We're just misguided ghosts, travelling endlessly ♪

22h-00h

Elle note un changement dans la dynamique de leur tandem, désormais. C’est évident pour elle, sûrement plus que ça ne l’est pour Blanc mais ça ne la préoccupe plus autant que ça. Elle a saisi qu’il n’est pas invincible, et maintenant que sa carapace s’est percée devant elle, elle sait aussi qu’il est aussi paumé qu’elle. Jusque là c’était une évidence pour Violette, le fait que Blanc devait la protéger et prendre soin d’elle, mais maintenant, elle sait qu’elle a également son rôle à jouer. Son ami ne veut pas s’avouer qu’il était perdu et surtout, il ne veut pas le montrer. Il semble un peu déconnecté aussi, comme si la réalité lui arrivait dans le cerveau de façon altérée. Cette fois-ci, c’est clair dans sa tête, ils ont enfin une vraie relation de symbiose, chacun apporte à l’autre quelque chose. Ca la soulage en partie, elle n’aimait pas se sentir comme un fardeau, un poids mort.

Puisque son rôle a elle est de soutenir Blanc comme elle le peut et ne pas le laisser perdre les pédales, elle se laisse guider vers le manoir de toute façon trop heureuse de quitter ce jardin maudit. Evidemment, rien ne lui assure que l’intérieur de l’imposante bâtisse sera mieux, mais ça, elle avisera quand elle y sera.

Blanc a retrouvé sa stature droite et fière et son regard est de nouveau perçant et dénué de toutes les interrogations qu’elle y a lu quelques instants plus tôt. Violette s’enorgueillit de ne plus marcher dans la combine et de voir plus loin que son apparence de … et bien de bourgeois coincé.

Mais une question demeure. Que s’est t-il passé avec cette boule ?

C’est le bruit de la porte qui s’ouvre qui la ramène à la réalité et avant qu’elle n’ait vraiment eu le temps d’appréhender ce qu’elle peut trouver à l’intérieur de ce manoir, Blanc l’y attire, le menton fièrement levé comme si le fait que la porte se soit ouverte soit une victoire pour lui. Elle lève les yeux vers lui avec la ferme intention de lui signaler qu’il n’y est sûrement pour rien, que si ça avait été elle, le résultat aurait été le même mais il a l’air tellement fier de lui qu’elle se résigne. Qu’il se voile la face autant qu’il le veut, elle a assez de réalisme pour deux, pour le moment.

Ils s’avancent dans ce qui semble être un salon. La porte se referme toute seule en grinçant. Le cœur de Violette se contracte, elle a de nouveau cette impression d’être observée. Prudente, elle observe la pièce. Des canapés de velours, de vieux tableaux poussiéreux, un feu de cheminé. Là, à quelques pas devant elle, il lui semble distinguer une trappe presque invisible sous l’importante couche de poussières. Son cerveau lui envoie des signaux contradictoires. Visiblement, c’est abandonné. Mais pourquoi ce feu ? Et la porte qui s’est ouverte ? Elle comprends bien assez vite qu’en rentrant dans ce manoir, ils ont relancé les dés de la partie dans lesquels ils semblent être les pions … Reste à savoir si c’était un nombre gagnant ou pas.

Elle fait doucement tourner sa main dans celle de Blanc pour pouvoir glisser ses doigts entre ceux de son ami.

« Ne vois-tu pas … ? Je doute que tu trouves un propriétaire à qui parler, mon ami … Je doute que tu trouves quelqu’un dans cette ville … »

Sa voix rebondit doucement sur les murs, tournoie dans l’air et résonne dans l’immense espace entre le sol et le plafond. Elle attend, la peur au ventre, mais rien ne se passe. Au fur et à mesure que les secondes s’écoulent, la tension se relâche. Plutôt que de n’entendre que le vide et le silence pesant, elle semble maintenant ne percevoir que les doux crépitements du feu. Son regard est irrémédiablement attiré par la seule source de chaleur de l’endroit. Elle se rend alors compte à quel point elle a froid, à quel point elle se sentit fatigué. Les canapés ont l’air si confortable …

« Peut-être que je suis malade … Je me sens faiblarde. »

Dans son esprit, toutes ses pensées semblent essayer de la convaincre, de lui donner des tas de raisons d’aller se coucher sur un de ses canapés, de profiter du feu et de dormir. Après tout, elle a mal aux jambes, mal à la tête, mal au cœur …

Il fait si bon près du feu... Elle est contente de voir des invités dans son Manoir. Même si le fait que ce soit le Fou et la Sangsue Violette la déçois. Tant pis. Elle leur jette un oeil furtif. Le Manoir doit être beau pour ses nouvelles poupées.

Une à une, les bougies du grand lustre s'allument d'elles même, éclairant la pénombre. Les portraits accrochés au mur sont à présent visibles. Le feu crépite et déploie une douce chaleur, les fauteuils ont l'air confortables... Une sphère jaune descend un escalier et flotte autour de Violette. Un souvenir pour la Sangsue.

Il fait si bon près du feu... Mais quelque chose gronde tout bas et fait vibrer le sol. Quelque chose situé sous la Trappe. Un hurlement strident retentit s'élève puis disparaît. S'ils avaient déplacés le tapis, ils auraient pu distinguer les contours de la Trappe et l'énorme cadenas. Une inscription était gravée à même le bois : Ne pas ouvrir. De toute façon, la clef n'est pas à portée de vue. Mais il suffirait de chercher...Ou d'essayer de tirer un peu...

Spoiler:

Vérités et Chaussettes.

La porte s'ouvrit en un grincement sinistre. Un de ces grincements qui nous renvoie instinctivement à ces romans noirs, à suspens. Un de ces romans où la présence du surnaturel n'est jamais très loin. L'Homme aimait ces romans là, enfin, c'était ce qu'il pensait. Il savait qu'il avait un goût prononcé pour la belle littérature et la bonne musique. Il ne serait donc pas étonnant qu'un roman dans ce genre puisse lui plaire. Et, dans ces romans, il y avait souvent la présence d'angoisse, d'adrénaline. N'était ce pas ça qu'il recherchait ? Ce n'était pas de la folie, il n'était pas un psychopathe comme il avait pu le lire dans les yeux de la rouquine du Train, non, il était simplement drogué à l'adrénaline.
Il fit quelques pas dans la pièce sombre, pourtant aussitôt son regard s'habitua à cette pénombre lui laissant deviner les formes des fauteuils confortables. Ses yeux enveloppèrent la surface de la pièce, guettant la moindre anomalie, il avait placé son corps sur une attitude défensive. Pourtant ce n'était rien qu'un salon banal, tout ce qu'il y a de plus ordinaire. La porte d'entrée se ferma d'un coup, coupant l'entrée du froid glacial de l'extérieur. Il sentit un léger changement d'esprit chez Violette, quelque chose la mettait mal à l'aise ? Ou au contraire ce lieu lui semblait être plus reposant que le jardin ?
L'homme sourit tout en s'approchant d'un des fauteuils pour s'y asseoir. il était satisfait, il commençait à retrouver des sens aiguisés et une certaine perspicacité. Il serait ainsi moins étourdi et ne lancerait plus son couteau pour le simple plaisir de le voir s'enfoncer dans le bois d'un quelconque mur. Non, il userait de son couteau avec une certaine modération. Il faut savoir mettre des limites à tout, que ce soit en matière de tabac comme en matière d'armes blanches. Il faut instaurer des limites.
L'Homme était assis confortablement dans le fauteuil et se mit à tâter ses poches pour y trouver ... pour y trouver quoi ? il ne savait pas, ce geste avait été un pur réflexe, un geste irréfléchi comme avec le couteau. Des restes d'une vie passée ? Peut être, mais il en doutait. Sa curiosité venait d'être piquée.
C'était donc avec un oeil nouveau qu'il se mit à observer Violette tandis que celle-ci parlait. Elle n'était pas très très grande, mais elle n'était pas très petite non plus. Ce n'était pas une gamine comme il avait pu le croire dans le train, non c'était tout simplement une jeune fille qui frappait par ses cheveux violets. Et ses yeux violets. Portait elle des lentilles ?

« Peut-être que je suis malade … Je me sens faiblarde. »

L'Homme soupira, et de nouveau, sa main replongea dans sa poche. Il sentit sous sa paume un objet rectangulaire, au toucher qu'il lui semblait connu sans qu'il puisse pour autan réussir à identifier à l'avance ce qu'était cette Chose. Il le sortit alors et compris tout de suite, c'éait un livre. Oui un petit livre dont le titre bien connu était celui d'Alice au Pays des Merveilles. Un titre joliment écrit, un livre qui a connu de multiples lectures mais qui ne semble pas en souffrir pour autant. Nan, cette usure du cuir semble avoir raviver en lui une âme, oui, comme si le livre possédait une personnalité à part entière. Un livre charismatique au charme irrésistible. Comment résister à cette envie ? A cette envie de plonger aussitôt ses yeux dans l'histoire de la jeune fille ? On ne peut pas résister. Tout simplement.
Il ouvrit le livre dont il connaissait l'histoire par coeur, il ne savait d'où il tenait se savoir, mais il savait, et c'était tout ce qui comptait pour lui, savoir quelque chose lui réchauffait le coeur, plus qu'une flamme n'aurait su faire. Il leva les yeux de son livre et regarda Violette un énorme sourire sur les lèvres. Il désigna le sofa près de lui et l'invita a s'y asseoir. Mais quelque chose 'D'anormal" dans ce monde de fou se produit.
Le feu s'alluma tout seul et se mit à crépiter doucement. Enveloppant la pièce de sa chaleur pour le moins inattendue. Un à un, les chandeliers s'allumèrent, éclairant d'un halo les moindres recoins du salon. La pièce devint au fil des secondes un endroit douillet et agréable, un petit cocon contrastant étrangement avec le jardin hostile. L'Homme sembla tout d'abord surpris, interloqué par toute cette 'agitation". Puis il se détendit de nouveau et son sourire refit surface :

"Parfait, Ils ont tout prévu."

Il essaya de se replonger dans son libre, mais quelque chose semblait le tracasser. Jamais deux sans trois.
Instinctivement, sa main vint se plonger dans sa poche, cherchant le couteau. Il se reprit de justesse et se leva. Il remarqua alors la sphère lumineuse qui descendait l'escalier. L'envie de la gifler le prit, mais il secoua la tête. La violence ne résout jamais les problèmes, non ?
Pourtant, il se voyait mal discuter avec une Boule autour d'un délicieux thé. La sphère s'était approchée de Violette, Mad sourit et cacha le tourment qu'il ressentait. Il n'arrivait cependant pas à cacher ce pli disgracieux entre ses deux sourcils. Cette ride qui en disait long sur son ressenti de la situation. Mais il ne voulait pas inquiéter Violette. Il voulait certes la protéger mais il ne pouvait rien faire contre le Souvenir. Non, il surgissait toujours au moment venu, au moment voulu. Elle ne pouvait pas fuir, il ne pouvait pas la protéger de la douleur que pouvait engendrer le souvenir, il ne pouvait rien faire pour elle. Si, il pouvait lui tricoter des chaussettes, ou lui préparer un petit plat. Mais ce n'était pas pareil. On ne protège pas des personnes en leur fournissant des chaussettes en laine de mouton. Nan, on ne peut pas protéger des personnes avec ça. C'est peut être pour ça que le trafic de chaussettes n'existe pas ? Enfin, n'existe pas à sa connaissance. C'est un concept qu'il faudra exploiter.
Il se tourna vers la petite Betterave.

"Ma chère amie, cette sphère n'attend que vous."

Il tourna quelques pages de son livres et soupira.

"Allez, tu peux la toucher, on va tout de même pas y passer la nuit."

Intérieurement, il se félicita. Sans doute ne savez-vous pas pourquoi. Pourtant cette phrase anodine lâchée à l'instant disait beaucoup de choses. Il l'avait tutoyé. Cette sangsue était passée du rang d'insignifiante au rang d'amie. Il commença lentement a chanter, aucune paroles ne sortaient de sa bouche, il n'y avait que des sons. C'était une mélodie, douce et lente, comme une berceuse. Il aimait bien cette chanson, mais il ne savait pas de quel compositeur elle pouvait provenir. Il se rassit dans son fauteuil et posa son livre ouvert sur ses genoux, attendant avec impatience les moindres gestes de Violette.

{Je n'ai pas corrigé les fautes ~ Honte à Moi D8]

Elle se tient là, en plein milieu de la pièce, à se battre contre toutes ses pulsions qui la poussent à aller s’enfoncer dans un des sofas à l’apparence tellement confortable et lui, lui, il traverse le salon d’un pas dansant comme s’il était chez lui et s’assoit sur l’un d’eux le plus naturellement du monde. Ses muscles se tendent et elle oublie l’espace d’un instant toute sa fatigue et ce qui va avec. Elle attend, l’oreille tendue, qu’on punisse Blanc pour l’affront qu’il vient de faire, mais rien ne vient. C’est un soulagement, alors elle s’autorise un petit soupir … soulagé. En regardant son ami farfouiller dans ses poches, elle réalise qu’il a beau sembler plus âgé qu’elle, il est en réalité comme un gosse. Un gosse qu’il faut surveiller de près et qui ne se rend pas compte des dangers et des risques autour de lui. Cette pensée la fait sourire doucement, sourire qui se dissipe rapidement pour laisser place à une moue intriguée quand elle le voit sortir de sa poche un livre. Un vieux livre un peu corné et un peu jauni aussi. A la façon dont Blanc le regarde, elle se dit qu’il est précieux, il a l’air précieux, en tout cas. De là où elle se tient, elle n’arrive pas à lire le titre gravé dans la couverture de cuir mais pour sûr, elle meurt d’envie de savoir de quoi parle ce bouquin. Les longs doigts gantés de Blanc caressent doucement la reliure et il redresse la tête vers elle et l’invite d’un geste de la main agrémenté du plus grand sourire dont elle ait eu le droit jusque là à prendre place près de lui, sur un autre sofa. Violette en oublie toutes ses inquiétudes, à quoi bon ? Ce sofa a l’air vraiment confortable et elle est sur le point d’écouter une histoire racontée par Blanc. Ca ne fait aucun doute pour elle qu’il est un conteur d’exception et peu importe l’histoire qu’elle va entendre, ça vaudra largement le risque qu’elle aura pris en s’asseyant sur un de ces canapés. Sans oublier que ses jambes lui semblent vraiment faiblardes …

Sa décision prise en moins d’un quart de seconde, elle s’avance vers les canapés et la chaleur de la cheminée. Les lumières s’allument une à une mais le surnaturel de la chose n’arrive pas à faire stopper Violette. Ce qui la stoppe c’est l’intense source de lumière qui l’éblouit brusquement, sur sa droite. Intriguée, elle se détourne de la vision des fauteuils moelleux pour se retrouver nez à nez avec une boule lumineuse, identique à celle qui s’est approchée de Blanc quelques instants plus tôt. Les yeux écarquillés, elle en oublie la sensation de chaleur en provenance du feu. Est-ce là les règles de ce jeu cruel ? Qu’on lui rappelle justement qu’elle ne semble être qu’un pion dès qu’elle parvient à l’oublier ?

Blanc la dévisage un long moment, les sourcils plissés mais le regard plus calme que celui qu’il arborait après sa propre rencontre avec la boule de lumière.

"Ma chère amie, cette sphère n'attend que vous."

Il se détourne finalement d’elle pour reporter son regard sur son livre, comme s’il se désintéressait de ce qui pouvait lui arriver. En premier lieu, Violette se sent blessée. Elle a si peur de cette sphère, cette chose qui a su déstabiliser son ami alors que rien, ni l’amnésie ni les silhouettes fantomatiques d’une ville abandonnée n’avaient réussi à le faire flancher. Lui, il semble plongé dans son livre, mais elle ne le quitte pas des yeux. Si elle pouvait croiser son regard encore une fois peut-être comprendrait-il qu’elle meure de peur. Et puis regarder ailleurs ce serait prendre le risque de regarder cette horrible sphère.

"Allez, tu peux la toucher, on va tout de même pas y passer la nuit."

La chaleur qui se diffuse brusquement en elle ne provient en aucun cas du feu. Elle oublie sa peur et se rend compte qu’elle affiche un énorme sourire enchanté. Blanc semble tellement désintéressé mais maintenant, elle sait. Elle se retourne vers la sphère et pose une main sûre dessus. Qu’elle s’occupe de ça le plus vite, parce qu’après, elle a une histoire à écouter.

Un souvenir pour la Sangsue. Blanc l'a mise en confiance. À cause de lui, elle a touché la sphère. À cause de lui, Elle ne peut plus profiter de son accueil des plus surprenants. Mais Blanc joue le jeu. Il s'est assis. Il ne se méfie pas. Qui sait ce qui rôde, sous la trappe ? Un souvenir pour la Sangsue...

Violette:

Une tapette à souris, s'il vous plait.

Il ne fait plus attention à Violette, elle a touché la sphère -maintenant, cela ne regarde qu'elle, elle seule -, non, quelque chose d'autre, quelque chose de plus intéressant l'a absorbé dans la lecture de son petit livre. Il l'a ressorti et réouvert et le tiens maintenant au niveau de ses yeux. Ses doigts mènent une danse affolante sur le livre, les pages tournent, le doigt glisse le long des lignes d'encre, les pages tournent encore une fois et il s'arrête. Le voilà, il est là dans le bouquin, un personnage dans toute sa splendeur. Le voilà qui fait son apparition, apparition remarquable et remarquée selon le livre. Un sourire prend place dans un coin de ses lèvres, un petit sourire mauvais. Lui même est un personnage, un personnage fou dans cette ville de tarés. Alors il sera Lui.
L'Homme ferme son livre, le glisse dans sa poche. Son regard glisse sur le parquet usé jusqu'à trouver les pieds de Violette. Il la regarde, elle semble en transe, comme si quelque chose la possédait, comme si elle était dans un monde parallèle. Un monde immatériel fabriqué de mensonges ?Peut être. Après tout cette vague de souvenir qui l'avait secoué un peu plus tôt aurait pu être un mensonge, une simple illusion. Il secoua la tête, il reparlerait de tout ça la tête reposée, avec une personne ayant un minimum d'intelligence et de conscience. Violette ? Peut être, s'il en avait l'envie.
Il se leva, et fixa le tapis. C'était de dessous qu'il avait entendu un cri strident. Aucun animal n'était capable de produire ce son. Enfin ...
Il se pencha et poussa le tapis près du feu. Il l'ajusta pour que celui-ci fut parallèle à la cheminée. Puis revint vers la trappe. Car c'était une trappe qui se tenait là.
Il vit alors le cadenas, comment le rater ? Celui-ci était anormalement énorme. Trop énorme pour que la chose qui se trouvait enfermée là dessous est était une petite bête inoffensive. Il réussit aussi à déchiffrer les lettres qui accompagnait le cadenas "Ne pas ouvrir". Alors il fut intrigué. Les interdits, c'est plutôt "cool" nan ?
Il ri silencieusement, il était un vrai gamin, un gamin qui détestait les règles et l'autorité sous toutes ses formes. Il avait un sérieux problème.
Il posa sa main sur le cadenas, il avait l'intention de le forcer. Mais il voulait savoir ce que Violette en pensait. Il voulait voir dans son attitude, dans son regard ce qu'elle pensait. Il ne voulait pas avoir besoin de mots assemblés pour pouvoir la comprendre. Les mots sont des mensonges, le silence est la vérité. Elle n'allait pas tarder à émerger de sa transe il le savait, il ne ferrait rien sans son approbation. Ce n'était pas une forme d'autorité qu'il attendait de Violette, non vous croyez bien ! C'était un consentement mutuel. S'il ouvrait la trappe, c'était eux deux qui se retrouvaient dans la merde, si cette chose était dangereuse.

Elle tombe. Au ralentit. Doucement, comme si ça lui prenait des années. Elle a le temps de grimacer avant de sentir le choc. Puis il arrive, il vient, il est là, il répand d’horribles ondes de douleur dans toutes ses jambes. Le bruit sourd qu’ont fait ses genoux en tapant le parquet résonne dans sa tête. Elle lève doucement les yeux vers la sphère lumineuse qui se tenait là un instant plus tôt mais il ne reste plus rien. Plus de rien de visible, tout du moins, parce que tout est en elle. Pourquoi est-ce que tout lui semble aller aussi lentement maintenant ? Elle s’est vue tomber à genoux et maintenant, elle se regarde baisser la tête vers le sol, comme si elle allait y trouver un indice, un signe. C’est étrange, cette sensation qu’elle n’est plus vraiment ici, qu’elle est ailleurs. Ailleurs, dans cette cours, par exemple. Elle ressent tout ce qu’elle a vu, c’est une certitude, elle a vécu tout ce qu’elle a vu. Qui était cette fille qui s’est penchée sur elle ? Et ce besoin désespéré de voir deux couettes roses danser devant ses yeux ? Mais par-dessus tout, il y a cette certitude qui circule partout en elle, cette certitude qu’elle ne sera jamais comme les autres, jamais normale. C’est à peu près le même sentiment qui lui colle à la peau depuis son réveil dans le train, sauf que cette fois-ci, elle ne peut plus le faire taire. Il a explosé en elle et c’est évident, désormais, elle est malade, faible et fragile.

Son corps est lourd, si lourd. Elle se pensait petite et fine, pourtant. Mais là, tout de suite, c’est plus qu’elle ne peut soutenir. Quelqu’un lui appuierait donc sur les épaules ? Elle bascule de nouveau en avant, et se retrouve désormais à quatre pattes, les mains à plat sur le sol devant elle. Elle a le souffle court et son cœur bat la chamade dans sa poitrine. Elle le sent, c’est là quelque part devant elle, presque à portée de mains, les réponses à toutes les questions qu’elle pourrait se poser. Qui est-elle réellement, d’où vient-elle. Sa vie passée, ses souvenirs … Mais ça la dégoûte, ça l’horripile. La colère explose dans sa poitrine, la frustration, la rage. Elle avait bien fait de ne pas vouloir fouiller dans ses poches. A quoi bon ? Elle ne valait visiblement pas mieux avant que maintenant. Elle n’est qu’une fillette informe, sans force et sans volonté. Ses yeux se remplissent de larmes.

Puis le monde se remit à marcher à la bonne vitesse.

Soudainement gênée que son ami ait pu la voir, elle s’empresse de sécher ses joues en se cachant derrière sa chevelure violette. Quand elle estime que toute trace de larmes s’en est allée, elle relève la tête vers le canapé, mais Blanc n’y est plus. Surprise, elle jette un regard autour d’elle et le retrouve un genou à terre et une de ses mains gantées enserrant un énorme cadenas. Sceptique, elle se relève et se rapproche de son ami pour se rendre rapidement compte qu’il se tient sur une trappe. Elle se rappelle du hurlement et un frisson la parcourt. Le feu n’arrive plus à la réchauffer, alors elle referme son hoodie sur elle. La voilà désormais en face de Blanc, les pieds à côté de la trappe.

« Tu as une idée de ce qui pourrait être en dessous ? »

Poser des questions, piquer la curiosité de Blanc. Avec un peu de chance (mais vraiment un tout petit peu parce que c’est plus de la logique, là) il partira dans un de ses délires, compréhensibles que par ceux qui vivraient avec lui dans sa réalité alternative, comme ça il ne se rendrait pas compte de son état. Elle relève les yeux vers lui et croise son regard vert d’une rare intensité. De quelle couleur sont ses yeux à elle, tiens … ?

« Tu veux l’ouvrir ? »

Les bruits en provenance de la Trappe s’étaient soudain arrêtés. Un silence lugubre régnait dans le grand salon du Manoir, à peine troublé par les crépitements du bois dans l’âtre. La pluie gouttait sur les carreaux. Tout était calme.

Driiiiing. La sonnerie stridente retentit sans prévenir, s’arrêta un court instant et reprit de plus belle. Cela venait d’un téléphone. Un très vieux téléphone à l’ancienne posé sur une table basse qui ne semblait attendre qu’on daigne décrocher.

Spoiler:

Sonnerie de Réveil.

Le réveil semblait avoir été dur pour le jeune fille, elle s’était étalée par terre. La tête la première, comme si toutes ses forces l’avaient quitté. Les fourbes. C’est toujours comme ça, on se croit au sommet de sa force, on croit que le monde est à nos pieds, que tout est possible, que les rêves sont accessibles, enfin. Et non, tout s’écroule. Comme les fébriles châteaux de cartes. Bam, une tempête, le valet tombe. Une bourrasque et c’est la reine qui tombe. Une brise légère et le Roi rend les armes. Jusqu’à l’As. Un jour tout le monde tombera comme des cartes, à coups de déceptions et de maladies. Tout le monde finira au même endroit. La vie est là pour nous détruire, nous pour résister à cette destruction.
Il y a des moments où l’on perd pied, ou tout semble fichu. Elle semblait être en ce moment là, au plus bas. Elle avait baissé la tête, elle voulait lui cacher ses larmes, elle voulait paraître forte. Mais l’Homme voyait tout, pourtant il sourit. La petite apprenait vite. Cacher ses faiblesses était une bonne solution. Mais il lui aurait permis de pleurer, le souvenir fait toujours pleurer n’est ce pas ? Il l’aurait pris dans ses bras peut être, il l’aurait aussi peut être réconforté, comme font les amis. Mais il ne bougea pas. Il voulait peut être qu’elle se débrouille toute seule. Comme une Grande.
N’était ce pas lui qui l’avait mis en confiance en lui permettant de toucher la sphère ? Peut être ne s’attendait-elle pas à un choc ? Les chocs font souvent pleurer.

Elle releva enfin la tête, elle regarda tout d’abord le canapé. Elle fut surprise, sans doute avait elle cru qu’il n’avait pas bougé entre temps. Puis ses yeux vinrent trouver ceux de l’Homme, naturellement. Il fut frappé encore une fois par la couleur dominante qui avait pris possession de la jeune fille. Que du Violet, Violet partout, habits comme cheveux en passant par les yeux. Cette coquetterie, car Il prenait ça pour une coquetterie de petite fille, le fit sourire.

L’Homme la regarde, elle frissonne et referme son pull. Enfin, son truc qui lui sert de pull. Visiblement, Violette ne semblait pas vouloir voir ce que renfermait la Trappe. C’était un peu compréhensible en quelque sorte. Après ce qu’elle venait de « vivre » il était normal que sa soif d’aventures soit satisfaite. Mais l’Homme n’était pas du genre a rester inactif, à rester planter sans rien faire, sans partir à l’aventure, sans créer sa propre aventure. Car après tout, c’est lui créait son aventure. Une aventure ne vient jamais toute seule, quelque chose la pousse à venir, nos choix. De nouveau il sourit, ses pensées étaient d’une débilité hors norme à cette heure-ci.
Mais, Il n’avait pas totalement tort, pensa-t-il.

« Tu as une idée de ce qui pourrait être en dessous ? »

Oui, bien sûr qu’il en avait des idées. Cela pouvait aller de la vieille chaudière qui avait un léger dysfonctionnement à l’animal fantastique tout droit sorti d’un roman de science fiction ou de je ne sais quel genre de bouquin. Oui, il y avait bien des milliers de possibilités. Les plus improbables étant acceptées dans cette Ville Fantôme, à en croire par les fleurs qui bougeaient, l’Ombre qui parlait et la porte qui s’ouvrait toute seule.
Il fallait se faire à l’évidence, cette Ville n’était pas le lieu idyllique qu’il s’était fait croire en arrivant, le lieu parfait dont il ne voyait pas les mystères et les anomalies. Cette Ville était maléfique, enfin, quelque chose de sinistre et de dangereux en ressortaient, créant une alchimie effrayante. Alors lui vint une question logique, une question qui était anodine, pourquoi lui ? Pourquoi Violette ? Y avait-il eu un événement dans leur vie avant leur arrivée qui aurait poussé quelqu’un, ou quelque chose, à les amener ici ?
Cette question resta sans réponse, mais il se promit de trouver une explication valable par la suite. D’ailleurs, il n’avait pas répondu à la question de Violette, il avait encore laissé son esprit dériver.

« Tu veux l’ouvrir ? »

Il se releva aussitôt.
Il n’en voyait pas l’intérêt, si elle ne voulait pas, il n’allait pas l’ouvrir.
Il secoua la tête.

« Non non, je voulais juste voir de quel bois était fait cette Trappe. Le manque de lumière m’en empêche, c’est dommage. »

Mensonge, il ment comme il respire. Avec un naturel déstabilisant, les mots viennent à sa bouche pour créer ce mensonge. Lui-même se dégoûte de ne pas dire la vérité. De toujours cacher les choses, de mentir, tout simplement. Comment Violette peut-elle faire pour le supporter ? Lui, qui est juste la personne la plus insupportable, la plus mensongère et la plus maniérée ?
Peut être est-elle naïve ? Nooooooon, impossible.
Alors il s’approche du fauteuil et s’y assoit. Sa place est encore chaude. Il sourit à nouveau, il est encore heureux, c’est vraiment étrange, être heureux alors qu’il n’y a pas de quoi l’être.
Dehors, la pluie s’est mise à tomber. Doucement, comme une petite berceuse, les gouttes s’abattent sur les carreaux des fenêtre du Salon. L’Homme ferme les yeux, saisi par le bien être dégagé par le silence.

« DRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIING »

Il se réveille en secoué par la surprise et se rue vers le téléphone. Un vieux modèle, posé sur la table basse, il ne l’avait pas remarqué. Il a saisi l’appareil dans ses mains, il s’apprêtait à le jeter par terre, comme un vulgaire réveil qui l’aurait réveillé au mauvais moment.
Il se ressaisit, la violence n’est pas une solution n’est ce pas ? On ne résout pas des problèmes avec des coups. Et peut être que l’appel est important. Peut être qu’au bout du fil une personne lui proposerait du thé, oh oui, du thé vert. On ne peut pas refuser du thé vert.
Il jette un regard étonné à Violette.

« Je répond. »

Il n’attend nullement son accord, pas cette fois, il n’est pas en phase d’interrogation et/ou de doute, non, là il sait ce qu’il veut faire. Il veut répondre, maintenant. Sinon le répondeur se mettra en route, certainement. Enfin, s'il a de la chance, car sur un modèle plus vieux que Lui même, il n'était pas sûr qu'un quelconque répondeur ai pu être mis.
Il prend le combiné et le plaque à son oreille, après avoir écarté les cheveux de son oreille, évidemment. Ça ne peut pas avoir que des avantages d’avoir des cheveux longs.

« Allôô, Mad Hatter du Manoir de la Ville de Nulle-Part, j’écouuuuute. »

Il avait dit cette phrase le plus naturellement possible, et par réflexe, son doigt s'était mis à entortiller une mèche de cheveux, puis, il sourit à Violette, par réflexe encore une fois. Le visage de la sangsue ne peut que le faire sourire.
Au faite, Elle ne savait pas qu’il s’appelait Mad Hatter hein ? Il avait oublié de se présenter, ce sauvage. Et bien, maintenant, elle savait son prénom. Mr Hatter est dans la place chers amis.

« Allôô, Mad Hatter du Manoir de la Ville de Nulle-Part, j’écouuuuute. »

Et voilà qu’il recommence. Il faut bien se l’avouer, cette ville est plutôt angoissante mais à ce moment précis, une fois de plus, Violette se voit parfaitement bien arpenter les rues sombres et hantées de leur nouveau foyer avec ce phénomène près d’elle. A chaque fois que les choses deviennent terrifiantes, ces moments où elle aurait vraiment pu perdre pied, il faisait toujours ce petit truc qui le différenciait des autres. Ses galipettes aériennes en face de la silhouette macabre, son coup de colère devant les couleurs des fleurs dans le jardin hanté et maintenant, sa voix haut perché. La logique voudrait qu’elle se mette à paniquer, qu’elle pleure peut-être même, mais avec Blanc, tout avait un goût différent. Au final, elle n’a aucun autre choix que celui de pouffer discrètement, la main devant la bouche. En réponse, elle a droit à un sourire qui lui réchauffe instantanément le cœur, lui faisant oublier sa détresse.

Elle réagit alors sur la façon dont il s’est présenté au téléphone. Est-ce qu’il vient de se trouver ce petit sobriquet sur le coup ou l’avait-il en réserve depuis le début ? Elle le détaille du regard une énième fois, ses sourcils légèrement plissé et une moue pensive accrochée aux lèvres. Mad Hatter. Elle comprend ce que ça veut dire, donc elle a quelques notions d’anglais. D’où lui est venu cet étrange nom ? Peut-être du livre qu’il feuilletait plus tôt. Quelque chose cloche. Ce surnom a quelque chose d’effrayant, d’intimidant. Oui, à première vue, il colle parfaitement bien à son ami, mais elle, elle ne le voit plus comme ça. Elle ne se rappelle même pas si elle a déjà eu vraiment peur de lui. Elle jette un coup d’œil au mouvement du doigt de son ami qui enroule et tortille dans tous les sens une des longues mèches de cheveux blancs encadrant son visage. S’il veut qu’on l’appelle Mad Hatter, très bien, mais pour elle, il restera Blanc. Ca lui va bien mieux.

Elle s’avance de quelques pas, réduisant à néant la distance qui les séparait quelques instants auparavant. Ses yeux ne lâchent pas Blanc du regard, elle attend de décrypter quelque chose sur son visage qui pourrait lui donner une idée de la réponse qu’il reçoit, de l’autre côté du fil. Quelque chose la frappe alors… Si le téléphone marche, la ville est donc alimentée en courant. A première vue, elle n’aurait jamais pensé ça, tout semble abandonné depuis si longtemps …

C’est une bonne chose, du courant, non ? Elle ne sait pas encore pourquoi, mais elle se dit que ça ne peut pas être mauvais.

« Alors ? »

« Qui est-ce ? »

" Non j’ai rien trouvé d’intéressant, à part des couverts. On pourra toujours faire goûter les liquides incolores à Novembre. "

La voix sonna claire et limpide à ses oreilles, à peine déformée par le fil du téléphone. Le signal se coupa un moment dans un chuintement étrange et reprit. Mad Hatter venait de tomber sans le vouloir sur un moyen de communication et entendait les paroles de Calvetti et Hécate restées dans la Cafétéria.

Et Elle ? Elle riait dans l'ombre tout alanguie de fatigue. Petits jouets naïfs et innocents. Ils se parlent. Mais ils ne savent pas. Oh non, ils ne savent pas ce qui les attends.

Spoiler:

« Alors ? » chuchote t-elle. « Qui est-ce ? »

Il ne répondait pas tout d'abord. c'était simple, il n'y avait pas de réponses à sa question. A l'autre bout du fil, il n'y avait que le silence, parfaitement innocent. Il s'apprêtait à raccrocher, bien sûr, avec quelques jurons bien placés, quand tout à coup, une voix mit fin à son geste.

" Non j’ai rien trouvé d’intéressant, à part des couverts.

C'était une voix féminine, il se prit alors a croire que c'était sa voix, celle douce et mélodieuse, rauque et tendre à la fois, ce contraste étonnant qui ne pouvait que la faire désirer.
Mais ce n'était pas ça qu'il entendait. C'était une voix qui plongeait dans les aigus, sans rien de particulier. Une voix monotone c'était tout. Il était presque déçu.

On pourra toujours faire goûter les liquides incolores à Novembre. "

Olaaa, voilà qu'on parlait de liquides colorés ! Qu'est ce que ça pouvait bien être ? Des substances illicites ? Avec du colorant ? C'était fort probable. Cette Ville Fantôme ne semblait pas très bien famée, enfin, seul sa présence en ces lieux pouvait donner à cette Villle l'aspect d'un lieu paradisiaque, sans aucun doute.

Il regarda Violette et lui tendit la partie du téléphone dont il avait oublié le nom. La petite chose qui permettait d'entendre sans parler. Ainsi, elle pourrait suivre la discussion et au besoin, il lui prêterait le combiné pour qu'elle puisse y prendre part.

"Une demoiselle nous parle à l'autre bout du fil, son langage est fort étonnant."
Dit-il en regardant avec gravité Violette, mais pourtant, on pouvait voir dans ses yeux une sorte de sournoiserie vicieuse.

"Euh... C'est Calvetti et Hécate. Dans la mairie de... Nulle-Part. Vous nous recevez ?"

Encore cette même voix.

"Il semblerait que nous vous recevions parfaitement."

Il eut un gros blanc, comme disent les jeunes, un long silence. Etait-elles toujours là ? Il secoua le téléphone énergiquement, quand il entendit un grésillement :

" Des amis à vous ? "

La voix d'un homme tiens. Ils étaient donc plusieurs ? A plusieurs, on s'amuse beaucoup. Hinhin.

"Allôôô ? Excusez moi mais il semblerait que nous avons eu un léger problème de communication, vous disiez ?"

Il fronça les sourcils en songeant à l'erreur fatale qu'il avait faite.

"J'ai omis de vous mentionner que je ne suis pas seul, je suis avec Violette. Et nous sommes seuls apparemment, dans un manoir fort ravissant. Mais je vous avouerai qu'un peu plus de chaleur ne serait pas de trop."

Il sourit à Violette encore une fois, il semblait prendre ce qu'il se passait comme un jeu, un vulgaire jeu entre gamins.

Blanc semble dans l’attente d’une réponse. N’en pouvant plus et trépignant presque de curiosité, Violette se rapproche un maximum de lui et se hisse sur la pointe de ses pieds pour rapprocher son oreille du combiné. Pour toute réponse, Blanc lui tend l’autre partie du téléphone et elle la porte rapidement à son oreille. Elle n’entend rien et ça l’énerve, ça l’agace. Elle lève les yeux vers son ami, prête à ronchonner mais à l’air perplexe de ce dernier, elle comprend que lui non plus n’entend rien. Il secoue le combiné dans tous les sens visiblement agacé à son tour que tout ne marche pas comme il le faille. Elle pose une main sur son avant bras pour le calmer.

« Attention, tu risquerais de le casser … »

Ce téléphone est la seule chose d’à peu près normale qui leur arrive depuis le train et elle compte bien en profiter un maximum. En plus de ça, il leur permet de communiquer avec d’autres personnes, probablement dans la ville eux-aussi. Habitants réguliers ou visiteurs, comme elle et Blanc ? Avec ou sans mémoire ? Son cerveau s’agite dans tous les sens, ils ont peut-être des informations. Ce vieux truc qui grésille est peut-être leur clé de sortie. Elle le colle avec force contre son oreille quand elle entend une voix masculine sortir du combiné.

« Des amis à vous ? »

Blanc se redresse de toute sa hauteur.

"Allôôô ? Excusez moi mais il semblerait que nous avons eu un léger problème de communication, vous disiez ? J'ai omis de vous mentionner que je ne suis pas seul, je suis avec Violette. Et nous sommes seuls apparemment, dans un manoir fort ravissant. Mais je vous avouerai qu'un peu plus de chaleur ne serait pas de trop."

Elle oublie le sérieux de la situation et tout ce que l’arrivée de ce téléphone, et surtout les voix de l’autre côté pourrait sous entendre pour eux, pour leur chemin de sortie de cette ville, elle oublie tout ça juste le temps de répondre au sourire joueur de Blanc par un de ses sourires malicieux. Il s’amuse comme un fou, devine t-elle. Alors ça l’amuse elle aussi. Il est loin son moment de fatigue et de faiblesse, elle se sent revigorée par leur découverte et lève de grands yeux interrogateurs vers Blanc, pour savoir si elle peut s’emparer à son tour du combiné. Une fois la chose faite, elle prend une profonde inspiration avant de commencer à parler. Le téléphone ne paraissait pas si grand et si lourd dans les mains de son ami …

« Bonjour, je suis Violette et nous sommes au Manoir de la Ville. Nous sommes perdus et … un peu déboussolés. »

Violette retient son souffle en rendant le combiné à Blanc et en récupérant son petit machin tout bizarre pour écouter la possible réponse. Elle a choisi de parler comme si les personnes à l’autre bout du fil étaient normales, et comme si cette ville n’avait rien de bizarre. Quoi qu’il se passe, en tout cas, ils tiennent enfin un moyen de prendre le dessus sur le jeu malsain qu’on exerce sur eux.

« Bonjour, je suis Violette et nous sommes au Manoir de la Ville. Nous sommes perdus et … un peu déboussolés. »

Il hoquette de surprise. Lui déboussolé ? Jamais !
Il sent sa colère monter en lui, il sent qu'il va exploser et remettre cette petite à sa place, mais pourtant, il ne bouge pas. Quelque chose l'empêche de la frapper. La frapper ? Pourquoi la frapperait-il ? On ne règle pas ses problèmes ainsi. Non mais franchement, ceux qui tapent sont des lâches, des imbéciles sans aucune morale. Lui, il n'est pas comme ça, hein ? Lui il est pas lâche. Enfin, c'est ce qu'il croit. Elle lui tend le combiné et Mad Hatter le prend dans ses mains.

Alors, il ne crie pas. Il regarde Violette, pas de sourire sur les lèvres cette fois.

"On est pas déboussolés. Toi tu l'es peut être, mais pas moi. J'ai toujours le contrôle de la situation."

Il pose le combiné sur la table. De toute façon, il ne veut plus entendre ce que les autres on a lui dire. L'Homme s'approche de la cheminée et tend ses mains vers le feu. Le feu crépite doucement et la pluie semble s'être calmée. Tout est si calme qu'il sent la fatigue s’emparer de ses jambes. Fatigue, sommeil, envie de dormir ?
Tiens, cette sensation lui semble étrangère. Machinalement il sort sa montre à gousset.
64 heures. Evidemment, c'est logique. Il la remet dans sa poche et enlève sa veste noire et la pose sur le dossier du fauteuil.
Il s'allonge dans le sofa et regarde le plafond. Il ne voit pas d’araignées, et ça le fait sourire.
Il regarde alors Violette.

" Tu veux que je te raconte une histoire ?"

Lorsqu’elle lève les yeux vers Blanc, elle voit son regard peser sur elle comme s’il cherchait à lui faire sentir toute sa désapprobation mais l’idée qu’il ait pu se vexer de ce qu’elle a dit l’amuse. La réalité est bizarre dans cette ville mais avec Blanc à ses côtés, elle se déforme encore plus. A chaque instant qu’elle passe près de lui, elle se sent glisser dans l’étrange monde qui semble être le seul que les beaux yeux verts de son ami puissent envisager. Pourquoi ne pas jouer le jeu ? Qu’aurait-elle à perdre ? Rien, c’est évident. Et il a l’air de s’amuser bien plus qu’elle. Elle veut ça, elle aussi. Cette insouciance. Enfin, pas trop tout de même, il faut le garder à l’œil, l’empêcher de faire des bêtises qui pourraient le mettre en danger.

Elle hausse doucement une épaule en soutenant son regard et une fois de plus, elle se demande de quelle couleur sont ses yeux à elle. Elle espère qu’ils sont dignes de faire face à ceux de Blanc.

« Je sais que tu n’es pas déboussolé. Mais que penseraient ces gens s’ils savaient que moi je l’étais et pas toi ? Ils se diront que tu n’es pas très gentleman d’avoir laissé une jeune fille dans le désarroi. Et ce serait une honte pour moi de leur laisser croire ça, mon cher ami. »

Violette sourit. Elle n’est pas mal en pompeuse. Ca donne bien, ça lui plaît. Elle a un flash, elle s’imagine maîtresse de cette immense manoir, Blanc à ses côtés. Ce serait terrible de voir la tête de la personne qui les manipule depuis le début, depuis leur réveil, quand elle se rendrait compte que ses petits jouets ont pris le dessus sur le plateau de jeu.

Elle se sort de ses pensées et regarde Blanc aller s’asseoir avec élégance sur un des sofa moelleux. Il se désintéresse totalement du téléphone. Elle porte le combiné à son oreille et écoute. Rien. Des bruits confinés, indistincts, pas assez pour réveiller sa curiosité. Et puis, dans l’immédiat, elle se sent bien trop comme Blanc pour se soucier des autres. Elle est bien là. Elle ne sait pas si ce sera toujours le cas dans une heure, alors elle va en profiter.

" Tu veux que je te raconte une histoire ?"

Voilà qui ravive son intérêt, par contre. Elle se demande quel délire psychotique pourrait sortir de l’esprit de Blanc. C’est intriguant et à la fois exactement ce qu’elle veut. Alors elle hoche vivement la tête et s’empresse d’aller s’asseoir auprès de son ami. Elle hésite. Se vexerait-il si elle se blottissait contre lui ? Il est tellement propret, si bien vêtu, sans aucun pli sur ses vêtements, elle risquerait de le mettre en colère. Mais là, si prêt de lui qu’elle sent sa chaleur, elle louche presque sur ses bras. C’est plus fort qu’elle, c’est comme si elle s’était toujours jetée dans les bras de ceux qui lui sont proches. C’est peut-être le cas. Qu’est ce qu’elle en sait ? L’idée lui déplaît d’abord. Mais elle finit par lui plaire, parce que désormais, elle concerne Blanc. Elle va attendre, choisit-elle finalement. Peut-être qu’elle pourra simuler un élan de fatigue. Elle pose donc simplement les paumes de ses mains sur ses fines cuisses.

« Je suis toute ouïe. »

Et c’est surprenant de se rendre compte à quel point c’est vrai.

Spoiler:

Tic, tac, tic, tac...
Le temps passe et n'attend pas...

Spoiler:

« Je suis toute ouïe. »

Il sent des ailes lui pousser dans le dos. Quelque chose le pousse à raconter une histoire, aussi futile soit-elle. Il veut raconter une histoire, sans aucune importance, sans portée peut être. Peut être n’y aura-t-il pas de morale, peut être qu’elle ne restera pas gravée dans la mémoire de Violette, peut être bien, aussi, que cette histoire ne lui plaira pas. Peut être qu’elle ne l’écoutera pas ?
Il s’en fout.
Cette histoire sera sa toute première histoire dans cette ville. Comme une renaissance. Cette histoire lui redonnera de la force. La force d’avancer. Et il espère qu’il en sera de même pour Violette. Que le temps de ce récit, elle oubliera tous ses petits soucis, toutes ses questions et son mal être. Peut être qu’elle fermera les yeux ? Alors il s’en réjouira. Pour lui , fermer les yeux pendant une histoire n’est pas une offense, un signe malveillant empli de haine. Non, fermer les yeux est signe de confiance, juste ce fait le remplira de bonheur. Violette se sentira si bien, si elle ferme les yeux.

Mad Hatter se lève, attise les braises du feu. Il ne doit pas faire froid.

«Percé jusque'au fond du cœur
D'une atteinte imprévue aussi bien que mortelle,
Misérable vengeur d'une juste querelle,
Et malheureux objet d'une injuste rigueur,
Je demeure immobile, et mon âme abattue
Cède au coup qui me tue.
Si près de voir mon feu récompensé, ô Dieu, l'étrange peine !
En cet affront mon père est l'offensé»

Il se retourne vers Violette, le sourire aux lèvres.

« C’est joli hein ? C’est de Corneille. Brillantissime. »

Le voilà fin près pour le récit. Il cherche son inspiration, inspiration qui ne vient pas.
Un moment, il reste debout, le dos tourné au feu. Se balançant sur ses pieds. Pourtant il n’a pas l’air gêné, ni l’air contrarié. Il n’a pas l’air de chercher. Il n’y a pas de rides sur son front, ni des sourcils plissés. Seuls ses yeux transmettent sa réflexion. Et encore.

Et ça vient. Un flot de paroles, des mots qui s’assemblent, des phrases qui s’accordent. L’imagination prend vie.

« Tout le monde dansait. Il faisait si bon dans le château, le vin coulait a flots, et ce n’était pas pour déplaire au roi. Il voulait que la fête soit grandiose, et elle l’était. Elle ne faisait que commencer mais déjà tout semblait parfait. Les rires des convives emplissait son pauvre cœur de joie. Une joie qu’il se gardait bien d’exprimer. Oui, un Roi est un mur, lisse et parfait, toutes les remarques, tous les compliments, tout lui est indifférent. Le Roi est intouchable. »

L’Homme délaisse son feu pour se poster en face de la fenêtre, tel une sentinelle. Pourtant, il n’arrivera rien, ils sont à l’abri ici. Rien ne sert de surveiller.

« Pourtant, dans cette pudeur d’âme ; le roi rêvait. De quoi pouvait-il bien rêver ? Lui qui semblait tout avoir ? Tout posséder ? Lui qui semblait être aimé de tous ? De quoi pouvait-il bien manquer ? »

Il se tourna vers Violette.

« De quoi ? »

Il souria, se rapprocha de la cheminée. Son doigt glissa le long de la cheminée.

« Lui même ne savait pas. Il était troublé, tout simplement, c’était ce dont il essayé de se persuader. Il ne voulait pas savoir d’ou venait ce trouble qui lui avait paru si soudain. Il ne voulait pas en connaître la provenance. Bien que quelque chose en lui semblait en connaître la source. Un roi est intouchable. «

Il secoua son doigt, envoyant la poussière dans l'air. Une mine de dégoût prit place sur son visage.

« Alors la musique reprit de plus belle, et l'euphorie emporta même les plus retissant, dont faisait partie le roi. Ils dansèrent, Il dansa. Il semblait retrouver une jeunesse passée, il respirait la forme, le joie de vivre. Toute cette joie retomba quand il fut en face d'Elle. »

Il se retourna une nouvelle fois vers Violette. Avait-elle fermé les yeux ?

Violette suit des yeux les nombreuses allées et venues de son ami, savourant avec un plaisir non dissimulé les intonations mélodieuses de sa voix alors qu’il se laisse aller dans les méandres de son imagination. Elle se sent bizarre, comme en deux parties. Elle sait qu’elle est morte de fatigue et que si elle s’allongeait maintenant, elle s’endormirait aussitôt. Mais d’un autre côté, elle est tellement fascinée par cette histoire qui sort tout droit de l’esprit de Blanc qu’elle en oublie sa fatigue. Pour le moment. Elle regrette qu’il se soit éloigné d’elle alors elle ne le lâche pas des yeux,, assise bien droite sur le canapé.

A peine commence t-il sont histoire qu’elle se surprend à analyser, à chercher à comprendre. Il lui semble qu’elle a toujours cherché à comprendre, que c’est comme une seconde nature chez elle. Analyser et observer Blanc, c’est une idée qui lui plaît alors elle ne rejette pas cette preuve-là de son passé. Elle visualise parfaitement le décor qu’il vient de planter et le visage songeur de ce Roi d’un autre temps. Blanc serait-il en train de parler de lui ? Serait-il le personnage principal de cette histoire ? Ca ne l’étonnerait pas, il a tout du Roi qui se réjouit de voir que tout se passe bien autour de lui. Il a également cette capacité de cacher aux autres ses réflexions. Mais elle, elle a deviné, oui, parce qu’elle observe.

Blanc se détourne de la fenêtre devant laquelle il s’était posté pour plonger ses yeux émeraudes dans ceux de Violette. Oui, de quoi pourrait rêver ce Roi qui semble tout avoir ? A sa place, Violette se sentirait seule. Elle rêverait de compagnie, de quelqu’un qui la comprendrait sans qu’elle n’ait mot à dire. Est-ce de ça que Blanc rêve également ? Elle soutient le regard de son ami, impatiente d’entendre la suite de son récit, ce qui ne tarda pas.

Blanc change une nouvelle fois de place mais elle ne fait plus vraiment attention. Ses yeux sont peut-être fixés sur lui, mais elle est ailleurs. Cette fête dont il lui parle, elle y est. Sans difficulté, elle voit les robes de tissus colorés virevolter devant ses yeux. Elle entend la musique, entraînante, joyeuse et mélodieuse. Les éclats de rire, partout autour d’elle. Elle voit des seigneurs tous plus beaux les uns que les autres, des parures étincelantes et des coiffures tellement élaborées qu’elles confèrent aux visages les plus banals une beauté renversante. Elle s’imagine sans mal se frayant un chemin entre tout ce beau monde, levant les yeux vers ces nobles, trop petite et informe pour être vue d’eux. Elle est en première loge pour suivre l’histoire, elle est prête à assister à tout ce que Blanc lui offrira.

Elle traverse la salle de bal en évitant les collisions avec agilités. Les gens dansent, oublient le monde extérieur. Elle garde en tête son but mais elle n’oublie pas pour autant de savourer l’architecture du vaste salon. Les dorures sur les murs, les tapisseries, les grandes fenêtres laissant apercevoir un ciel découvert scintillant de nombreuses constellations propres à ce monde. Elle est sûre que si la salle était vide, elle entendrait les lames de parquet grincer sous ses pieds. Pas d’un grincement sinistre et annonciateur de peurs nocturnes, non, d’un grincement chaud et rêveur. Mais les éclats de rire lui vont également alors qu’elle arrive à l’autre bout de la salle. Elle le voit, il est là, il se tient fièrement, le buste redressé et un regard presque tendre posé sur ses sujets.

Même lorsqu’il danse et qu’il se laisse aller à l’euphorie du moment, le roi lui paraît grave et blessé. Il n’a aucune raison de l’être, Violette le sait. C’est un bon Roi, un Roi pacificateur, attentif et juste. Aucune tragédie n’est jamais venue assombrir son regard pourtant, elle y voit de multiples nuages. Il virevolte avec grâce, sourit mais là où d’autres ne voient qu’énergie dû à la fête qui bat son plein, Violette, elle, ne sent que de la retenue. Cet homme l’intrigue, elle veut en savoir plus. Elle reste debout à le fixer.

Eclatant d’un rire léger et vivifiant, il tourna sur lui-même avant de s’arrêter net juste devant elle. Qu’a-t-il vu ? Elle sent les fourmillements se répandre dans tous son corps. Elle n’a jamais vu un tel regard sur le visage du Roi et pourtant, elle a l’impression que le voilà plus sincère que jamais. Il n’est qu’à quelques centimètres d’elle, totalement figé. Oubliée la danse qu’il maîtrisait avec perfection, oubliés les éclats de rire qu’il feintait sûrement un peu, oubliée la fête dont il était le gardien encore quelques instants plus tôt. Tout autour de lui, tout bouge, virevolte et s’agite mais plus rien ne déteint sur lui. Il est comme une statue de marbre.

Alors Violette pivote elle aussi. Qu’a-t-il vu ?

Elle semble s'être emprise du décor, elle semblait s'être emprise de l'histoire, vivre l'histoire comme un véritable personnage. Elle était loin la petite Violette, si loin.
Il la voit, dans le château, riant de bon coeur, émerveillée par tous les détails luxueux de la vaste demeure. Elle virevolte, fragile, délicate. Petit papillon violet.
Ses yeux pétillent, elle vit, elle n'a plus ce teint de porcelaine, presque maladif, non, elle a le teint rougi par la fête.

Il secoua la tête. Il faut revenir à l'histoire, oublier Violette dans le canapé. Oui, le roi malheureux, son trône gracieux et son allure de zombie déprimé, allure qu'il essaie tant bien que mal à faire oublier dans cette fête. Oui, l'heure est à la fête, le Roi ne peut se permettre de broyer du noir. Il lui faut être digne, sérieux, joviale, être le Roi que tous attendent.
Mais, ce Roi, n'en a-t-il pas marre des conventions ?
Il y a toujousr un moment ou tout fait BOUM. Ou l'on envoie tout valser, ou on se fout de tout.
Le roi est minable, il a peur. Peur de déplaire et de changer.

"Tout dans la tête du Roi s'arrêta. Ce fut le vide total, un vide qui lui fit perdre tous ses moyens. Il se croyait fort, brave, mais le regard de la jeune femme lui rappelait qu'il ne valait pas grand chose. Il n'était juste qu'un tas de chair, un tas qui faisait son travail de façon mécanique."

Son regard se perdit dans la pièce. L'Homme se pencha sur un chandelier, et souffla dessus. La poussière vola dans l'air.
Il prit le chandelier, encore poussiéreux malgré le souffle qui avait remué les poussières..

Son histoire ne rimait à rien, que lui avait-il pris de raconter cela ? Et d'abord, qui était ce Roi ? Etait-ce lui ? Il ne savait même pas. Et cette ignorance, face à cette histoire, qu'il avait lui même créée, faisait monter en lui une rage terrible.

"Il baissa les yeux et s'approcha d'elle."

Mad Hatter ne baissa pas les yeux mais s'approcha de la porte.
Tel un serpent qui glisse dans l'Ombre. Il contourna les chaises; les fauteuils. Il reprit son manteau noir et le jetta avec élégance sur lui. Il ajusta le col de sa chemise et posa sa mains sur la poignée de la porte.
Ses doigt se refermèrent sur la clenche de la porte en bois. Il y avait aussi de la poussière ici, ce qui avait le don de l'exaspérer. Il leva les yeux au ciel et fronça ses sourcils.

" C'est l'heure de dormir."

Puis Il souria, il avait dit ça comme un père à sa fille, d'une façon si douce que l'ordre passait pour un conseil et non un ordre. Ne jamais brusquer les enfants, ils sont trop sensibles.
Pauvres bêtes insignifiantes.
Il n'était plus d'humeur à rire, ni à raconter des histoires.

Devant lui, une sphère lumineuse irradiait de sa lumière dorée. Elle l'attendait derrière la porte, paisible. C'était pour lui, un souvenir. Elle aurait pu rire, si elle avait eu une bouche. Voici ton passé, Blanc. Vas-tu oser l'affronter ?

Spoiler:

Le Roi se tient toujours près de Violette, face à elle. Elle voit son regard aussi clairement que celui de Blanc quand elle le dévisage. Il a l’air effrayé, angoissé, paniqué. Perturbé. Elle voudrait se retourner, savoir ce qui le tracasse à ce point mais elle ne peut pas, parce qu’aussi vaste soit ce monde, aussi attrayante et mélodieuse soit la musique, ce sont les mots de son ami qui a bâti cet endroit, dressé ce château et rempli cette salle de bal. Elle attend le dénouement, mais il ne vient pas et aussi bien dans la réalité que dans cette salle des fêtes luxuriantes, elle étouffe. Autour d’elle, les dorures s’effacent peu à peu et en plissant les yeux, elle distingue le retour de l’architecture gothique du manoir. Après les beautés qu’elle a pu caresser du regard, elle se retrouve désemparée devant les ténèbres du manoir comme celles de son esprit vide de tout souvenir. Elle est affalée sur le canapé et a encore du mal à reprendre pied avec la réalité. Elle a fait ça tellement bien, s’envoler ailleurs, rêver et imaginer qu’elle se retrouve bien obligée de s’avouer qu’elle a trouvé là un vestige de sa vie passée.

" C'est l'heure de dormir."

La voix de Blanc virevolte jusqu’à ses oreilles, douce mais sûre. L’espace d’un instant, elle est tentée. Elle se sent si fatiguée, en même temps. Elle ne doute pas que d’ici quelques heures, si elle ne prend pas le parti de fermer d’elle-même les yeux, elle s’écroulera sur le sol. Quand elle y réfléchit, elle ne comprend pas pourquoi son corps lutte avec autant de hargne contre la fatigue, tout le monde l’est, n’est ce pas ? Certes, elle semble peut-être plus exténuée que son amie, mais elle est plus petite aussi. Et lui semble tellement peu touché par toute cette histoire.

Mais est-ce la véritable raison de sa faiblesse physique ?

Elle rejette cette pensée, soudain effrayée. Pire que ça même, elle est terrifiée. C’est pour ça qu’elle ne veut pas savoir, jamais, ce qu’a été sa vie avant. Parce que dès qu’elle analyse, qu’elle cherche dans sa façon de penser ou d’être une trace de ce qu’elle a pu vivre avant, il y a cette peur qui gronde dans le creux de son estomac, cette peur insoutenable qui lui donne l’impression d’être une boule de nerfs. Même quand elle a dû faire face à l’ombre, elle n’a pas eu aussi peur. Même le jardin hanté ne l’a pas tant remuée.

Au bord du sommeil, elle rouvre brusquement les yeux, nouée par cette peur panique qui l’empêche même de bien respirer. Ses poumons sont nuls dans le rôle de poumons. Elle se redresse et jette un regard terrifié par-dessus le canapé. Il est là. Elle le cherche avec fébrilité, terrifiée qu’il ait pu la laisser seule. Terrifiée à l’idée d’être seule. Mais il y a un problème, il a la main sur une poignée. Il va partir, l’abandonner, ne jamais revenir. Ses doigts se crispent sur le tissu du canapé, tissu qui sent le vieux mais dont le toucher est doux, presque irréel.

« Ne me laisse pas. »

Sa voix tremblote mais elle est presque dure, c’est presque un ordre. Si elle était moins fatiguée, elle aurait presque pu paraître convaincante, se dit-elle. Mais là, elle sent, elle sait que Blanc va trouver la faille et l’exploiter. Il est comme ça. Il est terre à terre et il saute sur tout ce qu’il voit sans chercher à comprendre, à saisir. Elle vient sûrement de l’armer pour l’achever. Il va l’achever et s’en aller. L’abandonner. Pourquoi ça la terrifie à ce point ? Pourquoi est-elle persuadée que tout le monde la laissera toujours seule ? Non, c’est pire que ça. Pourquoi pense t-elle qu’ils devraient tous l’abandonner … ?

Qui est-elle … ?

Elle voit la porte s’ouvrir au ralenti et à la place de l’obscurité dans laquelle elle s’attendait à voir disparaître Blanc se trouve une source lumineuse étrangement familière. Une sphère. C’est à cause d’un de ces engins qu’elle s’est mise à avoir peur. Il a laissé un goût amer dans sa bouche. Avant, elle s’en sortait très bien en rejetant toute existence de son passé, maintenant c’est plus dur. Mais de toute façon, cette boule n’est pas là pour elle, elle n’a pas à se demander si elle doit la toucher ou pas. Elle est pour Blanc. Et bon Dieu, la voilà à espérer de toutes ses forces qu’il tende la main et saisisse ce fragment de son passé sans hésitation. Après, il aura peut-être changé d’avis et décidé de rester avec elle. Et tant pis si ça le blesse. Elle espère que ça lui fasse un peu mal, d’ailleurs. Comme ça, elle ne sera pas seule à se sentir blessée et à bout de force, si faible et si fragile.

Ses yeux restent rivés sur Blanc, elle sait très bien qu’il ne se retournera pas vers elle pour voir ce qu’elle en pense. Parce qu’elle ne pèse pas dans la balance des choix de Blanc, ou dans la balance de tout autre chose, d’ailleurs. Peut-être qu’elle est juste une distraction pour lui. Il aurait sûrement préféré faire de la belle rousse du train sa compagne d’infortune au lieu du petit bout de femme qu’elle est. L’amertume se déverse par vagues entières dans son corps, la colère, l’impuissance. C’est ça, elle est comme un oisillon tombé du nid, condamnée à regarder vers le haut ce qu’elle ne pourra jamais récupérer.

Bon Dieu, si elle pouvait, elle aussi elle s’abandonnerait.

Voilà, il a récupéré ses souvenirs. Et il retourne en exploration. Il ouvre la porte et semble trop intéressé parce qu'il voit, mais surtout ce qu'il pense pour se retourner vers elle et à dire vrai, Violette n'arrive plus à s'en offusquer. Là, tout de suite, elle est trop fatiguée.. Elle pense à son réveil dans le train, quelques heures plus tôt, dans la chaleur confortable de sa veste. Elle s'y blottit une nouvelle fois avant de fermer les yeux. Qui sait, quand elle ouvrira les yeux, elle se retrouvera peut-être ailleurs... ?

« Ne me laisse pas. »

Il haussa les épaules. Il aurait voulu rigoler, mais il n'a pas le coeur à ça. Il n'a plus l'envie de rigoler, de se laisser emporter par son euphorie. La porte s'ouvre est un grincement sinistre s'en échappe. L'Homme tape du pied, visiblement agacé par le bruit. Bon dieu ! Pas possible d'ouvrir une porte sans qu'elle grince. Il aime le manoir, certes, il adore son ambiance glauque et gothique. Ces portraits qui l'entourent, qui fixe leurs moindre mouvement. Il aime cette ambiance hors du temps que le salon donne. Oui il aime son manoir et il souhaite en faire sa demeure. Bien qu'il sache ne pas être très disposé a une sédentarisation.
Il s'approche des gonds de la porte et se penche. C'est bien ce qu'il pensait, celle-ci n'a pas été huilée depuis ... depuis quand ? Il ne sait aps, et à vrai dire il s'en fiche.

Il soupire et ouvre la porte. La lumière est déjà allumée dans la pièce, il s'apprête alors à jauger la personne qui se tiendrait en face de lui. Car qui dit lumière dit présence, quelqu'un doit bien être caché dans cette pièce, non ?
Haha, pauvre ingrat, toi qui croyais trouver une personne, tu fais pitié.
Car devant lui, ce n'est pas une personne, non c'est la chose qu'il se souvient avoir observer longtemps, dans le jardin. La même petite sphère, toujours aussi brillante, lumineuse.

Il se retourne vers Violette et l'interroge du regard. Elle devrait en avoir une aussi elle ? Non ?
Pourtant rien ne vient, rien devant ses yeux. Devant ses yeux affolés. L'Homme regrette maintenant son comportement, il n'avait pas à la traiter ainsi. Il n'avait pas a la prendre pour ce qu'elle n'était pas. C'est avec de la douceur qu'il fallait prendre Violette. A chaque fois, il avait vu qu'elle était blessé, a la moindre de ses remarques. Certes, certaines lancées sur le ton de la plaisanterie éveillaient en elle une sorte de joie, non, du bonheur. Oui, c'était un bonheur communicatif, un sentiment de bien être qu'elle ressentait en elle. Sans aucun doute. Enfin, si, il y avait un peu de doute, l'homme n'était pas Violette, il ne pouvait savoir ce qu'elle pensait réellement. Il ne pouvait qu'observer et déduire, émettre son opinion.

Il recula de quelques pas, observant la boule avec méfiance. Il pesa longuement le pour et le contre. Toucher ou pas ? Ce long moment dura quelques secondes. Il se résigna, qu'avait-il a perdre ? Rien, il ne pouvait que gagner. Gagner un souvenir, un débris que sa mémoire avait mis de côté. Et il voulait retrouver ce débris. Comme un grain de sable sur un château de sable. Oui parce qu'a vrai dire, un grain de sable, puis un autre, encore un autre, a la fin le tout petit ça fait grand. Et le grand c'est sympa, c'est grand quoi. C'est une impression de puissance, de supériorité que d'être grand. Puis chateau, ça veut tout dire. La forteresse ou une belle princesse est gardée par un méchant dragon, seul un prince peut la délivrer, puis ils vécurent heureux et eurent plein de mômes dégoûtants, et la belle princesse se suicida car elle en avait marre de toute la ribandelle de gamins qui gueulait, qui bavait partout. Une histoire normal en faite. Un peu Comme dans Shreck. Ouais, il se rappelait vaguement de Shreck. D'ailleurs, il était fort sympathique au fond cet ogre. Malgré ses manières de porcs, de ... on ne pouvait pas qualifier ce monstre. En faite il ne l'aimait pas. Il n'aimait pas ce genre de personnes : sales, qui rotent à table, c'était offusquant.
Il repensa aux châteaux de sable. Cela ne lui rappelait rien, ce n'était que des sensations qui lui venaient à l'esprit. La chaleur, les yeux qui piquent à cause de l'air marin. Le sable brûlant, une brise étouffante chargée d'effluves répugnantes.
Il n'aimait pas les chateaux de sable. Pas plus qu'il n'aimait le soleil. La sphère lumineuse était le soleil.
C'était pour lui un devoir de toucher la sphère. Pour consolider son château, pour avoir ce grain de sable, il devait toucher le soleil. C'était les règles du jeu, peut être se brûlerait-il ? Peut être que cette sphère, et surtout le souvenir, le ferait souffrir. Mais c'était comme ça. Pas de château sans sable.

Il tendit la main, et toucha la boule.

Il sourit, c'était drôle tout de même cette histoire de château de sable, il raconterait ça, la prochaine fois à Violette.

[Ah le monologue râté xD, bref, j'essaierai d'éditer demain, de rajouter des ptits trucs et de corriger mes fautes, mais là j'ai plus le temps x3]

Et il se rappela. Doucement, le grain de sable se posa sur le modeste édifice de sa mémoire balayée par les vents de l'oubli. Doucement, il glissa sur le petit tas bien ridicule qu'Elle avait daigné lui laisser. Glissa, puis s'immobilisa. Mad Hatter retrouvait sa mémoire, par petits fragments. Fragments dont celui-ci faisait partie :

Mad Hatter:

Généreuse malgré Elle, Elle lui accorda son temps... Son précieux temps...

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