfants, il ne s’en satisfait pas et n’éprouve aucun besoin de rajouter quoi que ce soit.

« Je croyais que vous étiez occupés et fortement pressés de partir. Alors soit, allez-y ! Où on est ? Des amis ? Désolé mais je ne suis plus de la partie.

Ton glacial pour un Candide qui au profond, est exaspéré.
Un faux pas, et vous me perdez.
Quoi que vous savez quoi ?
C’est déjà trop tard.

10h-12h
Le vase est plein

Elle a envie de soupirer. Ou de s’énerver. Ou de s’enterrer. Allez savoir de quoi elle a envie en réalité, sachant qu’elle-même a du mal à le définir, tellement ses émotions jouent les montagnes russes depuis quelques minutes. Tout s’enchaine, encore, encore, elle n’a pas le temps de respirer, pas le temps de s’arrêter, de réfléchir, de comprendre. Pas le temps de fixer un objectif quelconque. Et ça, c’est comme depuis le début dans cette ville, depuis le début, elle court, encore et toujours, à la recherche d’elle ne sait quoi, de nourriture, de repos, de sécurité, d’un hypothétique remède, de réponses. Elle court après le temps, et le temps n’attend pas, le temps n’attend personne. Elle jette de nouveau un œil à sa gourmette en argent. Le temps a encore défilé. Et ces secondes qui s’égrènent prennent une allure dramatique.

<< Ne fait pas de mal à Hécate, elle n'a rien fait ! Si t'as un problème, tu le règles avec moi. >>.

Elle hausse un sourcil. En voilà, de la prétention ! Est-ce qu'il croit qu'elle n'est pas capable de se débrouiller seule, après tout ce qu'elle a traversé ? De nouveau, ses yeux verts se fixent sur le petit garçon qui a contourné l’inconnu, et qui le pousse vers elle. Elle ne saisit pas vraiment ce qu’il raconte à propos de princesses et de grenouilles, de princes et compagnie. Trop paniquée, soudain, par la main qui enserre la sienne. Non. Qui enserre sa palme. Elle n’a pas le temps de la retirer que le blond la lâche déjà. Sans aucun commentaire sur la membrane qui relie ses doigts. Comme il n’a pas fait de commentaire à propos des coassements qui lui échappent.

« Qui je suis ? Ce que je suis ? Tu veux vraiment savoir, petit ? Je suis pas une tâche, moi, en tout cas. Et surtout pas con.

Ses sourcils se froncent subitement. Allons bon, n’a-t-il pas honte, de parler ainsi devant un gamin ? Certes, un gamin turbulent, pas forcément bien élevé, mais ils sont au beau milieu de Nulle Part, personne n’est vraiment normal ici.

« Je croyais que vous étiez occupés et fortement pressés de partir. Alors soit, allez-y ! Où on est ? Des amis ? Désolé mais je ne suis plus de la partie.

Voilà, c’est reparti. Du chaud et du froid, encore. Comme avec Novembre, comme partout ici, de la paix et puis la guerre, du repos et une course, encore. Elle en perdrait haleine. Peut-être est-ce l’attitude de Superman. Les mots de l’inconnu. La froideur de son ton. L’absence de Novembre . La séparation entre les Maraudeur. L’étrangeté. Ou tout simplement cette folie qui la guette au coin de chaque rue, derrière chaque maison, attendant la moindre faille chez elle pour la dévorer. Toujours est-il qu’elle perd un peu de son calme. A-t-elle jamais réussi à le garder, ce calme ? Elle s’avance vers Superman, attrape son oreille et la tire assez fort, juste assez pour lui faire mal.

- Maintenant, ça suffit ! Coa ! Vous croyez qu’on a que ça à faire, vous deux ?! Toi, Superman. Tu t’excuse, tout de suite ! On ne fait pas ça. Et encore moins avec des gens qu’on ne connait pas ! On t’a jamais appris les bases de la politesse ou quoi, coa ?!

Son regard épingle ensuite l’inconnu, toujours à quelques pas d’eux, toujours aussi froid, aussi distant.

- Quand à vous ! Coa. Faites un effort pour parler correctement, vous croyez que l’attitude de cet enfant va s’améliorer si vous lui parler avec de tels mots ?! Coaa ! Et si vous ne voulez pas nous aider, et bien tant pis ! Mais seul dans cette ville, on ne survit pas longtemps ! Vous voulez finir comme le gars dans le parking ? Soit ! Coa.

Un haut le cœur la secoue au souvenir du corps éventré au-dessus d’elle. Au-dessus d’eux. Son regard virevolte de nouveau de l’un à l’autre, vert assombri, vert fâché, vert tempête.

- On a pas le temps ! Coa ! Pas le temps, vous comprenez, ça ?! On n’est pas dans un terrain de jeu, ici ! On est piégés ! Et quand on arrivera à zéro… coa....

Elle ne trouve pas le courage, pas la force pour finir sa phrase. Elle ne veut pas finir sa phrase. Elle ne veut pas savoir ce qui se passera quand la dernière seconde se sera écoulée.

10h-12h

Un con ? Il s'est regardé lui avant de me dire ça ? Enfoiré ! J'allais répliqué mais Hécate me dit de m'excuser. Je soupire, grogne un peu en me renfrognant. << Le CON s'excuse. >>. J'écoute Hécate, il y aurait des morts dans cette ville ? Je jette un oeil sur mon compteur avant de demander timidement. << Quand le compteur arrive à zéro... On va mourir...? >>. Je reste auprès de la brune, même si je me suis excuser, je fais pas totalement confiance au blond. Il n'avait pas à me traiter de con, nah !

J'enlace ma princesse grenouille, en mode "reconquête des coeurs". Si je fais mon petit garçon mignon et adorable, elle va sans doute craquer et arrêter de me criser dessus. Je me blottis contre elle avant de lui demander doucement. << Je peux t'appeler grande soeur Hécate...? >>. Une grande soeur, comme une seconde famille dans cette ville.

« Hope ? Why ?

« Il fixe. Fixe le temps. Temps qui ne s’écoule que trop vite, que trop lentement. Temps qui dicte sa loi, temps qui n’attend pas. Et qui jamais n’attendra. Que peut-il bien espérer, que peut-il bien penser ? Lui philosophe raté, lui prince incontesté. Lui Candide. Un Candide égaré dans un vide fracturé. Un Candide qui pourtant, reste détaché. Comment fait-il ? Alors que la brune s’agace et que l’enfant plie.

Un pas.

« Je suis alors le plus proche de la mort.

« Pupilles qui se détournent, intouchables. Vif, il n’est captif. Jamais l’on ne l’attrapera. Candide vole, Candide décide. Candide dérive. Il n’est pas possible, possible de le définir. Incongru et lointain. Lointain malgré sa chaleur, malgré sa présence, malgré ses sourires. Mais après tout, à quoi bon ? A quoi bon essayer de comprendre ? Franchir l’inaccessible, découvrir l’indéchiffrable. Laissera-t-il seulement quelqu’un s’immiscer en lui ? En son profond, au creux de son cœur, à la lisière de son âme ? Le peuvent-ils seulement ? Lui incontesté inconnu. Lui prince méconnu. Peuvent-ils espérer le percer à jour ? Candide ne se contente d’offrir la simplicité, s’entourant d’un voile infranchissable, il dépasse le royal. Est-ce dans ses gènes, une habitude ? A qu’en dire. A que dire. Il ne peut nier ce qui déjà, est là. Il sait y faire, en mystères. Car lui même, en est un. Alors froid, alors heureux, alors blasé. Il fait défiler les panoplies, revêt les émotions, joue de regards et de sourires. Un charmant qui, au final, n’est ce que l’on croit.

Un charmant qui, au final, s’exaspère.

Fourbe animal.
Mais depuis quand est-il ainsi ?
Depuis quand est-il… Ici ?

10h-12h
Je sais les pleurs, je sais la peine.

Elle se sent déjà soulagée. Soulagée d’avoir passé ses nerfs, sur des gens qui ne le méritent pas vraiment. Soulagée d’avoir été si injuste, d’avoir renvoyé les tords de la ville sur des êtres vivants. Elle ne se sent même plus coupable. Vide et soulagée. Superman s’excuse, mine penaude, et dans sa tête à elle, il y a comme des éclats de petit frère. La réflexion de l’enfant sur la fin au bout du compteur lui glace le cœur. Réflexion naïve. Lâchée si… facilement. Elle, elle est incapable de dire ça. Incapable de songer que tout va s’arrêter dans… 76 heures, comme le dit son compteur.

Soudain, le petit garçon est là, serré contre elle, l’enserrant de ses petits bras, lui donnant un peu de sa chaleur. Elle frissonne. Le chaud et le froid. Le chaud à travers ce contact. Le froid dans chacune de ses idées, le froid qui la traque, emprisonne ses pensées dans une étreinte douloureuse.

<< Je peux t'appeler grande soeur Hécate...? >>

Les paroles l’entrainent dans un tourbillon de souvenirs, kaléidoscope d’émotions fugaces, encore si présentes. Chocolat, si fragile dans ses bras, le sang dans les cheveux blonds, la panique face au vide de l’absence. Chocolat, dans les bras de ce type aux cheveux longs. Chocolat, qu’elle a laissée toute seule, au commissariat. Non, pas Chocolat. Milena. Elle se répète ce nom en boucle, une énième fois. Difficile de se débarrasser d’une habitude. Son regard croise celui de Superman. Grande sœur et petit frère ? Petit frère… N’a-t-elle pas déjà un petit frère ? Ne va-t-elle pas prendre un engagement qu’elle ne sera pas capable de tenir, en acceptant la demande de l’enfant ? Une fois de plus, elle cède. Elle ne peut pas l’abandonner. Pas de cette façon. Elle lui ébouriffe les cheveux avec un sourire qu’elle s’efforce de rendre naturel.

- Ou…Oui. Bien sûr…petit frère. Coa.

Le cœur un peu serré –appréhension, exaltation, indécision-, elle tend une oreille attentive à l’inconnu :

« Je suis alors le plus proche de la mort.

Le plus proche de la mort ? Depuis quand est-il là ? N’a-t-il donc pas eu de souvenir ? Ces fameux souvenirs, qui leur rendent un peu de précieux temps. Et un peu de ces inestimables morceaux de mémoire… Elle en aurait presque de la peine pour lui.

- Vous n’avez pas de…nom ? Coa… On en a tous trouvé un, ici. Et vous n’avez pas eu de…souvenirs ? Coa.

Oui, c’est sa curiosité qui parle. Et peut-être son empathie. Débarrassée de la honte des premiers coassements, elle laisse les phrases s'échapper en un flot incertain, discontinu. Irrégulier. S’il n’a pas de nom, et bien soit, elle lui en trouvera un. Et s’il n’a pas eu de souvenir… Non, elle ne pourra pas lui en inventer. Elle lui lance un petit regard triste. Encore un pauvre bougre, comme eux. Plus proche de la mort ?

- Vous êtes là…depuis longtemps ? Combien de temps vous reste-t-il ? Coa...

Pathétique grenouille.

10h-12h

Je souris, victorieux, quand la brune accepte d'être ma grande soeur fictive dans cette ville. Le blond reparle, prétextant qu'il crèverait en premier. Je reste dans les bras de sa princesse grenouille avant de lui répondre. << Bah, c'est comme un jeu, quand le compteur sera à zéro, ça sera un "Game Over", on aura juste à cliquer sur "Try Again". >>. Je soupire en prenant la main d'Hécate dans la mienne. Ces vieux, ils savent pas se détendre. C'est qu'un jeu, on a plusieurs vies, il y a pas de quoi paniquer... Des scénarios comme ça, c'est digne d'un jeu vidéo ou d'une BD.

Elle parle de souvenirs, donc on peut réellement obtenir des souvenirs ? Alors ça serait notre quête principal ? Rassembler ces souvenirs pour révéler son passé ? Il est cool ce scénario, j'aimerais bien rencontrer le réalisateur de ce jeu. << Dit, dit, grande soeur ? Comment on gagne des souvenirs ? >>

Spoiler:

« Sorry.

« Innocence. Tu ne sais que dire, que faire. C’est injuste. Mais c’est ainsi. Tu connais ce mot, connais ses limites, connais la douleur. Qu’ajouter de plus ? Il n’y a rien à dire. Alors tu te contentes, simple, égaré des mondes. Tu es seul, un seul qui survit malgré les peines. Tu lâches, à quoi bon te battre ? Te battre contre eux. Contre elle. Si doux nom, si belle vérité. Tu te relâches, la distance se comble. Indéchiffrable, mais plus présent que jamais.

« Hécate est un nom merveilleux, quoiqu’un peu rude.

« Sourire, lassitude. Tu n’as pas la force, la force nécessaire pour lui résister. Elle t’échappe, t’attrape. Et tu ne comprends pas. Alors tu dévies, t’enfuis. Le prince revêt sa cape, s’empare du trône. Affection contre réserve. Tes iris se noient dans son regard, dérivent et se perdent. Iris qui reflètent une part de douleur. Commune à la sienne. Un commun qui pourtant diffère. Que vas-tu faire ? Elle ne t’a pas encore.

« Ca fait beaucoup de questions.

« Rire éphémère, le cœur y est-il vraiment ? Et pourtant, tu n’arrives à culpabiliser. Captif ? Jamais. Ta main remue, tu aimerais l’enserrer, la rendre prisonnière comme elle te perd. Mais tu ne fais rien, tu restes là, farouche. Ton ton est doux, une douceur révélatrice, qui enfin, s’éloigne. Le masque tient bon. Il ne veut lâcher,pas encore.

« Cinquante-huit heures. Cela répond sans doute à vos questions. Surtout si l’on ajoute les souvenirs.

« Le souvenir. Mais rester incernable est ton moyen. Ton moyen de jouer. Jouer contre toi même. Rester lointain, rester prince. Tu sais qui tu es. Tu ne sais pas qui elle est. Qui ils sont. Tu aimerais, mais tu ne lâches pas. Sans doute essaies-tu de les rendre captifs. Captifs à ton mystère, à ce que tu es. Tu n’avoueras pas. Oui. Ils doivent croire. Croire en ton temps, en tes souvenirs. Enchainés, enchainés comme elle t’enchaine. Rétablir le contrôle. Rester stable. Rester…

« Candide. Mon nom est Candide.

Et tu ne réponds pas.
Ne réponds pas à Superman.
Car de ton nom, tu briserais ses attentes.
Mais au fond tu sais. Sais que trop, un trop qui t’exaspère.
Alors tu l’observes, doux, amer… Et te dévies.
Vrillant tes orbes dans les siennes.
Juste un instant.
Aussi court soit-il.

Souffrance.

10h-12h
Ça fait quoi...d'être mort ?

Game over. Try again. Elle ne trouve pas le courage, pas l’énergie, pas l’envie de sortir le petit garçon de ses idées. De ses rêves. Car ici, dans cette ville, il n’y a pas de try again. Les choses s’arrêtent à game over. On a qu’une seule vie. Le garçon du parking n’avait qu’une seule vie. Comme en attestait l’odeur lourde et métallique qui les emplissait tout entiers. Elle serre de toutes ses forces la main de Superman. Pour oublier. Pour revenir au présent. Quitter ce sombre parking et le rouge du sang.

<< Dit, dit, grande soeur ? Comment on gagne des souvenirs ? >>

Comment on gagne des souvenirs…tu ne veux pas plutôt essayer de savoir comment on fuit ses souvenirs ? Pourquoi est-ce que tu en veux, alors qu’ils font tellement mal ? Oui. Mais c’est un enfant. Il n’a pas pu vivre des choses si malheureuses, si ? Et il ne sait pas, il n’a jamais vécu ça. Il n’a jamais vécu les larmes, quand on revient à la réalité. Cette nausée quand le souvenir est triste. Cette douleur qui court dans les veines, qui donne envie de se recroqueviller, de mourir dans l’instant pour ne plus avoir à affronter cette ville.

Mais il y a eux. Eux, tout ceux qu’on rencontre au fur et à mesure. Eux, à qui elle doit, sans doute, d’être encore là. Eux, qu’il faut absolument qu’elle retrouve. Elle s’accroupit à côté du petit garçon.

- Je ne sais pas. J’aimerai beaucoup te dire comment récupérer tes souvenirs, mais… coa...je ne sais pas, vraiment. Ils viennent, parfois, comme ça. Tu verras, ce sont des petits sphères qui font de la lumière. Coa. On dirait des…. Eh bien, des lucioles. Coa.

Oui, des lucioles. Maléfiques lucioles. Elle se demande, un instant, si la prochaine fois qu’elle en verra une, elle trouvera le courage de tendre la main pour retrouver son passé. Ou si elle s’enfuira lâchement. Comme elle aurait déjà dû le faire avant. Comme elle aurait dû le faire, pour ne pas voir le corps, pour ignorer qu’elle avait perdu petit frère.

« Hécate est un nom merveilleux, quoiqu’un peu rude.

Elle se sent presque rougir. Presque. Un peu rude ? Elle médite cette remarque un instant. Pour elle, Hécate n’est rien et tout à la fois. C’est la première chose à laquelle elle a pu se raccrocher. Alors à vrai dire, qu’importe ce qu’est Hécate, elle en fera une seule et unique chose : elle. Et pour l’instant, elle ne se sent pas rude. Plutôt….visqueuse.

Elle se redresse doucement. Pour la première fois, l’inconnu a un sourire sur le visage. Un sourire qu’elle ne saurait déchiffrer. Il lui reste 58 heures. Comment peut-il sourire ainsi en le sachant. Ou bien est-ce un simple sourire de façade ? L’évocation des souvenirs, quant à elle, ne semble pas l’étonner. Elle en déduit qu’il sait. Qu’il a déjà vécu ça. Commence à revoir son opinion. Peut-être est-il là depuis longtemps…

« Candide. Mon nom est Candide.

Candide. Quel nom…étrange. Presque poétique. Même si ce n’est pas le premier mot qui lui serait venu à l’esprit en voyant le jeune homme… Elle hoche la tête, comme pour approuver. Voilà qui est mieux. Et l’inconnu cesse d’être inconnu. L’inconnu est quelque chose. Il est quelqu’un. Et il en devient plus abordable.

- Vous avez croisé d’autres gens, depuis que vous êtes…ici ? On cherche un dénommé Novembre, une blonde qui s’appelle Calvetti. Et une rouquine, Décembre. Coa. Vous ne les auriez pas aperçu, par hasard ? Coa.

Ne pas perdre de vue ses objectifs. Et puis désormais, ça sera plus agréable. Si ces deux-là ne recommencent pas à se chamailler….

10h-12h

Je sors mon compteur de ma poche, observant mon décompte. Moi aussi, je suis plus très loin. Soixante-six heures, on peut encore faire beaucoup de chose en soixante-six heures quand même... ça représente deux jours et demi. Je regarde le blond. << Si tu es le premier, alors je serais le second, il me reste soixante-six heures. >>. Je cherche du regard une éventuelle luciole, quête de souvenir de ce passé inconnu. << Hey, les lucioles, vous êtes où bordel ?! >>. Impatience, j'en veux un maintenant !

Princesse grenouille cherche encore désespérément son prince charmant, si vous voyez Zac Effron dans le coin, dites lui que Kandoo est à sa recherche. Elle cherche également une Barbie Flicette et une rouquine inconnue au bataillon. Si vous avez des informations, appelez Superman au... Shit j'ai pas de numéro ! Je regarde Candide, Médor, va chercher les disparus le chien ! Allez Beethoven, fidèle Saint Bernard, tu auras un no-nos à la fin, promis !

« Premier à quoi ? Qu’importe.

« Elle qui te parle. Elle qui s’exprime. Lui qui dicte, gémit et prédit. Et au delà, que reste-t-il ? Toi. Toi Candide, qui t’omets peu à peu du tableau. Éloigné, torturé. Tu les regardes, proche, distant. Qui sont-ils, au delà ? Qu’aiment-ils, que vivent-ils ? Qu’ont-ils vécu ? Ont-ils souffert ? Des questions qui t’effleurent, qui t’échappent. Des réponses qui fusent, des évidences qui s’énoncent. A quoi bon nier ? Oui. A quoi bon nier ? Nier le regard de la brune, perdu. Est-elle surprise ? Surprise de ces sourires, de ces rires ? Qu’a-t-elle bien pu voir ? Cela t’intrigue, te dépasse. Alors tu survoles, te plonges autre part. Insaisissable, tu n’as aucun possesseur.

« Je n’étais pas seul, avant que vous veniez. Votre arrivée a signé le départ de mes…

« Tu te coupes. De tes quoi ? Amis ? Surement pas. Camarades ? Pensent-ils seulement à toi ? Alors tu ne finis pas. A quoi bon ? Ton ton est calme, profond, lisse. Un épuré qui veut tout dire. Le début, la fin. Il n’y a aucun reproche. Au final, tu ne sais t’attacher. Et cela ne les concerne pas. Tu y es habitué. A cette fausse communauté, à ces compagnies qui au final, sont égales à la solitude. C’est ton rôle. La fidélité n’existe pas, le plaisir se perd. Tu ne sais que faire. Alors tu ne fais pas. Tes sentiments sont palette, tu les sélections, en pure pantin. Pantin de ta propre vie. Peux-tu jauger tes propres ambitions, découvrir tes souhaits ? Ma vie était moche. Il fallait l’admettre, toi non plus, n’avait le passé rose. Alors pourquoi, pourquoi pouvais-tu encore sourire ? Tu étais si faible… Et pourtant… Si fort. Un prince digne, un prince d’armure et de fer. Un prince soleil. Illuminant et souriant… Pourtant inatteignable. Intouchable. A des millions d’années lumières. C’était ainsi. Et tu n’y pouvais rien. Le passé est le passé. J’ai oublié. Encore. J’ai été renié, porté disparu. Alors pour moi… Habitude. Tout cela n’est que routine. Une routine qui pourtant, te semble différente. Peu à peu, tu finis par vriller tes iris dans les siens.

« Peut-être pourrais-je vous aider.

Pupilles qui s’animent.
Sourire qui se forme.
Être mystique.
Mystères.

10h-12h
Communicatif

Soixante-six heures au compteur de Superman. La gorge de la jeune femme se serre. Comment pourrait-il… partir avant elle ? Est-ce que les plus vieux ne sont pas censés partir avant ? Est-ce que ce n’est pas dans l’ordre des choses ? Est-ce que ce n’est pas établi dans le grand cycle de la vie ? Elle pose ses grands yeux tristes sur le petit garçon. Non, bien sûr qu’il n’a pas conscience de ce que ça veut dire. Try again. Et les deux mots tournent en boucle dans sa tête, jouent avec elle, et elle lutte contre l’injustice de tout ça. Et son cœur se bat contre la hantise de la mort et de la disparition. Elle voudrait lui donner un peu de son temps, et reste condamnée à voir celui du petit garçon filer toujours plus vite.

- Sois patient, les souvenirs viendront, je te le promets. Coa.

Non, elle ne lui dit pas, elle ne lui dit pas que les souvenirs sont tristes. Peut-être que c'est de sa faute, après tout, peut-être qu'elle a merdé, dans sa vie d'avant...

« Je n’étais pas seul, avant que vous veniez. Votre arrivée a signé le départ de mes…

Alors lui non plus, lui non plus n’était pas seul. Elle sent dans sa voix, dans cette phrase tronquée, en suspens, la même hésitation qu’elle a ressentie à son arrivée dans la ville. La présence de ces inconnus. Tout le monde est inconnu. Et puis il y a eu le groupe. Et son cœur se serre encore un peu plus fort, menaçant d’imploser, d’être réduit en cendre sous la violence de l’absence.

Elle croise le regard de Candide, planté dans le sien. Le défie, l’accepte, le laisse couler, sans pour autant lui laisser lire. Non, il ne doit pas lire cette souffrance, lire ce vide. Elle est forte. Elle doit être forte. Pour elle, pour Superman, pour Milena, pour tous ceux qu’elle croisera et qui en auront besoin. Pour que plus jamais…le parking… Elle se maudit, de n’arriver à penser qu’à ça. Le regard vert se durcit, étincelle.

Elle se rattrape au sourire qui nait à nouveau sur les lèvres du blond. Pourquoi sourit-il ? Croit-il vraiment pouvoir les aider ? A combler l’absence ? A reprendre des marques ? Pense au sourire. Pas un sourire d’enfant, comme celui de Superman, sourire presque naïf qui réchauffe les cœurs et voit la lumière partout. Pas le sourire rassurant de Novembre, si rare ces derniers temps, et qu’elle aurait donné cher pour revoir. Non, un sourire bien différent, sourire indéchiffrable, qui fait naître un sourire-miroir chez elle.

- Bien. Et qu’est-ce que tu proposes pour nous aider, coa ?

10h-12h

Attendre les souvenirs ? Être patient ? Mais c'est pas moi ça ! Genre j'ai le temps d'attendre ! Je vais aller les chercher moi même si c'est comme ça ! Je contourne Hécate et Candide, passant dans les escaliers. Ici, je trouverais rien, je vais pas passer dix heures dans ce manoir ! << Je passe devant ! Je vais chercher des souvenirs et je vais fracasser la gueule des ennemis ! Et je serais le premier à sortir de cette putain de ville, vous pourriez inscrire mon nom en temps que héros, SUPERMAN ! >>.

Je ris d'avance, je suis plus fort qu'eux, je suis un vrai héros, ce genre de personne à foutre une raclé à un monstre en moins d'une minute. Je fouille dans ma poche, trouvant ma figurine Superman. Je la brandis en haut de ma tête et court en direction de la sortie, à moi la ville, à moi le pouvoir, à moi la gloire !

« Choice.

« Elle esquisse un sourire. Entame la réponse. Et toi, toi ne réponds pas. Que vas-tu répondre, qu’espères-tu répondre ? Que veux-tu, Candide ? Que signifies-tu ? Pourquoi ces sourires, pourquoi ce charme ? Pourquoi. Oui, pourquoi ? Tu es tenté, tenté de lui révéler certains points de ton passé. Une envie que tu réprimes, mais n’oublies pas. Elle te possède, et tu l’ignores. Tu ne sais que faire, alors laisses le temps te guider. Un temps qui pourtant, te fait défaut.

Mais qu’importe.

« On devrait le rattraper, non ?

« L’enfant s’est envolé, sans doute tente-t-il de sortir. Sortir de cette cage qui peu à peu l’emprisonne. Fils qui le drainent, qui lui prennent ce qu’il mérite de garder. Une innocence si facilement bafouée. Et lui, blond, reste là. Il parle, gentil, sans pour autant être là. Infranchissable il reste courtois. Rien n’échappe à son regard, il délimite ses songes et franchit les barrières. Il ne veut le mal, n’espère le bien. Sympathique, il est façade.

A qui saura voir.
Lentement, il enserre la main d’Hécate, et l’entraine à la poursuite du jeune.

10h-12h
Personnage secondaire

Soupir. L’air s’échappe doucement de ses poumons. Fatiguée par l’énergie de Superman. Une pile électrique, jamais en panne. Et dans une nouvelle poussée d’adrénaline, il disparait à l’angle d’un mur. Si elle écoutait son corps, elle se laisserait tomber ici, là, tout de suite, sur le sol, comme une pauvre loque. Mais elle ne l’écoute pas, ce corps épuisé. Elle n’a pas le temps. Elle ne peut pas le laisser partir à la recherche des souvenirs. Parce que ce qui l’attend dehors, ce ne sont pas des souvenirs. Ce sont des loups, des ronces, et des cadavres dans des parkings. Et elle… Elle, elle sera là pour cacher ses yeux, pour l’empêcher de voir, pour que jamais les pupilles bleues ne virent au rouge sang.

Elle ne brisera pas ses rêves de héros. Mais elle le suivra, personnage secondaire de l’histoire, fidèle valet, compagnon d’aventure. Grande sœur, tout simplement. Aussi ne proteste-t-elle pas lorsque Candide saisit sa main. Elle ne proteste pas, et elle serre même cette poigne chaude un peu plus fort, le suit sans rechigner. Oui, oui, bien sûr qu’ils vont le suivre, bien sûr que non, ils ne le laisseront pas seul dans cette ville. Et elle place dans sa main qui serre celle de Candide tous ses espoirs du moment. Elle n’est pas seule. Et même si rien ne va, rien n’est perdu non plus.

HJ:

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