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✿ Katya, elle vit pour écrire. Elle ne vit que pour écrire.

Les mots sont ses jouets favoris, les fleurs bigarrées qu’elle s’amuse à arranger de manière à en faire les plus beaux bouquets, des bouquins éclatants de bleu, de rouge et d’orange... Un feu d’artifices de couleurs. De mots, d’expressions, de phrases...

Sa perception du monde qui l’entoure ne dépend que de la façon qu’elle a de le décrire. Dans un esprit commun, la vue d’un arbre n’inspire rien de plus qu’un ‘‘Oh, y’a un arbre !’’ ; chez-elle, la vue d’un arbre se traduit par une myriade de phrases qui soulignent sa robustesse ou l’incroyable verdure de ses feuilles. Et comme tout l’intéresse de ce point de vue, on la retrouve souvent à fixer quelque chose, le regard vide, comme si elle voyait au-delà de l’objet. Elle voit au-delà de l’objet. Elle le reproduit en elle-même, armée de ses mots.
Elle semble toujours un peu absente, Katya, un peu ailleurs, un peu dans son monde. Elle est là et elle n’est pas là. Elle vous prête une attention fugace, entend vos paroles ; elle vous fixe d’un air rêveur parce que vos yeux lui inspirent une sauvagerie qui la fascine ou parce qu’elle pense captivante la moue méprisante de vos lèvres.

Elle est douce et gentille, a toujours un gâteau pour vos fringales et un sourire pour vos peines. L’exigence de son monde de lettres ne l’empêche aucunement de vivre dans celui auquel ses parents l’ont prédestinée lors d’une nuit d’amour, c’est juste qu’elle y existe silencieusement, discrètement, mais tendrement, comme un timide coup de vent lors d’accablantes chaleurs.
Katya, elle est du genre à vous serrer contre quand vous avez peur, à vous chanter une berceuse pour vous rendormir après un terrible cauchemar...

Toujours un peu absente, et toujours un peu présente en même temps.

Douce, rêveuse, silencieuse... Mais excessive. Cette jeune fille pour laquelle seul l’esprit importe aime pousser à bout son corps, voir à quel point il peut supporter avant de craquer. Aujourd’hui, elle ne sait plus exactement jusqu’où elle est allée mais elle sent encore vibrer le désir de titiller ses limites. Elle le sent, empressé et autoritaire, mais ne s’y abandonne pas, trop occupée qu’elle est à comprendre qui elle est et pourquoi elle est là.
Cependant, plus que tout, elle aime repousser les limites de son esprit, songer à ce que l’on ne pourrait imaginer sans une petite aide. Voir dans le plafond une virginité usée par le temps, qui y parviendrait sans un joint entre les lèvres ?

Elle roule, Katya, roule et roule et roule des pétards. C’est sans doute pour cette raison aussi qu’elle n’arrive jamais à vraiment quitter son univers.

Il s’agit peut-être d’une peur du réel, ce réel qu’elle ne perçoit jamais qu’au travers de ses mots, cette beauté et cette monstruosité qui l’entourent et dont elle ne prend conscience qu’au travers de ses descriptions... Trop accoutumée qu’elle est à ce monde qu’elle s’est créée, elle ne voit peut-être plus l’intérêt de s’abandonner au monde réel. Peut-être parce qu’elle en sent la banalité ou la cruauté.

Qui sait.

✿ Indéniablement, Katya maîtrise l'art complexe et infini de l'écriture. De même, ses connaissances en littérature ne se heurtent à aucune limite et elle peut aisément citer Eluard (qui est son poète favori), Maupassant, Wilde... Elle s'intéresse tout particulièrement au mouvement surréaliste qu'elle trouve passionnant de par sa démarche d'expérimentation littéraire.
Autrement, elle roule comme une déesse et sait faire des ronds de fumée.