«  Non, je préfère t'appeler par ton vrai prénom. Mais si tu veux, devant des inconnus je peux toujours t'appeler Xéna, question de sécurité !  »

Cette preuve inhabituelle de bon sens me tire un petit sourire. Nathalena… je vais avoir du mal à m’y habituer, malgré l’impression que ce prénom a toujours fait partie intégrante de moi. Peu importe, nous devions partir. Dame prend les devants, sortant de la gare sans s’assurer que nous la suivons. Ce que nous faisons, bien sûr. Il ne peut en être autrement. Je me suis fixé de retrouver Sergueï avec elle et le presque inconnu est décidé à ne pas nous – me – lâcher. Pas avant longtemps. Cela ne me pose aucun problème particulier. En revanche, le choix de destination de la bouclée sans chaussures me perturbe très légèrement. Le métro… La dernière fois, c’était avec Août et Chancelier. Ce dernier avait été enlevé par des ronces, juste avant que la crevette ne nous rejoigne et que le métro nous embarque. Très mauvaise idée donc de rentrer là-dedans. Sa réplique suivante est… comment dire… preuve de son inconscience et de son ignorance. Je m’apprête à lui faire remarquer que, si ce n’est pas éclairé, nous avons dix fois plus de chance de tomber sur un truc qui nous tuera à coup sûr avant même que nous puissions le voir.

"Après toi. Si ils vous ont suivies, il vaut mieux que tu descendes avant."

Encore et toujours lui. Je soupire, ravalant mes remarques, et tente d’apercevoir quelque chose dans la noirceur de ces escaliers. Rien, pas un mouvement, pas une ombre, pas une lumière. Juste le néant. Joke y serait déjà. Oui et Août aurait plongé à sa suite tandis que je serais restée à tergiverser des heures durant, avant, moi aussi, d’y aller. Alors je prends sur moi. Juste un peu. Juste assez pour me dire que, finalement, le métro n’est pas la pire de nos options.

 "Nathalena arrive. Je descends après. Et tu m'appelles comme tu veux, c'est pas vraiment important.

Vas-y,  te gêne pas, dicte-moi ma conduite ! Au lieu de l’agresser pour un presque-ordre qui, je le devine, est purement destiné à me protéger – comme si j’en avais besoin, franchement… – je marmonne en descendant les marches :

 - Je te préviens, si tu meures, je n’en prendrais pas la responsabilité. Et… si Skull te convient, ce serait parfait. Comme tu as un crane tatoué sur le visage.

J’espère que ça lui a donné matière à réfléchir ; je n’ai pas besoin d’être couvée. Une fois en bas, je cherche Dame dans l’obscurité. La brune a sauté sur les rails. De mieux en mieux… maintenant on peut dire que nous sommes suicidaires. Je saute à mon tour et lui murmure à l’oreille :

- Au moindre bruit suspect, on dégage des rails. Le métro est encore en fonction, alors évitons de nous faire écraser stupidement.

Spoiler:

Par expérience, car oui, je suis déjà venue ici, je sais qu’il vaut mieux éviter de parler trop fort dans ces tunnels. Parce que ça résonne. Et que ce n’est vraiment pas une bonne idée de signaler notre présence de cette façon. J’ai cru entendre des voix, sur le quai, vite effacées, mais d’autres ennemis rodent ici.

 - Oui, c’est pourquoi je suggère que tu parles plus doucement. La dernière fois, nous avons été attaqués par des ronces et transportés par le métro jusqu’au centre commercial.  

Une autre voix s’élève juste près a mienne, amplifiée par les parois incurvées du tunnel de métro. Il a réussi à ne pas se manger un mur en progressant dans le noir, est vivant et j’en suis secrètement soulagée, mais sa réplique se contredis.

"Profitons de son absence pour progresser. S’il doit passer, il en profitera peut-être pour nous éclairer. On s'inquiétera des problèmes lorsqu'on les rencontrera. Si on les rencontre."

  - Mec, si on croise le métro alors que nous sommes sur les rails, il nous éclairera sur la meilleure façon de mourir broyés. Et les problèmes, mieux vaut s’en inquiéter longtemps avant qu’ils ne surviennent, parce qu’ici, ils sont du genre mortels.

Il faut que je perde cette mauvaise habitude de penser à voix haute. Je tapote l’épaule de « Skull » - puisqu’il n’a offert aucune objection à ma proposition, autant le surnommer ainsi pour le moment – puis celle de Dame. Il n’y a aucun moyen pour notre petit groupe de savoir si le métro s’arrêtera en nous « voyant » sur son chemin.

- La précédente option n’est pas à négliger, alors voyons ça comme une épreuve de plus à passer pour nous en sortir vivants. Je vous propose deux choses : on court vers l’avant, ou vers l’avant. En gros, ça passe ou ça casse.

Acte irréfléchi. Humour déplacé. Pas du tout. Avancer est l’unique voie qu’il nous reste, non pas parce que de gros rochers éboulés bloquent notre retraite, mais bien à cause des instruments. Ils ne nous poursuivent pas, pourtant j’ai le sentiment que l’orchestre psychopathe ne lâchera pas l’affaire aussi facilement. Ne pouvant qu’être derrière nous, il nous faut donc progresser. Quant à l’humour pourri… Sans commentaires.
Je sers leur épaule respective, me repérant à l’instinct. Lui, à gauche, me dépassant d’une demi-tête. Elle, à droite, presque de ma taille. Et j’avance. De cette façon je m’assure qu’aucun d’eux ne reste en arrière et que nous ne soyons pas séparés. J’ai l’habitude, mais ce serait bête. Vraiment très bête. Un peu triste aussi, peut-être… Ironique surtout. Twice in a few hour

HJ: